On n’a jamais autant parlé des Juifs en France qu’en cette veille d’élections législatives. Il s’agit aujourd’hui de choisir la forme de société que nous souhaitons installer dans notre pays. Une décision majeure au cœur de laquelle le Juif s’invite tout naturellement, explique Marek Halter.
On ne juge pas seulement une société sur sa politique économique ou ses orientations en matière de politique étrangère, mais sur la relation entre ses citoyens, et la somme des libertés mises à leur disposition. « Les juifs, disait Goethe, sont le thermomètre du degré d’humanité de l’humanité ». Et, sur ce plan, notre société est bien malade.
Si, ici ou là, on parle de répartition des richesses, du climat, où si l’on se divise à propos de Gaza et de l’Ukraine, personne n’évoque par exemple le rapport aux minorités pourtant essentielles à la survie de la démocratie, selon Camus[1].
Les manifestations qui se succèdent donnent l’impression que le peuple s’est déjà exprimé. Qu’il a fait son choix. Cela vaut pour les individus qui réfléchissent avant de mettre leur bulletin de vote dans l’urne. Ceux qui, en revanche, cèdent à la propagande et à la voix d’un chef qui parle plus fort que les autres, composent, selon Hannah Arendt, non pas le peuple, mais la « populace ». Ceux-là mêmes pour qui « les Juifs servirent d’illustration à tout ce qu’[ils] détestai[ent] »[2], d’autant plus quand un État ou des hommes politiques que la « populace »rejette les protègent.
Dans ces conditions, on ne s’étonnera pas que les Juifs de France ne sachent plus à quel « saint se vouer ». Doivent-ils soutenir la gauche, aujourd’hui gangrénée par des noyaux antisémites, que l’on nomme pudiquement « antisionistes », ou la droite, non encore débarrassée de l’ancien antisémitisme, celui des anti-dreyfusards, ou d’un Déroulède en faveur d’une « République plébiscitaire » ? Qui de ces deux bords est ami des Juifs ?
En vérité, aucun ne s’est adressé à cette communauté installée en France depuis l’époque romaine et qui est devenue ces temps-ci victime de toutes les haines. Personne, pas même le Président de la République, ne leur a dit, à l’instar du pape Jean-Paul II le 22 octobre 1978, face aux millions de jeunes catholiques rassemblés place Saint-Pierre à Rome : « N’ayez pas peur ! »
Quand les Juifs de France, qui n’ont oublié ni les autodafés de l’Inquisition, ni le procès Dreyfus, ni le Vel d’Hiv et la déportation, voient une fillette de douze ans insultée et violée par des « nazillons » à peine plus âgés qu’elle parce que juive, ils prennent peur. Et, nous le savons, la peur est mauvaise conseillère. D’où les positions surprenantes en faveur de l’extrême droite d’un Serge Klarsfeld, d’un Elie Chouraqui, d’un Raphaël Enthoven, ou même d’un Alain Finkielkraut, parmi les plus médiatisés. Ont-ils oublié que, dans l’esprit de nombreux électeurs du Rassemblement National, ils ne sont toujours qu’« un détail » ?
D’où aussi l’illusion d’un Raphaël Glucksmann ou d’un François Hollande qui, par leur alliance à ceux qui acceptent de substituer le drapeau du Hamas à notre drapeau tricolore, pourrait peser sur la politique de leur camp. Ont-ils oublié que Mussolini fut d’abord socialiste ? Oui, les Juifs ont peur. Car la victoire de l’un de ces extrêmes mettra en péril la démocratie seule en mesure de défendre les minorités et d’assurer la liberté de tous.
Réveillons-nous ! Le monde nous regarde ! Contrairement à ce qu’on nous dit, les blocs de gauche et de droite ne sont pas majoritaires dans notre pays. Conscients, comme Shakespeare, que jamais un loup ne protègera les agneaux, ils sont des millions à rêver d’une République où l’empathie, la sagesse et la justice règnent.
Que cette majorité, à laquelle personne ne s’adresse, descende dans la rue lors d’un immense rassemblement pour la démocratie, que sa clameur secoue les politiques ! Que son vote se porte principalement sur des candidats qui s’engageraient à combattre l’antisémitisme et le racisme ! Que les journalistes, chaque fois qu’ils reçoivent des candidats à l’élection, leur posent cette question clairement. Leur réponse pèsera dans le choix de ceux pour qui la devise républicaine, « Liberté, égalité, fraternité », a encore un sens.
© Marek Halter
Source: JDD
https://www.lejdd.fr/societe/legislatives-202
[1] « La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité. » (Carnets, III)
[2] Sur l’antisémitisme, p. 235
» Que son vote se porte principalement sur des candidats qui s’engageraient à combattre l’antisémitisme et le racisme ! »
Tous les candidats s’ engagent à ça, est d’ accord là dessus.
C’ est la méthode qui différe.
Pour le racisme à l’ encontre des arabo-musulmans, dont une des sources est la voyoucratie à laquelle s’ adonne une frange de cette communauté, je propose la construction de prisons, une telle politique permettrait peut-être aussi par la même occasion de faire baisser la tension anti-juive.
La question est : quelle méthode pour combattre le racisme et l’ antisémitisme ? Là plus personne ne sera d’ accord.
@Joseph1 Le « racisme à l’encontre des Arabo-musulmans » relève plus du fantasme que d’une réalité. Le « racisme à l’encontre des Arabo-musulmans » est au racisme existant chez les Arabo-musulmans et les « racisés » ce qu’un vol de bicyclette est à un viol de masse ou un massacre…