Mélenchon rêve d’un 3ème tour dans la rue. Par Richard Prasquier

La dissolution de l’Assemblée Nationale devait clarifier la situation politique française. On admettra qu’elle n’y est pas parvenue. 

Au cours de cette même semaine, c’est la Grande Bretagne qui voit son horizon éclairci après la large victoire d’un social-démocrate, Keir Starmer.

C’est l’homme qui a purgé le Parti Travailliste de l’influence néfaste de Jeremy Corbyn, largement accusé d’antisémitisme. Ce dernier avait un défenseur français. Il  s’appelait Jean Luc Melenchon et il a attribué  aux réseaux sionistes la défaite de Corbyn à qui il  a reproché de s’être excusé devant des accusations d’antisémitisme qu’il a qualifiées de  grossières. Lui, jamais il ne céderait devant les “ukases arrogantes du Crif”. C’était en 2019 et Mélenchon avait révélé son antisémitisme, son obsession du Crif et une de ses règles d’or: “ne jamais s’excuser”.

 Je croyais savoir ce dont Jean Luc Mélenchon état capable, mais je dois avouer que le  7 juillet il m’a estomaqué. Dès l’annonce des premiers résultats, il prend de vitesse toute la classe politique et prononce Place de Stalingrad, ce nom a un sens, un discours aussi éloquent que mensonger devant un large échantillon de ses militants, sélectionné au préalable  pour représenter la France dans sa diversité. 

La gauche avait  gagné; on aurait dit qu’un immense élan populaire avait porté son parti. Il était prêt à  prendre les rênes du gouvernement  pour répondre à l’attente “unanime” des Français et à réaliser au plus vite le programme du Nouveau Front Populaire, “Rien que le programme, mais tout le programme”.

Il terminait sur les phrases d’une vieille chanson protestataire de Jean Ferrat, chantant entre autres les genêts de Bretagne et les bruyères de l’Ardèche. Aujourd’hui c’est vers le RN que se tournent les habitants de ces terroirs qui fleurent si bon la France profonde. Qu’en aurait dit Ferrat, alias Jean Tenenbaum, dont le père avait été assassiné à Auschwitz?

 Mélenchon veut imposer l’idée que c’est au chef du parti le plus nombreux à l’intérieur d’une coalition qui a obtenu le plus de voix aux élections de  former le gouvernement et que toute autre décision serait une forfaiture.

 Ce  message, répété ad nauseam par ses lieutenants, est triplement faux. D’abord, la gauche n’a pas gagné, elle n’est que la composante la plus nombreuse, de peu, d’une tripolarisation inextricable de l’électorat. Ensuite, LFI, contrairement à l’Assemblée précédente, risque d’avoir moins de députés qu’un Parti Socialiste requinqué, car comme Alexis Corbière, des élus qui ont  affronté la colère d’un Mélenchon qu’ils avaient osé  critiquer ont dû changer d’étiquette, et enfin parce que le Président est libre de choisir qui il veut  quand il le veut et qu’il ne se privera pas de le faire. 

Et puis, Mélenchon est l’homme politique le plus détesté de France. Il sait qu’il ne sera pas nommé. Ce qui lui importe, c’est d’attiser le ressentiment de ses militants en dénonçant les manigances probables  de ses incertains alliés du NFP et de mettre en exergue les candidats LFI qui se sont désistés au nom du front Républicain et qui, en se sacrifiant, ont sauvé des adversaires tels Elisabeth Borne ou Gérald Darmanin. 

 La surprise du second tour a été l’efficacité du thème du Front Républicain contre le Rassemblement National. Ce vote a été la bouée de sauvetage du parti présidentiel, mais c’est aussi grâce à lui aussi que le Nouveau Front Populaire est devenu le plus important bloc de députés de la nouvelle Assemblée Nationale, que des candidats LFI aussi antiisraéliens tels Ercilia Soudais et Raphael Arnault ont été élus, et que Philippe Poutou, du NPA, qui n’a jamais caché son admiration pour le Hamas, a doublé son score du premier tour. L’outrance dans la haine d’Israël n’a pas empêché les reports de voix et tout indique que l’antisémitisme reste trop souvent considéré comme une affaire qui n’implique que le monde juif.

