Défendre Israël. Par Charles Rojzman

Depuis l’extermination des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale – la Shoah –, il est malvenu en Europe de s’afficher ouvertement antisémite. L’antiracisme, devenu une idéologie dominante, a intégré la persécution des Juifs dans sa définition du racisme, déterminant ainsi ce qu’il est permis ou non de dire et d’écrire.

Cependant, l’antisémitisme a toujours su se réinventer et s’adapter à l’air du temps. Tout en feignant de célébrer la mémoire des Juifs déportés et assassinés, il transfère ses préjugés et sa haine sur l’État d’Israël et ce qu’il qualifie de « politique israélienne » envers les Palestiniens. Ce glissement insidieux permet de relégitimer des discours hostiles en empruntant un nouveau masque, celui de la critique politique.

L’Antisémitisme et ses Métamorphoses

L’antisémite traditionnel a toujours affirmé qu’il ne haïssait pas les Juifs par gratuité mais que son rejet, allant jusqu’à la persécution, était une réponse « justifiée » à leur prétendu comportement nuisible. Au Moyen Âge, les Juifs étaient accusés d’être le peuple déicide, des usuriers ou encore les responsables de la peste noire. À l’ère moderne, ils étaient tour à tour perçus comme des capitalistes avares ou des bolcheviks fomentant des révolutions. Aujourd’hui, Israël est devenu la cible centrale de ces accusations : un État présenté comme colonisateur, pratiquant l’apartheid, voire le génocide, et tuant gratuitement des innocents, à l’instar des Juifs du Moyen Âge accusés de crimes rituels contre des enfants.

Ce n’est pas une politique gouvernementale israélienne particulière qui est visée, mais « la politique d’Israël » dans son essence, une essentialisation profondément antisémite. Dire « Israël » comme autrefois on disait « le Juif » traduit cette continuité idéologique. Ce que l’on reproche à Israël, c’est ce que l’on a toujours reproché aux Juifs : une supposée volonté de domination mondiale (les « Sages de Sion »), le meurtre d’innocents, et une hostilité à l’égard des non-Juifs. Les journaux nazis, tels que le Völkischer Beobachter, qualifiaient déjà les Juifs de peuple « génocidaire » (Völkermörder), un terme que certains n’hésitent pas aujourd’hui à appliquer à Israël.

Ainsi, dans ce cadre de haine systématique, tout est permis contre Israël. Ces « assassins d’un peuple désarmé » doivent être condamnés par tous les moyens, dans toutes les instances possibles. Les mesures prises par Israël pour sa sécurité, dans un environnement qui lui a imposé des guerres et des menaces depuis sa création, deviennent des preuves supposées de son « sectarisme » ou de son « militarisme ». Les check-points, les normes de sécurité strictes, les citoyens en armes et les actions de ses services secrets sont autant de prétextes pour accuser Israël d’être hostile et discriminant.

L’Oubli des Faits

Parler d’apartheid en Israël, c’est ignorer que 20 % de la population israélienne est arabe – musulmane et chrétienne – et jouit des mêmes droits que les autres citoyens. Cette cohabitation n’est pas parfaite, mais elle contraste fortement avec les régimes autoritaires qui entourent Israël, où les minorités, y compris juives, sont souvent persécutées ou ont été chassées.

L’antisionisme contemporain ne se contente pas de critiquer Israël ; il nie son droit à exister comme État juif souverain. Cette négation repose sur un narratif biaisé qui attribue au sionisme une origine coloniale, occultant que le sionisme était avant tout un mouvement de libération nationale, semblable à ceux du XIXe siècle. La véritable source du conflit israélo-arabe réside dans le refus persistant, notamment par l’idéologie islamiste, d’accepter l’existence d’un État non musulman sur une terre considérée comme appartenant à l’Oumma.

On passe sous silence les nombreuses tentatives de créer un État pour les Arabes de Palestine, la corruption endémique qui gangrène les territoires palestiniens, et l’instrumentalisation du peuple palestinien par ses propres dirigeants et par d’autres États arabes. L’injustice subie par les Palestiniens, réelle mais complexe, est instrumentalisée pour justifier une haine viscérale envers Israël, tout en évitant de s’interroger sur les responsabilités internes et régionales.

Israël, le « Juif des Nations »

Israël est un État démocratique, imparfait comme tous les autres. Il a ses tares et ses faiblesses, mais elles sont systématiquement amplifiées et utilisées pour le délégitimer, le diaboliser et, implicitement, justifier son effacement. Israël est ainsi devenu le « Juif des nations » : soumis au même deux poids deux mesures qui accabla autrefois les Juifs, condamné à choisir entre la soumission ou la persécution, menacé d’être relégué à une errance perpétuelle et à l’opprobre universelle.

L’injustice faite autrefois aux Arabes de Palestine, comparable à celle que les Juifs ont subie dans les pays arabes, ne peut pas justifier l’injustice permanente qu’est l’antisémitisme déguisé en antisionisme. Ce dernier n’est qu’une forme contemporaine et meurtrière de la haine ancestrale des Juifs.

Une Position Inébranlable

Je ne renoncerai jamais à défendre l’État d’Israël, quelle que soit la politique qu’il mène. Ce n’est pas par solidarité communautaire – il ne manque pas de Juifs, en Israël comme en Occident, qui nourrissent une haine démesurée envers cet État. Non, je prends parti pour Israël parce que ses failles, comparables à celles des démocraties occidentales, sont démesurément grossies pour justifier un projet implicite : son isolement, sa marginalisation et peut-être sa destruction.

J’ai mes désaccords avec certaines politiques israéliennes, tout comme j’en ai avec celles de mon propre gouvernement français. Mais face au « deux poids deux mesures » systématique qui accable Israël, je refuse de rester silencieux. Ce pays, qui lutte pour exister dans un monde hostile, est présenté comme le plus grand oppresseur de la planète, alors même que des dictatures bien plus brutales asservissent des peuples entiers dans l’indifférence ou la complicité générale.

Israël incarne aujourd’hui, pour les nations, ce que le Juif incarnait hier : une cible facile pour la haine et le rejet, victime d’un acharnement démesuré et irrationnel. Défendre Israël, ce n’est pas nier ses imperfections, mais reconnaître son droit inaliénable à exister et à se défendre.

© Charles Rojzman

Suivez-nous et partagez

RSS
Twitter
Visit Us
Follow Me

2 Comments

  1. Meme si vous n etes pas israelien , Israel reste et restera l unique patrie des juifs ou qu ils se trouvent .
    Il est inutile de revenir sur les derniers 15 mois qui ont vu la  » citoyenneté  » des juifs occidentaux de paris , bruxelles , londres ou san francisco se transformer en  » autorisation de residence limitée  » .
    La pression antijuive aujourdhui ouvertement appliquée par des gouvernements et des institutions etatiques scelerates en occident oblige chacun a se definir ou se redefinir , permettant ainsi a certains de retrouver leurs liens avec leur vrai peuple et a reveiller des sentiments nationaux authentiques .
    D autres nous ont abandonné a cette occasion et sombrent dans une assimilation destructrice , mais bien connue .
    Ce 7/10 et ses consequences sera a terme l amorce d un grand instant de verité sur la place que chacun souhaite occuper , et seule l alya apaisera les doutes indelebiles des juifs desormais poussés hors de ces societes decadentes .

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*