Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale doit être soumis à l’Assemblée nationale ce lundi 2 décembre à 15h. Sauf surprise, le Premier ministre, Michel Barnier, devrait engager la responsabilité de son gouvernement pour tenter de faire adopter le texte en ayant recours au 49.3. Au risque d’être censuré par le Nouveau Front populaire et le Rassemblement national. Tour d’horizon des scénarios possibles.
Le gouvernement de Michel Barnier passera-t-il la semaine ou… sera-t-il le premier gouvernement depuis celui de Georges Pompidou, en octobre 1962, à tomber à la suite d’une censure votée par l’Assemblée nationale ?
VERS LE 49.3 ET LA CENSURE ?
Sauf surprise, la mécanique du quitte ou double devrait s’enclencher ce lundi 2 décembre à 15h dans l’hémicycle du Palais-Bourbon. Selon le scénario le plus classique, celui auquel Michel Barnier semble avoir lui-même préparé les esprits ces dernières semaines, le Premier ministre devrait monter à la tribune pour annoncer le recours à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution pour faire adopter le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) dans la version qui a fait l’objet d’un compromis, la semaine dernière, en commission mixte paritaire (CMP).
Dans ce cas, deux motions de censure seraient déposées. L’une par le Nouveau Front populaire, l’autre par le Rassemblement national. Pour être votée et faire tomber le gouvernement, une telle motion doit être approuvée par la majorité absolue des membres composant l’Assemblée nationale. Et compte tenu des dernières déclarations en date, venues de Marine Le Pen et de ses troupes au Palais-Bourbon l’une de ces motions, celle du NFP, serait vraisemblablement votée, avec le renfort des voix du RN. Dans ce cas, le gouvernement tomberait. Et le budget de la Sécu serait rejeté.
LES AUTRES SCÉNARIOS : UN VOTE ET… UN REJET ?
D’autres scénarios sont cependant encore possibles. Au lieu d’engager la responsabilité de son gouvernement, Michel Barnier pourrait choisir de laisser les députés voter sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Si le 49.3 n’est pas déclenché d’emblée, à l’ouverture de la séance, une motion de rejet préalable déposée par le groupe Socialistessera examinée. Si elle était adoptée, le PLFSS dans la version de la CMP serait rejeté et le budget de la Sécurité sociale reprendrait sa navette entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Si la motion de rejet n’était pas adoptée, un vote aurait lieu sur le texte de la CMP. En cas de vote positif – ce qui semble impossible en l’état des intentions affichées par les oppositions, sauf arbitrages de dernière minute qui inciteraient finalement le Rassemblement national à s’abstenir – le projet de loi de financement de la Sécurité sociale serait validé. En cas de vote négatif, là encore, la navette entre les deux Chambres du Parlement reprendrait.
Ce scénario, qui implique d’accepter un rejet du compromis élaboré en commission mixte paritaire, permettrait au locataire de Matignon de montrer qu’il laisse l’Assemblée nationale délibérer jusqu’au bout. EIle permettrait aussi et surtout au gouvernement d’éviter le risque d’une motion de censure provoquée par le 49.3 et de gagner quelques jours pour d’ultimes négociations. Mais le temps est compté. S’agissant du PLFSS, l‘article47-1 de la Constitution prévoit en effet que « si le Parlement ne s’est pas prononcé dans un délai de cinquante jours, les dispositions du projet peuvent être mises en œuvre par ordonnance« . Or, ce délai s’éteindra ce jeudi 5 décembre à minuit.
PUIS, UNE APPLICATION PAR ORDONNANCE ?
Sauf accord politique improbable, la procédure législative – c’est-à-dire l’aller-retour prévu en nouvelle lecture à l’Assemblée et au Sénat, puis le dernier mot donné aux députés – aboutirait au dépassement de ce délai, ce qui permettrait à Michel Barnier de faire appliquer le projet de loi de financement de la Sécurité sociale par ordonnance. Ce qui serait totalement inédit.
Le budget de la Sécu pourrait donc être mis en œuvre, mais les opposition auraient néanmoins la possibilité de déposer une motion de censure spontanée contre le gouvernement, comme le permet l’article 49 alinéa 2 de la Constitution. Reste à savoir si dans ces conditions, une telle motion serait adoptée. Article 49.3, motion de censure, application par ordonnance… Après le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, les mêmes questions se poseront pour le projet de loi de finances, actuellement en cours d’examen au Sénat. Concernant le budget de l’Etat, le délai dont dispose le Parlement pour se prononcer s’éteindra le 21 décembre à minuit.
© Ludovic Fau
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