La Hongrie d’Orban a déroulé le tapis rouge à Netanyahou et quitté la CPI

Recevant le premier ministre israélien, qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale, le gouvernement de Budapest a annoncé se retirer de cet organisme.

Viktor Orban avait jugé « honteuse », « cynique » et qualifié de « discrédit complet du droit international » la décision de la Cour pénale internationale (CPI), le 21 novembre dernier, d’émettre des mandats d’arrêt pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité contre le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. Le premier ministre hongrois avait prévenu : la Hongrie ne mettra pas en œuvre les mandats d’arrêt. Il avait invité dans la foulée son homologue israélien à défier la CPI en se rendant en Hongrie.

Alors que l’avion de Benyamin Netanyahou s’est posé à Budapest mercredi, le gouvernement hongrois n’a pas tardé à encore surenchérir. Jeudi, Gergely Gulyas, ministre du cabinet du premier ministre, a annoncé que la Hongrie se retirait de la Cour pénale internationale. La CPI était « une initiative respectable » avant de devenir ces dernières années un « organe politique. L’inculpation du premier ministre israélien en est le plus triste exemple », a-t-il justifié. Une décision logique puisque Budapest rejoint ainsi au rang des non-signataires Israël, les États-Unis et la Russie, autrement dit ses principaux alliés.

«Merci, @PM_ViktorOrban et merci à la Hongrie pour sa position morale claire et forte aux côtés d’Israël et des principes de justice et de souveraineté ! », s’est empressé de réagir Gideon Saar, le ministre des Affaires étrangères de l’État hébreu, tandis que son patron débutait sa visite sur le sol de l’Union européenne. Benyamin Netanyahou ne repartira que dimanche matin, après avoir observé le shabbat de vendredi à samedi, comme il en a l’habitude. Selon une source gouvernementale citée par The Times of Israel, l’objectif de cette visite en Hongrie et d’évoquer avec son plus indéfectible allié européen le plan de Donald Trump de réaliser le nettoyage ethnique de la bande de Gaza pour en faire une « Riviera ». Budapest pourrait donc être pour le dirigeant israélien la première étape d’une campagne de ralliement de soutiens internationaux.
Pour Maya Sion, professeur à l’Université hébraïque de Jérusalem et directrice du programme Israël-Europe à l’Institut Mitvim, cette visite revient à « mettre le doigt dans l’œil » de l’Union européenne. Il s’agit avant tout pour le dirigeant israélien de « montrer qu’il peut venir en Europe sans se faire arrêter, et se présenter comme un grand dirigeant auprès de ses partisans – tout en suscitant la colère de la plupart des Israéliens ».

Liens solides et anciens

Longtemps passés sous le radar, les liens entre Viktor Orban et Benyamin Netanyahou, et entre les droites hongroise et israélienne, sont solides et anciens. Illustration de la proximité idéologique entre ces deux dirigeants aux trajectoires presque parfaitement parallèles : c’est un conseiller politique de M. Netanyahou, Arthur Finkelstein, qui avait soufflé l’idée au dirigeant magyar de faire du milliardaire américano-hongrois George Soros sa bête noire et l’ennemi public numéro un. L’ambassadeur israélien en Hongrie avait dénoncé une campagne d’affichage public antisémite contre Soros, qui battait son plein lors de la dernière visite du premier ministre israélien à l’été 2017.

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L’universitaire Maya Sion liste également d’autres motivations possibles : réfléchir à de nouvelles manœuvres contre la démocratie libérale israélienne ; ou encore s’éviter une nouvelle journée de procès et une nouvelle journée de pression populaire pour la libération des cinquante-neuf otages restants dans la bande de Gaza. Deux d’entre eux sont hongrois, mais Budapest n’a pas fait publiquement pression sur le gouvernement israélien pour leur libération.

Les autorités hongroises ne se sentent pas tenues d’arrêter Benyamin Netanyahou du fait que, si la Hongrie a signé en 1999 le statut de Rome et l’a ratifié deux ans plus tard, lors du premier mandat de Viktor Orban, elle n’a jamais promulgué la convention associée, pour des raisons de conformité avec sa Constitution. Viktor Orban avait avancé le même argument pour garantir l’impunité à Vladimir Poutine s’il venait en Hongrie malgré le mandat d’arrêt émis par la CPI à son encontre en 2023.

Programme tenu secret

Le programme du premier ministre israélien en Hongrie a été tenu secret. Il est imaginable qu’il se rende à la grande synagogue de la rue Dohany, la plus grande d’Europe. Ou dans un lieu de culte du judaïsme orthodoxe, minoritaire mais très prolifique en Hongrie depuis une décennie, sous la houlette d’une petite communauté loubavitch qui a les faveurs du gouvernement hongrois.
Mazsihisz, la principale organisation juive, représentant le judaïsme dit « néologue », plus libéral, avait fortement condamné la Cour pénale internationale, estimant que « si ceux qui ont agi pour défendre l’État juif contre les terroristes sont effectivement arrêtés, les ennemis du judaïsme et d’Israël concluront que le système juridique du monde occidental s’est rangé du côté des terroristes ».
Budapest, qui se veut « le meilleur rempart d’Israël en Europe », a sapé ces dernières années toute tentative de position diplomatique commune de l’Union européenne sur le conflit israélo-palestinien. En déroulant ainsi le tapis rouge à Benyamin Netanyahou, la Hongrie, qui n’a pas officiellement abandonné son soutien à une solution à deux États, se met à la remorque des États-Unis de Donald Trump, comme sur le dossier russo-ukrainien.

© Albert Kornél, depuis Budapest

Source: Le Figaro



https://www.lefigaro.fr/international/la-hongrie-d-orban-deroule-le-tapis-rouge

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3 Comments

  1. La Hongrie ne se met pas « à la remorque » de Donald Trump ni de personne d’autre. Elle est dirigée par le seul chef d’Etat lucide et courageux de l’UE, un ennemi de la peste brune islamiste, de la fange wokiste et des Nazis aux commandes en Europe de l’ouest. La Hongrie ressemble à ce que seraient nos pays de l’ouest s’ils n’avaient pas sombré dans l’innommable. Orban a tout mon respect : il faudrait qu’il quitte l’UE, à moins que cette dernière n’implose avant qu’il n’ait besoin de le faire. Ce deuxième scénario est de plus en plus probable.

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