Le vivrensemble a besoin de l’altérité
Marx disait qu’il aurait refusé d’appartenir à un club qui l’aurait accepté comme membre. Il s’agit du Marx philosophe, Groucho, pas de son homonyme révolutionnaire, le Karl membre du club des dictateurs capitaux.
Ce seul aphorisme mesure la distance philosophique entre Groucho et Karl : à New York, dans les années 1920, le Ku Klux Klan revendiquait trois millions d’adhérents. Les Juifs faisaient partie de leurs victimes. Il était donc inenvisageable que les seconds fréquentent des clubs prestigieux, dont les premiers étaient membres.
En prenant l’initiative de rejeter les institutions sectaires, le plus jeune des quatre frères Marx a donné aux racistes une bonne leçon, et au monde une magistrale démonstration d’humour juif.
Sur le fond, la déclaration était signée Julius Henry Marx. Seule la forme relevait de son alias Groucho (Grincheux).
Un club est fait pour réunir les semblables épars, dans un endroit où ils se reconnaissent tous comme tels. Le racisme antijuif est si particulier qu’il a fallu créer un nom pour le définir. « Un mot vaut beaucoup moins par son étymologie que par l’usage qui en est fait », remarquait Marc Bloch, historien, auteur de L’Étrange Défaite (celle de 1940, bien que son analyse soit toujours pertinente pour la France de 2024).
Ce nom, en version originale, est « Antisemitismus ». Son auteur était un journaliste allemand, Wilhelm Marr, qui souhaitait vernir l’aversion contre les Juifs d’une connotation scientifique.
Il n’y a jamais eu d’ambiguïté sur le fait que cette haine particulière visait exclusivement les Juifs et non « tous les sémites », une catégorie réservée à la linguistique et qui concerne certaines langues et leurs locuteurs : par ordre alphabétique, amharique, arabe, araméen, assyrien, hébreu, lesabéen.
1933 : le bruit des bottes. 1942 : le silence des pantoufles. 2023 : la clameur des Nike
La précision sémantique sur le mot qui définit la haine du Juif est importante, car l’antisémitisme actuel est porté par des inconditionnels de l’islam, pratiquants ou idiots utiles, qui prient et injurient les Juifs dans une langue qui fait partie du groupe sémitique.
L’antisémitisme du XXe siècle était indexé sur la frustration née de l’incapacité à reconnaître les Undermensch, ces sous-hommes, ces Autres que rien ne distinguait des semblables à l’œil nu : « Le Juif représente cet autre, celui que je ne suis pas… Avec cette idée qu’il usurperait une place qui aurait dû être la mienne.[1] » Celui du XXIe s’appuie sur la certitude que le Juif est blanc-car-oppresseur, y compris quand il est noir ou brun (syn : « basané »), comme la majorité de la population d’Israël, originaire d’Éthiopie, du Mashrek ou du Maghreb.
Après le pogrome du 7 octobre 2023, les huit milliards d’humains se sont scindés en deux camps : ceux qui avaient de l’empathie pour les victimes et ceux qui savouraient leur souffrance.
Les palestinolâtres occidentaux ont trouvé dans le Hamas un alter ego qui leur a permis de jouir de leurs pulsions sadiques par procuration… et sans risque de représailles. Au contraire même, le keffieh leur donne un petit air de baroudeur moyen-oriental presque aussi séduisant pour les filles que l’inventeur des camps de concentration sud-américains, Che Guevara, l’a été pour leurs mères[2].
Sous-estimer la dimension du plaisir antisémite, c’est commettre une grave erreur. C’est son plaisir qui rend l’antisémite imperméable au raisonnement et au réel. Il est comme un alcoolique : il sait que sa boisson est mauvaise pour sa santé, et qu’elle lui sera fatale, mais il n’en succombe pas moins au désir. L’antisémite sait que sa haine est répréhensible, mais il ne peut s’empêcher de céder à son attrait.
