Léon Ouaknine. Lorsqu’une Intelligence artificielle spécialisée examinera les patients

Au cours des ans au Québec, j’ai vu la pratique médicale changer.

Aujourd’hui, la plupart du temps, le médecin, tant homme que femme, n’ausculte pratiquement jamais, procède à très peu de palpations physiques (examen clinique) sur son patient. Il pose peu de questions vraiment investigatrices et prescrit médications et ou références après avoir lu les analyses de sang.

Je crois que les patients obtiendront un bien meilleur diagnostic et prescription lorsque ce sera une Intelligence artificielle spécialisée qui l’examinera selon des modalités à déterminer.

L’IA médicale sera toujours à la pointe des plus récentes connaissances et protocoles. Une infirmière clinicienne remplacera avantageusement le médecin généraliste.

Pendant quelques années le médecin assurera une supervision statutaire au titre de la sécurité un peu comme au début du chemin de fer, un homme à cheval précédait le train ou comme aujourd’hui les pilotes toujours dans la cabine de pilotage, alors que des systèmes informatiques peuvent assurer les pilotage, atterrissage et décollage, ne souffrant, eux, jamais de fatigue.

La dimension humaine de l’interaction entre le médecin et le patient si essentielle au bien-être sera assurée en bonne part par les compétences conversationnelles de l’IA.

Je suis convaincu que de telles IA existent déjà chez IBM et d’autres compagnies mais la mise en œuvre de ce système prendra du temps à cause des résistances tant des médecins que des patients.

Il est urgent qu’on mette en œuvre ce type de pratique parce que notre système de santé public, gratuit, universel et appliquant les « evidence-based » protocoles n’est plus ni gratuit, ni universel, ni public, faute d’accessibilité, ni même partout à la toute pointe des derniers progrès. Une immense partie de la population souffre de cette situation, cherchant désespérément un médecin disponible rapidement, et n’en trouvant pas se résout à attendre ou à bout de patience et dans l’urgence se tourne vers le privé. Un cercle vicieux s’engage, de nombreux médecins quittent le public pour le privé accélérant la déliquescence du système public.

Un système basé sur l’IA coûtera beaucoup moins cher à plus long terme et sera disponible 24h sur 24.

Pendant ce temps, les ministres essaient de résoudre la quadrature du cercle en usant du seul instrument qui leur donne l’illusion de faire quelque chose, des réformes bureaucratiques de structures, qui toujours accroissent la bureaucratie et n’avancent pas d’un iota dans la solution. Lors de mes trois décennies dans le réseau de la santé comme directeur général d’établissement et comme consultant, je ne me souviens pas d’un seul ministre qui n’ait procédé à une telle réforme des structures, faute de pouvoir agir sur la pratique médicale. Ce que fait un ministre, le suivant le défait et enclenche autre chose. Je prédis que l’actuelle Régie de la santé périra du même mal que les précédentes réformes.

© Léon Ouaknine

Léon Ouaknine est diplômé en administration publique et a une scolarité de doctorat en science politique. Après avoir dirigé des organisations de la communauté juive, Léon Ouaknine a œuvré dans les réseaux de la santé et des services sociaux comme directeur général de CSS, CLSC et Institut universitaire pendant 22 ans ; à ce titre, il a créé un important centre de recherche universitaire sur le vieillissement. Il a ensuite travaillé pendant 5 ans comme « principal » du consulting santé de la firme Ernst & Young pour la France. Parallèlement à ses activités de consultant en administration de la santé, il dirige le « Qualité en Santé » à la faculté de médecine de Kremlin-Bicêtre de l’Université Paris-Sud en France de 2000 à 2005. En 1994, il a obtenu le prix d’excellence en leadership et management de l’Association des Directeurs Généraux de Santé et de Services Sociaux du Québec.

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