Tribune Juive

« Répéter ce que dit le Hamas »: Lettre ouverte à la médiatrice de Radio France Par Karine Miermont

Dimanche 23 février 2025,

Chère Médiatrice de Radio France,

Je vous écris donc via le site qui permet de vous déposer un message, lequel site me demande de préciser l’antenne concernée (je coche France Inter) et le thème (je clique « Donner votre avis sur le traitement de l’actualité »). Je suis un auditeur très assidu de vos antennes (France Inter et France Culture), vos radios sont l’une de mes sources d’information, de culture et de savoir, avec la presse écrite, les livres, les réseaux sociaux. Je travaille chez moi et ainsi j’écoute le matin, le soir, et souvent même au milieu de la journée. Il m’arrive bien sûr de ne pas être d’accord avec le traitement de tel ou tel sujet, ce qui est normal et même fécond.

Cependant il arrive que cela soit problématique, que cela révèle peut-être des biais, sont-ce des automatismes, des réflexes de vocabulaire ou d’idéologie ? En tous les cas des choix de mots ou de silences qui pourraient nous faire constater que les journalistes ne savent pas ce qui se passe ou ce qu’ils disent ou bien ne veulent pas voir ce qui se passe et le dire … ? Ce vendredi 21 février 2025 ce fut stupeur pour moi d’entendre le journal de 19h s’ouvrir sur Israël sans que l’on me parle de l’une des informations principales et marquantes du jour : suite à la remise des corps de la famille Bibas par le Hamas, l’institut médico-légal avait constaté non seulement que le corps de la mère n’était pas celui remis, mais que les corps des deux enfants révélaient une mort non par un bombardement (ce qui était l’information que l’on m’a donnée durant des mois) mais par assassinat. Et sans souligner cette situation, qui, outre rappeler l’horreur dont sont capables les membres du Hamas, venait tout de même contredire la thèse du bombardement israélien, l’on nous expliqua que s’agissant du corps de la mère « le Hamas reconnaît une possible erreur », puis l’on entendit le témoignage de la belle-sœur de Shiri Bibas qui, dans l’après-midi, avait exprimé sa colère contre Israël et ses dirigeants dont c’était « la responsabilité de les ramener vivants (…) Il n’y a pas de pardon pour les avoir abandonnés le 7 octobre, et aucun pardon non plus pour les avoir abandonnés en captivité. » Certes.

Tout se passe comme si l’on donnait la même valeur à l’information émanant d’un pays qui est une démocratie, avec une presse libre, un institut médico-légal, et l’information émanant d’un groupe terroriste qui a massacré plus d’un millier de personnes, kidnappé pour tuer ou permettre une monnaie d’échange, groupe terroriste dont le programme est la haine des juifs et l’éradication de l’État d’Israël.

C’est le lendemain que cela semble s’éclairer : samedi 22 février le matin, lors de l’entretien entre Marion L’hour et Joann Sfar, j’entends la phrase de la journaliste : « Je ne fais que répéter ce que dit le Hamas » ! C’est donc bien cela : le Hamas dit, on répète, c’est une information comme une autre. Une source d’information comme une autre ? Merci Joann Sfar d’avoir dit : « Non, on n’est pas dans ce genre d’équivalence. On est dans un rapport médico-légal transmis à toutes les autorités internationales ». C’est à ce moment-là que la journaliste répond : « Je ne fais que répéter ce que dit le Hamas. » Merci Joann Sfar de répondre : « On répète trop ce que dit le Hamas. »

© Karine Miermont

Karine Miermont est écrivain

Quitter la version mobile