Plutôt que de remettre ses préjugés en question, il adapte le réel à son désir de nuire, en déguisant sa haine du juif en haine de l’État juif (antisionisme au lieu d’antisémitisme) et en arguant d’un soutien à la revendication de « libérer la Palestine du fleuve à la mer », sans avoir la moindre idée de la mer ou du fleuve dont il s’agit.
Pour s’en convaincre, il suffit de lire une étude du Professeur Hassner[3] à Harvard, sur ses étudiants, qui avaient défilé en scandant ce slogan avec enthousiasme (32,8%) ou par simple conviction (53,2%).
47% d’entre eux savaient qu’il s’agissait du fleuve Jourdain et de la mer Méditerranée (et que la formule actait le fait de remplacer l’État juif par une quatrième Palestine, après la Jordanie, Gaza et la Cisjordanie). Les autres 53% ont fait des réponses amusantes (mais pas humoristiques) : le Nil ou l’Euphrate pour le fleuve, la Mer des Caraïbes ou l’Atlantique pour la mer…
Après la géographie, l’histoire : savaient-ils à quelle date le processus d’Oslo, visant à installer progressivement la solution à deux États, avait commencé à être mis en œuvre ? Plus de 25% des étudiants ont refusé de « croire » qu’un tel accord ait jamais été signé[4]. Accepter le réel les aurait conduits soit à une décompensation cognitive, soit à devoir trouver un autre justificatif à leur haine, hypothèse narcissiquement douloureuse et limitée par leur inculture crasse.
Une autre étude, menée par les professeurs Jay P. Greene, Albert Cheng et Ian Kingsbury Greene, démontre brillamment que l’antisémitisme n’est pas une opinion, mais un sentiment né d’une pathologie libidinale. En effet, si c’était une opinion, elle évoluerait en fonction des faits et l’antisémitisme serait inversement proportionnel au niveau d’éducation. Il n’en est rien : les personnes les plus éduquées aux États-Unis ont tendance à éprouver de plus forts ressentiments envers les Juifs que les personnes moins éduquées. « L’éducation semble ne fournir aucune protection contre l’antisémitisme, et peut en fait servir à l’encourager – en partie en fournissant aux gens des moyens plus sophistiqués et socialement acceptables de le formuler. [5]»
Israël est le chiffon rouge qui déclenche l’antisémitisme chez les jeunes de tous âges. « Celui qui n’est pas communiste à vingt ans n’a pas de cœur ; celui qui l’est encore à quarante n’a pas de tête » a dit George Bernard Shaw, Prix Nobel de littérature en 1925. Cent ans plus tard, le rouge qui fait monter le sang à la tête des étudiants… et à leur pénis, n’est pas celui du drapeau à la faucille et au marteau, mais celui du sang des Juifs qu’ils rêvent de faire couler.
En France, les universités les plus à gauche : Villetaneuse, Saint-Denis, Nanterre, Le Mirail à Toulouse, Lyon II et Lyon III, sont désormais inaccessibles aux étudiants israélites sous peine de persécution systémique et d’agressions répétées.
Aux États-Unis, des étudiants juifs qui voulaient défiler avec Black Lives Matter se sont vus exiger une déclaration de non-sionisme signée de leur main. À Cornell, « un étudiant a affiché un appel “à suivre [les Juifs] chez eux et à leur trancher la gorge”, et un professeur a déclaré que l’attaque terroriste l’avait “énergisé” et “exalté”. À Harvard, une foule d’étudiants a assiégé un étudiant israélien, l’encerclant aux cris de “honte, honte, honte !”. Dans des dizaines d’autres campus, les étudiants se sont rassemblés pour glorifier le Hamas.[6]»
Partout dans l’enseignement supérieur, l’esprit critique a été remplacé par un esprit de clan, et l’universalisme par l’identitarisme. L’altérité est vécue comme un danger. L’université est devenue « le théâtre d’un affrontement idéologique mené par les tenants de la déconstruction contre l’institution elle-même [7]».
