Il est souhaitable de vouloir préserver la nature et la diversité des espèces animales et végétales, de libérer les femmes de leur assujettissement à l’ordre patriarcal, de combattre les inégalités et les injustices, le racisme et la xénophobie.
Mais tout combat légitime peut se transformer en une idéologie qui charrie les frustrations, les complexes, en un mot les pathologies des êtres humains et leur sert à masquer la haine, l’appétit du pouvoir, le besoin de vengeance, et finalement, comme l’histoire l’a démontré, risque d’engendrer des folies collectives capables d’entraîner des massacres de masse et des violences collectives.
La croyance et l’affirmation folles que l’être humain doit devenir un être sain, cette tentation totalitaire
Le point commun entre ces idéologies haineuses qui détournent ces luttes pourtant légitimes que sont le féminisme, l’écologie, la lutte contre les inégalités sociales, l’antiracisme, le combat contre l’homophobie, c’est la croyance et l’affirmation folles que l’être humain doit devenir un être sain, exempt de toutes turpitudes, qu’il faut nettoyer de toutes traces du Mal, libérer de la cupidité, du pouvoir, de l’impureté, afin d’en faire un être propre et sans souillures.
Cette tentation totalitaire qui revient sur le devant de la scène prétend rétablir le règne du Bien, et donc inévitablement se propose d’éliminer le Mal et ses adeptes : Le juif, l’apostat, le pollueur, le capitaliste, le financier apatride, le pécheur, le fornicateur, le mâle blanc, le colonisateur blanc…
La pureté n’existe pas. Nous sommes des êtres faillibles, très imparfaits
La pureté n’existe pas. Nous sommes des êtres faillibles, très imparfaits et c’est la raison pour laquelle nous avons besoin des autres, pour nous contredire, pour démolir nos arguments et nos certitudes. Cette soif de pureté politique, intellectuelle, idéologique empêche certains de débattre avec les « mauvais penseurs », de mettre à nu, d’exposer leurs propres contradictions et, risquons le mot, leur folie. Cette hallucination du réel que nous pratiquons les uns et les autres chacun à notre façon, soit parce que nous ignorons le réel, soit parce que nous faisons une confiance aveugle à nos maîtres et nos experts qui, eux aussi, font semblant de savoir parfaitement, déforme notre vision.
Bien sûr, il est inévitable et même souhaitable d’affirmer sans détour ce qu’on est, ce qu’on pense, mais restons conscients de notre faiblesse humaine, de nos erreurs et inexactitudes, de notre besoin de certitudes et acceptons de risquer le débat, pour l’amour de Montaigne et celui de Spinoza, de Molière et de Rabelais, de mon cher Mirabeau, le révolutionnaire, pour l’amour de Jaurès.
Acceptons le conflit avec nos adversaires, acceptons cette belle imperfection qui fait de nous des êtres fragiles et violents, mais aussi capables de devenir des « guérisseurs blessés » pour nous-mêmes et pour les autres.
© Charles Rojzman
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