Dans une tribune parue il y a une quinzaine de jours, j’ai évoqué la haine antisémite qui se répand dans notre espace public. Je prévoyais les agressions, de plus en plus fréquentes, contre les Juifs en France, ainsi que les incendies de leurs lieux de culte. C’est fait.
Je viens de me rendre à la synagogue de Rouen, incendiée par un fanatique musulman. Dévastation. Tristesse. Et surtout une forte odeur de brûlé. J’ai les narines pleines de roussi. Comme jadis enfant à Varsovie, lorsque j’ai visité la synagogue de mon grand-père Abraham incendiée par les nazis.
L’assaillant a été abattu par un policier. Certes. Mais d’autres attendent, tapis dans l’ombre. La haine que nous portons en nous, les « pulsions de mort » disait Freud, ont besoin d’une cible. Il suffit qu’un média ou un groupe politique la désigne pour que la haine se déverse sur elle. L’objet de notre haine change fréquemment de visage : les Noirs, les homosexuels, les femmes, les immigrés, les Arabes… et toujours les Juifs. Car le Juif reste « le thermomètre du degré de l’humanité de l’humanité », disait Goethe.
Il a suffi que les étudiants de Sciences Po occupent leurs amphithéâtres pour manifester leur solidarité avec le Hamas, interdisant l’accès de l’école aux étudiants juifs, pour que ces derniers deviennent l’objet de la vindicte populaire. En étant juifs ne sont-ils pas coupables de ce qui se passe aussi bien à Gaza qu’en Ukraine ? Et voilà qu’à Marseille la stèle à la mémoire de l’ancien Premier ministre Pierre Mendès-France, pourtant à l’origine de l’indépendance de la Tunisie, est taguée parce que juif. Comme avant lui le portrait de Simone Veil à Paris.
En huant la chanteuse israélienne Eden Golan lors de sa magnifique performance à l’Eurovision, ce n’est pas Israël en guerre avec le Hamas que l’on huait, mais les Juifs. L’aurait-on fait avec Joan Baez lorsque le gouvernement américain déversait des tonnes de bombes sur le Vietnam ? À l’époque, on savait encore distinguer le peuple de la politique d’un gouvernement. Or des centaines de milliers d’Israéliens manifestent depuis des semaines contre la guerre à Gaza, pour la libération des otages et pour la paix avec les Palestiniens. Et de cela, personne ne parle.
La haine du Juif couvrirait-elle les pleurs des familles israéliennes qui reçoivent les cadavres de leurs proches enlevés par le Hamas et retrouvés dans les tunnels de Gaza ? Non, je n’oublie pas les pleurs des enfants palestiniens. Mais voilà, les larmes des uns n’ont pas le même poids que les larmes des autres. Et le mot « paix », que nous étions quelques-uns à défendre lors des nombreux conflits qui ont ravagé le monde depuis la Deuxième Guerre mondiale, s’effrite avec le temps, devient inaudible.
J’ai envie de crier « Réveillez-vous ! », comme l’abbé Pierre autrefois. « Il est encore temps ! » Car il n’y a aucune chance de voir disparaître le racisme ou surgir une solution au conflit israélo-palestinien dans le flot de haine qui coule dans les caniveaux le long de nos trottoirs. Se bagarrer entre Français juifs et Français musulmans ne sert personne, et encore moins Israël ou la Palestine.
Oui, je suis en colère. Comment ne le serais-je quand je vois sur YouTube un énergumène annoncer une première liste de « sionistes » à boycotter aujourd’hui en France ! La liste est longue. Les noms et les visages défilent. Et je réalise qu’ils sont tous Juifs. Comme à l’époque des journaux Je suis partout en France ou Der Stürmer en Allemagne, où les listes des Juifs à abattre circulaient. Les bûchers ont besoin d’être nourris, entretenus, et on fait, comme on dit, « feu de tout bois ». Il est vrai que les images qui nous viennent de Gaza sont facilement utilisables, et certains hommes politiques français ne s’en privent pas. On ne peut s’empêcher de penser à la manière dont l’extrême gauche de l’Allemagne des années 1930 a façonné, sans s’en rendre compte, le nid de l’extrême droite. Rappelons à ceux qui l’ignorent que Mussolini, en Italie, était à ses débuts socialiste.
À Rouen, devant la synagogue incendiée, avec mes amis l’imam Hassen Chalghoumi et le Grand Rabbin Moché Lewin, ainsi que quelques responsables d’associations de jeunes et la présidente de la communauté juive – dont l’histoire, dans cette ville, commence au XIIIe siècle, et qui a su reconstruire sa synagogue après-guerre –, nous étions à nous demander si la France, ce pays que nous aimons, ne commence pas à sentir le roussi.
© Marek Halter
Militant de la paix et écrivain, Défenseur du dialogue interreligieux, Marek Halter est, en 2017, l’un des organisateurs de la Marche des musulmans contre le terrorisme.
Marek Halter, qui a publié une vingtaine de livres, romans et essais et collabore à une douzaine de journaux et magazines à travers le monde, vient de publier “Dans tes yeux. Un amour dans le ghetto”, chez X0 Éditions. TJ en fera la recension très prochainement.
Merci à Marek Halter pour cette noble tribune
hélas, je pense que vous avez raison
partir mais pour aller où?
Vous faites référence à l’abbé Pierre qui est connu pour son antijudaïsme virulent
j’aurais préféré d’autres références.
Marek Holter , connais pas 😉
Passez donc le bonjour à un certain Arnaud Montebourg, l’un de vos amis, comme les ”activistes” ” palestiniens” dont vous ventiez d’être l’ami sur le banc de la fac. La crédulité c’est terminé. Cette coterie petite bourgeoise qui use et abuse du prestige du peuple juif devrait arrêter de se mettre en avant et imiter la carpe.
Mais où sont vos amis arabes et votre grande amie Leila Shaid
Vous mangez à tous les râteliers
Vous êtes un opportuniste Infréquentable tellement vous êtes une girouette
Vous me faites rappeler aux juifs qui ont été nocifs en essayant de nous faire croire que les arabes veulent la paix pendant des années
En fait vous avez joué les idiots utile et mis votre talent d’écrivain pour défendre l’indéfendable c’est à dire nos ennemis arabes
Vous avez pactisé avec le diable et tout cela pour votre ego et votre intérêt
Si vos livres sont intéressants et bien écrits l’homme juif que vous êtes à trahi en s’égarant par ses amitiés arabes comme d’autres juifs type Rouleau du Monde des années 60-70 et bien d’autres juifs opportunistes du même journal
En vérité je n’ai jamais lu le moindre de vos livres et votre talent aurait dû servir d’abord à la cause d’israël et à sa défense comme l’ont fait les véritables juifs sionistes
donc un bonn juif doit détester les arabes ?