Le respect de l’altérité comme échelle d’humanité
L’antisémite ne supporte pas que l’Autre, qu’il considère comme un inférieur dangereux, respire le même air que lui. À l’inverse, le respect de l’altérité est consubstantiel du judaïsme : « Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse », ainsi Hillel le sage, contemporain de Jésus, résumait-il sa religion. Jésus, jeune rabbin, opinait de la kippa : « aime ton prochain comme toi-même », conseillait-il. « Voir le visage de l’autre, c’est parler du monde » a développé au XXe siècle Emmanuel Levinas. Et Antoine de Saint-Exupéry, juif honoraire, « Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis ».
En revanche, « l’Autre » est déclaré haram dans le Coran, aussi le devoir de tout bon musulman consiste-t-il à le convertir ou à le tuer, afin de rester dans l’entre-soi mortifère, qui explique le retard civilisationnel des pays arabo-musulmans. Le monde arabe dans son intégralité traduit environ 330 livres étrangers par an, soit un cinquième de ceux qui sont lus par les seuls Grecs. Depuis le calife Maamoun, au IXe siècle, un total de cent mille livres a été traduit en arabe. C’est presque la moyenne de ce que l’Espagne traduit CHAQUE ANNÉE dans sa langue[8].
Cette fermeture sur soi et ce déni de l’altérité se traduisent dans le pogrome du 7 octobre contre les Juifs, nettoyage ethnique s’il en fut, perpétré par « la meilleure communauté qu’on ait fait surgir pour les hommes » (sourate 3 verset 110) contre tous les « autres », infidèles, polythéistes, athées, mais surtout dhimmis.
Les dhimmis sont des Untermenschen version orientale, dont l’existence est tolérée par l’islam en échange d’un impôt, rançon de leur infériorité, de lois dérogatoires et de persécutions quotidiennes. Par ordre d’apparition à l’image, les Juifs tiennent le casting depuis Mahomet : « Ibn Omar a déclaré avoir entendu le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) dire : “Vous combattrez les juifs et aurez le dessus sur eux de sorte que la pierre dira : ô musulman ! Voici un juif caché derrière moi. viens le tuer” (rapporté par al-Boukhari, n° 3593). D’après le même Ibn Omar, le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) a dit : “Les Juifs vous combattront et vous aurez le dessus sur eux au point que la pierre dira : ô musulman ! viens tuer ce juif qui se cache derrière moi” (rapporté par Ahmad et par at-Tirmidhi et qualifié par ce dernier de « beau et authentique »)[9].
Les chrétiens sont médaille d’argent en dhimmitude
Le 12 décembre 2023, en République islamique de Mauritanie, 15 dirigeants chrétiens et leurs familles ont été arrêtés. La communauté chrétienne y est faible d’un petit millier de personnes. L’article 306 du code pénal mauritanien sanctionne l’apostasie de mort, une peine qui peut être commuée si l’accusé se repent. La diffusion d’une vidéo de baptême avait donné lieu à ces arrestations et à des incitations au meurtre : « Il faut tuer ceux qui prêchent le christianisme, les chrétiens n’ont pas leur place en Mauritanie.[10] »
Entre le 23 et le 26 décembre 2023, des milices de l’ethnie Fulani ont attaqué des communautés chrétiennes de l’État du Plateau, au Nigeria. Le bilan des « Autres » varie entre 148 et 195 morts, 300 blessés et des milliers de personnes déplacées.[11]
Le 12 janvier 2024, au Soudan, des extrémistes musulmans appartenant aux milices du Rapid Support Forces (RSF) ont mis le feu à une église à Wad Medani.. … « Les chrétiens du Soudan sont de plus en plus souvent pris pour cible », a déclaré le pasteur de cet édifice, membre de l’Église évangélique presbytérienne. Dans l’édition 2024 de la liste de surveillance mondiale rédigée par Open Doors, l’association qui défend les chrétiens en danger, le Soudan est classé n° 8 des pays où il est le plus dangereux de croire en Jésus[12].
