
Tout le monde commémore le 80ème anniversaire de la libération du camp d’extermination d’Auschwitz.
Y compris ceux qui dans le même temps accusent Israël de génocide.
Y compris ceux qui interdisent au Premier Ministre israélien de se rendre en Europe.
Y compris ceux qui acceptent que l’enseignement de la Shoah soit impossible dans certaines écoles.
Y compris ceux qui prônent le boycott culturel d’Israël.
Facile de verser quelques larmes sur 6 millions de juifs exterminés par les nazis pour, au mieux être indifférent au sort de la famille Bibas et aux viols des femmes israéliennes, au pire aller cracher sa haine pour des juifs qui ont le toupet de se défendre.
Le monde n’aime pas les juifs sûrs d’eux-mêmes, fiers et dominateurs.
Il les préfère victimes et enterrés.
…
Ces cérémonies grises ne m’ont pas ému.
Ce qui m’a ému c’est la photo de Fiszel, le père d’une amie avec qui j’ai vécu à Jérusalem, dans une belle maison avec un jardin qui embaumait le jasmin, du quartier de Givat Tsarfati.
C. m’a envoyé hier cette photo.
Fiszel libéré, il y a 80 ans de l’enfer d’Auschwitz.
Une photo sépia où il sourit un peu tristement.
Le même sourire que sa fille C.
C. est la joie de vivre incarnée mais parfois, passe sur son visage, ce sourire triste que je ne comprenais pas.
Jusqu’à hier.
Le sourire de Fiszel.
…
Il y a quelques mois, j’étais à Bruxelles, avec C.
Les rues de la capitale belge n’embaument pas le jasmin.
Nous devions nous rendre à la légendaire librairie de Marc Filipson, « Filigranes ».
Nous avons été pris dans une manifestation pro-palestinienne qui scandait : « Free Palestine ».
Une militante en keffieh nous a hurlé dessus : « Halte au génocide à Gaza ! »
C. l’a attrapée par un bout de son keffieh et l’a bousculée.
Ça a failli très mal se terminer pour nous deux.
Nous nous sommes vite engouffrés dans la librairie.
Marc F. nous a servi un café pour nous remettre de nos émotions.
J’ai engueulé C. :
T’es folle ! On a failli se faire lyncher !
C. m’a fait son sourire à la Fiszel.
« Ils ne me font pas peur Dani… »
…
Oui, ils ne nous font pas peur.
Et, je ne veux plus les voir à ces commémorations.
Dessin de TIM: Lorsque, au cours de la conférence de presse du 27 novembre 1967, le général de Gaulle parle des Juifs comme d’un « peuple d’élite, sûr de lui-même et dominateur », le dessin de Tim en réplique est refusé par L’Express, et passé en une par Le Monde, avec lequel c’est sa première collaboration. Ce dessin représente un déporté juif squelettique dans un camp de concentration, la main dans sa chemise à la façon de Napoléon, sous-titré « sûr de lui et dominateur ».
© Daniel Sarfati