« Je trahirai demain ». Marianne Cohn. (1922-1944)

Je trahirai demain pas aujourd’hui.

Aujourd’hui, arrachez-moi les ongles,

Je ne trahirai pas.

Vous ne savez pas le bout de mon courage.

Moi je sais.

Vous êtes cinq mains dures avec des bagues.

Vous avez aux pieds des chaussures

Avec des clous.

Je trahirai demain, pas aujourd’hui,

Demain.

Il me faut la nuit pour me résoudre,

Il ne faut pas moins d’une nuit

Pour renier, pour abjurer, pour trahir.

Pour renier mes amis,

Pour abjurer le pain et le vin,

Pour trahir la vie,

Pour mourir.

Je trahirai demain, pas aujourd’hui.

La lime est sous le carreau,

La lime n’est pas pour le barreau,

La lime n’est pas pour le bourreau,

La lime est pour mon poignet.

Aujourd’hui je n’ai rien à dire,

Je trahirai demain.

1943

***

Marianne Cohn (1922-1944) – Pierre Seghers, La résistance et ses poètes : France, 1940-1945 (Seghers, 1974)

https://www.yadvashem.org/yv/fr/expositions/dernieres-lettres/1943-1944/marianne-cohn.asp

Merci à M.L.M.

Suivez-nous et partagez

RSS
Twitter
Visit Us
Follow Me

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*