Le 21 janvier 2024, au Nigeria, les survivants d’une attaque brutale, qui a duré quatre jours et a coûté la vie à plus de 200 chrétiens, ont été transférés dans des camps de réfugiés où ils manquent de tout. Un de ces camps, dans le comté de Barkin Ladi, abrite plus de mille personnes sans nourriture ni accès à l’eau potable.[13]
En France, on n’en est pas encore là : les Juifs, les Blancs et les chrétiens tués pour ce qu’ils sont tombent en plus petits groupes que les chrétiens d’Afrique et d’Orient, régions où on ne trouve des Juifs que dans le minuscule État d’Israël.
Enfin, pour l’Algérie, une image, qui vaut mille mensonges[14] :
« Quand on n’a que l’amour »
Jacques Brel considérait l’amour comme un trésor, une nourriture, un mode de vie, un idéal. L’amour, c’est regarder l’autre et le reconnaître comme tel, au point d’avoir envie de « regarder ensemble dans la même direction » (Saint-Exupéry)
Les jeunes déboussolés de notre époque ne cherchent pas l’amour, même comme idéal. À la place d’un être aimé, ils embrassent n’importe quelle cause, aussi saugrenue soit son idéologie, pourvu qu’elle leur donne l’impression de compter. Souvent, ils ne sont pas plus importants qu’une unité de plus dans le comptage des participants à une manifestation.
La « langue » inclusive fait partie des baisers sans amour. Elle n’a d’inclusif que l’exclusion des autres, tous les autres, classés dans une hiérarchie qui culmine avec les « hyper-autres ». Quand la langue inclut les barbares du Hamas et exclut l’armée israélienne, qui sacrifie ses soldats pour ne pas occire des civils par des bombardements semblables à ceux des Occidentaux à Sarajevo ou au Mali, elle témoigne que le cerveau est atteint. Pas le lobe frontal, qui centralise le raisonnement, mais les amygdales, sièges des émotions.
Le meurtre est le pire péché pour les Juifs et les chrétiens, dont la vie est la valeur suprême. Les islamistes y sont plus performants, ayant l’avantage de ne pas être freinés par une morale quelle qu’elle soit. L’islam ne distingue que le licite et l’illicite, qui ne sont pas prisonniers du bien et du mal, mais constituent deux catégories où le croyant peut se sentir libre de faire ce qui plaisait à Mahomet (halal) ou est sanctionné s’il fait ce qui lui déplaisait (haram). Mais la sanction ne le poursuivra pas dans l’au-delà : « Lorsque viendra le Jour de la Résurrection, Allah remettra à chaque musulman un Juif ou un Chrétien en disant : “Voici ton affranchissement de l’Enfer !” – Le Jour de la Résurrection, des gens parmi les musulmans viendront avec des péchés de la taille des montagnes, mais Allah leur pardonnera et en chargera les Juifs et les Chrétiens.» (Hadith 6462).
« Qu’importe qu’ils me haïssent pourvu qu’ils me craignent » (Caligula… et Mahomet)
Daniel Pipes, expert des conflits moyen-orientaux, remarque que la stratégie du Hamas se distingue de celles de la plupart groupes terroristes, ce qui rend ce mouvement encore plus incompréhensible pour les Occidentaux, enfermés dans leur grille de lecture intraduisible.
« Les alliés du Hamas ne cherchent manifestement pas à se faire de nouveaux amis. Au contraire, ils imitent la tactique du Hamas, à savoir le martyre, pour gagner le soutien des islamistes et des gauchistes. Alors que les djihadistes recherchent généralement des victoires sur le champ de bataille, le Hamas entame sciemment des guerres contre un ennemi plus puissant, souhaitant être vaincu et revendiquant le statut de victime. La destruction et la mort renforcent son attrait. Il gagne politiquement en se faisant mal sur le plan militaire.[15] »
En France, de plus en plus de groupes usent de la méthode HamasTM (marque déposée) : les palestinolâtres qui cassent tout sur le passage de leurs manifs, en attendant de mettre « à mort les Juifs ! » pour acter leur slogan, mais aussi les Soutiens de la Terre, qui détruisent les récoltes et attaquent les gendarmes. Tous aspirent à gagner le soutien des bobos et des gogos (qui cumulent souvent les deux mandats) en se présentant comme des martyrs.