En revanche, il n’y a pas  eu un seul candidat RN qui n’ait été élu au second tour s’il n’était pas déjà en tête au premier. Donc des reports faibles qui témoignent que le rejet du RN reste massif. Il semble par ailleurs que les électeurs  du RN lui sont restés fidèles au second tour malgré l’évidente impréparation technique de certains candidats et la révélation de l’antisémitisme et du  racisme  de quelques autres. Pour ne citer qu’un exemple, le député sortant, maurrasien, raciste et antisémite assumé,  Frédéric Boccaletti, a été réélu dans le Var malgré de nombreux signalements à son encontre.

Elle est loin, la promesse de Bardella que le RN aurait la majorité absolue, mais on aurait grand tort d’oublier qu’au premier tour, il  est arrivé en tête dans 55%  des circonscriptions de France métropolitaine. Avec le système électoral  majoritaire à un seul tour qui est celui des Britanniques, il aurait obtenu plus de 300 députés à l’Assemblée Nationale, et on aurait parlé de raz-de-marée électoral. Nul doute que l’impression d’une élection volée alimente chez ses électeurs un ressentiment qui risque de se nourrir encore de l’échec, malheureusement probable, d’une introuvable coalition gouvernementale centro -gauchiste. Cet échec peut le porter  au pouvoir en 2025 lors d’une possible (probable?) nouvelle dissolution, ou en 2027, lors de l’élection présidentielle.

Sur le papier, en additionnant les députés “Ensemble” aux “Républicains”, aux “divers droite” et aux membres du “Nouveau Front Populaire” sans “LFI”, on obtient 320 députés. Mais beaucoup refusent d’entrer dans une coalition aussi baroque, dans une France où l’image de la 4e République agit comme un repoussoir. Il faudrait une pratique du compromis dont la France n’a pas l’habitude et une habileté dans le maniement des hommes qui n’est pas le point fort d’Emmanuel Macron . Mélenchon en sera exclu et on l’entend par avance vitupérer les traitres qui y seraient entrés après avoir signé le programme du “Nouveau Front populaire”.

En lisant ce programme, j’ai pensé au Vénézuéla, un pays que je connais un peu. 

Jean Luc Mélenchon, dont on connait  la passion pour Hugo Chavez à qui il a emprunté  la flamboyance de son style oratoire aussi bien que l’inanité de ses idées économiques, risquerait de transformer la France en un Vénézuéla sans pétrole. Il pallierait ce manque d’une touche d’islamisme qu’on appellerait liberté d’expression. 

Il prend  pour modèle un pays dont 20%  de la population, dont les plus éduqués, a fui. Ils envoient à leurs parents restés  des subsides qui leur permettent de survivre et qui sont devenus indispensables à l’économie du pays. L’essence vénézuélienne est en grande partie d’origine iranienne, car les raffineries fonctionnent mal. La production de brut s’est effondrée, car la préservation des techniques d’extraction du pétrole lourd qui faisait du Vénézuéla un des plus grands producteurs mondiaux a été négligée. Le pays se maintient par un régime policier, et par l’épuisement de la population. La propagande gouvernementale attribue toutes les difficultés à l’impérialisme, dont la propagande répète que le sionisme est un de ses pires avatars, mais cette auto-victimisation, bien classique, ne convainc que les convaincus.

C’est pour un avenir catastrophique que Mélenchon manipule par le verbe des militants jeunes, sa force de frappe par laquelle il essaie de faire pression sur ses partenaires du NFP. Certains rêvent déjà d’un troisième tour dans la rue. 

Ce n’est pas seulement à cause de son antisémitisme qu’il faut s’opposer au “Lider Maximo”.

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