Voici les deux premiers tomes d’une trilogie constituant la biographie de la famille Dubrule-Mamet, native de Lille et ses environs. L’auteur, Jean-Philippe Bozek, nous plonge au cœur d’aventures humaines et entrepreneuriales où chacun louvoie entre la félicité et les combats du quotidien.
Impossible de comprendre le destin d’un homme et de sa famille sans les replacer au préalable dans un contexte historique. Il est en effet essentiel d’avoir accès aux clefs permettant d’appréhender l’époque à laquelle ces gens-là vivaient, entendu que les soubresauts de la grande Histoire servent toujours de toile de fond aux protagonistes. Jean Philippe Bozek pose ainsi une loupe (bien entendu imaginaire) sur le monde d’hier afin de distinguer ce qui s’y passe au meilleur d’une compréhension confortable pour le lecteur.
Tome 1 : Les Aïeux (1800 – 1931)
18 brumaire, an VIII de la Première République française – correspondant au 9 novembre 1799. À l’heure où débute ce récit, nous voici donc à cheval entre les XVIIIe et XIXe siècle ; le premier s’achève sur l’odeur du sang encore frais d’une révolution sordide, là où le second engage un Bonaparte – devenu consul à vie – rétablissant l’ordre et la paix à l’intérieur du pays. Bientôt la création de la Banque de France… Puis celle du Première Empire… Et la naissance le 5 messidor (mardi 23 juin 1800) à trois heures du matin, du premier héros de notre histoire, un certain Jean-Baptiste Paulus Joseph Dubrule, point de départ de cette biographie chorale, avec pour sujet principal l’ascension et les turpitudes sociales d’une famille sur deux siècles, de la révolution industrielle à la libération des mœurs, en passant par les années sombres des deux guerres mondiales. Jean-Philippe Bozek signe une magistrale saga économique et humaine dans un monde tantôt essoufflé (la fin du XIXe )puis ragaillardi (la Belle Époque et les Années folles) ; ce sont autant de voyages et rencontres au fil des visages qui prennent corps sous les yeux d’un lecteur comblé par une profusion de détails passionnants.
Tome 2 : Guerre et Paix (1932 – 1950)
La deuxième partie commence à l’aube de la Seconde Guerre mondiale. Le lecteur est maintenant familier avec les personnages et les époques où sont plongées leurs racines avant d’en tirer le meilleur de la sève. Mais les premières décennie du XXe siècle, dont chacun envisageait le meilleur sans présager le pire, doivent faire face à l’invraisemblable d’un nouveau conflit que tout le monde prévoit redoutable puisqu’il sera « la plus violente déflagration que l’humanité ait connue. » Les temps de guerre… Le front de l’Est… La zone occupée… Le feu des alliés… La victoire puis la liberté… Il est ici avant tout question de Paul et Suzanne, dont les prénoms donnent son titre à la saga, et de leurs sept enfants, tous aujourd’hui encore vivants.
Bien que nous ayons affaire à une biographie familiale, le mot roman – pour la merveilleuse envolée qu’il représente – aurait pu se laisser imprimer sur la couverture des deux volumes ; si ce n’est que pas un des personnages ne relève de la pure invention. Les acteurs majeurs de cette histoire (et ils sont nombreux), ont tous véritablement existés ou existent encore ; ils ont été « créés » en amalgamant quantité de souvenirs dûment recherchés au cours d’une longue investigation familiale et historique. Chacun d’eux est l’indispensable abacule d’une mosaïque ici reconstruite en un portrait social issu d’une mémoire collective recouvrée en une seule.
Esprit de famille
Chez Paul et Suzanne , la réalité quotidienne dépasse toujours – et de loin ! – la fiction romanesque ; c’est bel et bien de cela dont il est avant tout question dans ce texte : Jean-Philippe Bozek n’a rien inventé, il est même à supposer que ce qu’il raconte reste en-deçà de la vérité, car toute vie est intrinsèquement incohérente et désordonnée, en faire un livre revient à la minimiser pour qu’elle n’apparaisse pas invraisemblable et moi encore rocambolesque. C’est ensuite aux lecteurs d’ajuster en « lisant » entre les lignes ; ils sont à ce titre aidés par une remarquable iconographie : plus de deux cents photos et illustrations facilitent la projection (au sens propre) dans l’histoire. Alors ! Faut-il lire Paul et Suzanne ? Oui… Oui… Et oui… Trois fois oui…
… pour toutes les raison évoquées plus-avant, mais aussi parce que le texte est remarquablement écrit d’une plume académique ; elle se prête ô combien ! à la trame de l’histoire et correspond aux époques traversées. En outre, le conformisme d’un style aide à s’éloigner de la morale sociale et politique des sagas traditionnelles trop souvent asphyxiantes. Enfin, Paul et Suzanne rappelle que la filiation est avant tout une notion de sentiments plutôt que de gènes ; Jean-Philippe Bozek raconte bien entendu l’intimité d’une famille d’industriels et la mise en lumière des ressources qui ont contribué à leur prospérité, il n’oublie cependant pas la sensibilité des pères, des mères, ni celle des enfants grâce à laquelle s’agglomère l’esprit de famille dans lequel tout le monde aime à se projeter. En un mot : formidable !
Paul et Suzanne
Histoire de le Famille Dubrule-Mamet (en deux tomes)
Un livre de Jean-Philippe Bozek
Éditions Place des Entrepreneurs
Environ 250 pages (x 2) – Nombreuses illustrations N&B et couleur – 25,00 € le tome
Jérôme Enez-Vriad
© Juillet 2024 – Tribune Juive & J.E.-V. Publishing
Siempre son amenas e interesantes estas historias de sagas familiares desarrolladas en su contexto histórico y más cuando se trata de personajes reales que podemos conocer a través de las ilustraciones y fotografías! Gracias por esta recomendación de lectura veraniega, Jérôme Enez-Vriad…