En témoigne la béatification d’un fasciste de gauche, Clément Méric, tué en 2013, dans une bagarre avec des fascistes de droite. Le Fascisme pour les Nuls rappelle que les premiers sont appelés « antifa », mais utilisent les mêmes méthodes que leurs adversaires, appelés les fascistes-tout-court ou les anti-antifa depuis cet épisode[16]. Le même dictionnaire insiste sur le fait que la bagarre est le mode de communication commun aux fascistes/antifas de tout poil et plume, de tout couteau et Kalachnikov.
La méthode est aussi brevetée à l’international. Aux États-Unis, pour manifester sa haine des Juifs et son pseudo-soutien aux Palestiniens, une militante de BLM au volant de sa voiture a volontairement percuté un policier :
Quel rapport entre Black Lives Matter (les vies noires comptent), Israël et un policier newyorkais ? Facile !
Flic = Blanc = fasciste = Juif = Israël = coupable de génocide.
Femme = victime = Palestiniens = victimes de génocide. CQFD.
La vieille bique qui conduisait la voiture-bélier sera jugée et probablement condamnée, puis sacrée martyre de la cause palestinienne, comme le fasciste antifa Clément Méric l’a été de la cause fascistement antifasciste.
L’altérité est un fait : l’Autre existe, ce n’est pas sujet à controverse
Ce qui varie, c’est l’attitude de chacun, individu ou groupe, vis-à-vis de « l’autre » et sur quel(s) critère(s) se constitue le « nous » et le groupe des « autres ».
Les Français ont été sommés, pendant des décennies, de préférer les autres à eux-mêmes, dans un fantasme fanatique baptisé du joli nom de Vivrensemble. Sauf que le mariage de raison auquel on les a forcés signifiait tendre la joue gauche quand la droite était trop tuméfiée pour être frappée davantage.
Le 7 octobre 2023 a été le 11 septembre d’Israël et des Juifs de par le monde. Soit une quinzaine de millions d’individus au total, à comparer au milliard et demi de musulmans et au même nombre de chrétiens.
Qu’un si petit peuple en soit venu à occuper une aussi large portion dans l’imaginaire humain relève d’une réussite improbable… ou d’une élection ad æternam au rôle de bouc émissaire pour l’humanité. Une première preuve en avait été administrée par la Shoah : une entreprise industrielle internationale consacrée exclusivement à l’extermination d’un peuple !
Après que la communauté internationale ait juré « plus jamais ça », elle a dû constater le 7 octobre, sans que cela lui inspire trop de larmes, que la haine n’était pas éteinte et qu’une frénésie de cruauté sadique et de barbarie avait été perpétrée par la population la plus chouchoutée de la planète. Cela aurait dû valoir à ses auteurs une exclusion de la tribu des Homo Sapiens.
À l’inverse, la haine des victimes a été centuplée : le nombre d’actes antisémites dans les trois mois qui ont suivi l’attaque du Hamas a égalé celui des trois années précédentes cumulées. À partir du 7 octobre, alors même que les images du massacre des civils israéliens étaient diffusées, les actes antisémites ont augmenté de plus de 700 % par rapport à la même période de l’année précédente. Cela avait déjà été le cas après l’attentat contre l’école Ozar HaTorah (Toulouse, 2012) et après l’attentat contre l’Hyper Cacher (Vincennes, 2015). « La médiatisation du massacre de Juifs provoque l’augmentation du passage à l’acte antisémite », (Rapport du ministère de l’Intérieur et du SPCJ.[17])
Pour les barbares, l’altérité est à éradiquer
Mais les autres habitants de la planète ont compris ce qui les attendait de la part de ceux pour qui ils seraient éternellement « les autres ».
L’altérité est maintenant hyperbolisée et personne ne peut plus éviter de remarquer les grosses ficelles avec lesquelles on tente d’attacher les Juifs au poteau d’exécution.
