Gérard Kleczewski. La Tribune d’Arie Halimi et Vincent Lemire ou l’hémiphlégie de la conscience

J’ai lu comme beaucoup d’autres la tribune d’Arié Alimi et Vincent Lemire dans “Le Monde”. Et comme beaucoup j’ai été peiné mais pas choqué par leur prise de position pointant du doigt l’antisémitisme ontologique de la droite extrême et “bémolisant” celle du rassemblement à gauche…

Pas choqué parce que je connaissais le biais idéologique permanent de cet avocat et de cet historien, le second avançant toutefois plus masqué que le premier – nonobstant ses passages récurrents sur Israël, aux côtés notamment de Rima Hassan, bien avant le 7 octobre dans l’émission “C ce soir” qui m’avaient fait percevoir avec acuité à qui nous avions à faire…

Alors triste mais pas choqué, j’admets cependant ma colère de voir justifier un éventuel vote pour le NFP par le danger ultime que représenterait le vote RN, tandis que celui pour une coalition de circonstance, pilotée par LFI, ne le serait pas. 

Motif avancé et très maladroitement défendu:  l’antisémitisme historique du FN devenu RN serait plus ancré et dangereux, tandis que celui de LFI et du NPA serait moins évident et inodore. En quelque sorte résiduel, dirait l’autre, pour ces victimes d’anosmie…

Je peux être triste aussi, mais pas plus choqué par la prise de position de Serge Klarsfeld et de son clan, comme je l’avais été précédemment par celles de son rejeton sur l’Ukraine. Ils ne me viendrait cependant pas à l’idée d’imaginer Serge Klarsfeld jouant contre son camp et ceux qu’il a toujours défendu, parfois au péril de sa vie. 

Oui, la vieillesse peut être invoquée pour expliquer en partie cette paresse intellectuelle venue, qui le fait dériver de ses principes éthiques historiques.

Une vieillesse qui ne peut être invoquée en revanche pour “bémoliser” la tribune des “jeunes” Alimi et Lemire,  – dont la BD sur Jérusalem se vend comme des petits pains soit dit en passant, quand bien même elle comporte de terribles approximations et contre-sens pour quelqu’un presenté massivement comme un historien de talent…

Alors répondons sur le fond: 

Peut-on vraiment faire le distinguo entre deux formes de haine des Juifs et de leur seul Etat disponible dans le monde ? Cela me paraît non seulement impossible, mais hautement dangereux. 

On ne peut pas transiger avec la haine des Juifs d’où qu’elle provienne. On ne peut pas la minorer quelle que soit la “bonne cause” que l’on prétend défendre. De même qu’on ne peut pas accepter peu ou prou le racisme anti-musulman ou toute autre forme de racisme et de xénophobie, la haine des homosexuels, et d’autres encore.

La haine est une et indivisible, elle ne se dissout pas au regard d’une cause ou d’un combat que l’on prétend éthique et raisonnable.

Tous ces sujets et toutes ces haines traversent pourtant la population et tous les courants politiques, de gauche comme de droite, et même du centre… 

Et d’où que vient la haine, elle est toujours détestable !

Cette hémiplégie de la conscience de cet historien et de cet avocat témoigne selon moi d’un sectarisme primaire et d’une absence de réflexion profonde sur les racines du mal antisémite qui n’a jamais autant flambé que depuis octobre, au seul motif qu’il “faut faire barrage au RN”. 

Un aveuglement de circonstance qui aurait dû faire penser, au moins à l’historien des deux, à une autre cécité française survenue il y a un siècle, quand Blum, dont les membres du NFP prétendent être les héritiers, était détesté et brocardé pour ses origines, y compris par un certain François Mitterrand, alors étudiant, manifestant bruyamment dans Paris contre “les métèques”…

Accepter n’importe quoi, n’importe qui, n’importe comment n’est pas dans nos moyens dirait l’autre !

Et il ajouterait : “faites mieux !”

© Gérard Kleczewski
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