Les idiots utiles défilent toujours pour un tyran ou un autre, dont ils seront les premières victimes lorsque leur champion aura pris le pouvoir : Hitler puis Staline ont tué tous leurs opposants, puis tous les tièdes, puis tous les « traîtres », puis… ; Khomeiny a pris la place du Shah, dont il a multiplié les crimes, en commençant par l’exécution de ses compagnons de route communistes ; aujourd’hui, des « Queer for Palestine » attendent avec impatience d’être jetés du haut d’une grue ou d’un immeuble en vertu de la loi palestinienne contre le crime d’homosexualité[18].
Quant aux Juifs, ils s’obstinent à éviter les pertes civiles chez leurs ennemis : ils se mettent eux-mêmes en danger à Gaza, au lieu de réduire la Bande en cendres depuis le ciel, sans danger, comme l’ont fait tous les donneurs de leçons, depuis 1945, chaque fois qu’ils ont été confrontés à un danger mortel. Dans l’antiquité[19], il y a eu Dresde et Hiroshima, avant-hier le Vietnam, puis Sarajevo, hier l’Irak et l’Afghanistan et aujourd’hui l’Irak, la Syrie et le Mali…
Mais seuls les Juifs sont confrontés à l’extermination.
Et seuls les Juifs sont en position d’accusés par l’Afrique du sud, parangon de démocratie devant la Cour de Justice internationale.
Ladite Cour a cherché dans tous les caniveaux, elle a soulevé toutes les pierres pour trouver motif à juger coupable celui qui avait été victime d’une tentative génocidaire, mais elle a dû s’avouer vaincue. Elle a donc « estimé qu’Israël devait prendre des mesures pour empêcher ses forces armées de commettre des actes de violence génocidaire, “prévenir et punir” l’incitation au génocide et veiller à ce que l’aide humanitaire à Gaza soit augmentée. » Mais il ne faut pas désespérer Billancourt-Saint-Denis, aussi a-t-elle ajouté : « Au moins certains des actes et omissions qui, selon l’Afrique du Sud, auraient été commis par Israël à Gaza sembleraient pouvoir éventuellement relever des dispositions de la Convention [sur le génocide].[20] »
Les Juifs n’ont plus d’illusion. Ils savent qu’il ne sert à rien d’offrir ce qu’on a de meilleur à l’ennemi, dans l’espoir de le ramener au sein de l’humanité : cet ennemi-là est le pire des Autres, c’est un pervers incapable de sentiments et gouverné par des pulsions morbides et sadiques.
Le mot de la fin, pour des maux qui n’en finissent pas
La fraternité n’est qu’une des modalités de l’altérité.
Le chat sait que le chien est un Autre, mais il sait aussi que, en prenant des précautions, certains chats individuels peuvent fraterniser avec certains individus de l’autre race. En revanche, nulle gazelle ne peut se permettre de laisser un guépard l’approcher.
Les Israéliens, dans leur majorité, ont compris que le Hamas appartenait à une race incompatible avec leur survie. C’est en cela que réside l’altérité : l’évaluation à sa juste mesure de la distance qui permet la cohabitation de deux espèces sur une seule planète.
Contrairement à Israël, les dirigeants des démocraties occidentales ont plus peur de leurs propres populations immigrées que de leurs prédateurs naturels, qui ne manqueront pas de les attaquer quand ils auront éradiqué Israël et les Juifs. On ne peut même pas accuser les agresseurs de dissimulation : ils clament leur objectif haut et fort !
Les démocrates croient que leurs valeurs sont universelles et refusent d’envisager qu’elles sont issues d’une morale qui leur est spécifique. Ils préfèrent mourir que d’admettre l’incompatibilité de l’autre avec leur survie.
Si les déclarations des chancelleries étaient autre chose qu’un murmure des babouches, ils prendraient le réel en compte et agiraient en conséquence.
L’ONU ne les représente pas. Le Droit international qu’elle décrète est la loi du plus fort. Devant les 95 dictatures démocrativores, les 72 démocraties herbivores ne font pas le poids[21]. Malheureusement, elles n’ont pas encore acquis le réflexe de fuite des gazelles.
Sinon, elles auraient pris la première mesure nécessaire à leur survie : scinder l’ONU en deux syndicats qui s’occuperaient chacun de ses ouailles, l’altérité étant plus facile à respecter quand les vaches sont gardées de part et d’autre d’une Ligne verte.
Dire qu’Israël est la seule démocratie du Moyen-Orient ne relève pas de la propagande :
En vert foncé : démocraties pleines. En vert clair, démocraties imparfaites (dont Israël, trop petit pour qu’il apparaisse au sein de la marée rouge). En orange les régimes hybrides (dictatures soft) et en rouge les dictatures dures.
Ce n’est pas pour ce qu’il fait, ni pour l’espace qu’il occupe (il est plus petit que la Bretagne) que les antisémites sont aussi acharnés à la perte d’Israël. C’est pour ce qu’il est : un pays plein de Juifs qui disposent d’eux-mêmes et se défendent quand ils sont attaqués.
© Liliane Messika
Paru dans la revue Dogma https://dogma.lu/wp-content/uploads/2024/05/Edition__26.pdf
Notes
[1] www.atlantico.fr/article/decryptage/mais-pourquoi-l-antisemitisme-croit-il-chez-les-plus-eduques-simone-rodan-benzaquen
[2] www.lepoint.fr/culture/homosexuels-hippies-dissidents-quand-cuba-se-purifiait-de-ses-dechets-09-10-2017-2163068_3.php
[3] www.wsj.com/articles/from-which-river-to-which-sea-anti-israel-protests-college-student-ignorance-a682463b
[4] La réponse est 1993 et la récompense, le Prix Nobel de la Paix (Rabin et Perez d’une part, Arafat de l’autre).
[5] https://muse.jhu.edu/article/852569/pdf
[6] www.thefp.com/p/campus-rage-middle-eastern-roots-qatar
[7] https://atlantico.fr/article/decryptage/mais-pourquoi-l-antisemitisme-croit-il-chez-les-plus-eduques-simone-rodan-benzaquen
[8] United Nations Development Program – Arab fund for economic & social development – Arab human Development – Report 2002
[9] https://islamqa.info/fr/answers/9341/lauthenticite-du-hadith-evoquant-le-combat-a-mener-contre-les-juifs
[10] www.persecution.org/2023/12/13/christian-leaders-arrested-in-mauritania-in-large-scale-crackdown/
[11] www.christianpost.com/news/death-toll-rising-in-christmas-attacks-in-nigerias-plateau-state.html
[12] www.morningstarnews.org/2024/01/militants-in-sudan-kill-christian-set-church-building-ablaze/
[13] www.persecution.org/2024/01/21/survivors-of-christmas-eve-attack-in-nigeria-struggle-in-idp-camp/
[14] Traduction : Bien que la presque totalité des églises ait été fermée en Algérie, le Parlement arabe a récemment pris la défense du pays, prétendant que l’Algérie avait fait de gros efforts pour promouvoir la liberté religieuse.
[15] www.meforum.org/65469/daniel-pipes-making-sense-of-the-hamas-israel-war
[16] www.liberation.fr/dossier/affaire-clement-meric/
[17] www.i24news.tv/fr/actu/france/1706166043-france-flambee-des-actes-antisemites-en-2023-surtout-depuis-le-7-octobre
[18] Dans les deux Palestine (Cisjordanie et Gaza) il n’existe aucune reconnaissance légale de l’homosexualité, qui est brutalement sanctionnée. En 2016, Mahmoud Ishtiwi, un commandant du Hamas dont l’homosexualité a été dévoilée, a été torturé et condamné à mort par ses anciens camarades. Les accusations de « débauche morale » ont beaucoup joué dans son exécution et dans les tortures qui l’ont précédée. – www.tetu.com/2016/03/02/un-commandant-du-hamas-execute-pour-relations-homosexuels/
[19] À l’échelle de la vision du monde du palestinolâtre moyen, pour qui l’Histoire commence à sa naissance.
[20] hwww.newyorker.com/news/q-and-a/the-importance-of-the-icj-ruling-on-israel#
[21] https://ourworldindata.org/grapher/democracy-index-eiu
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