Il est des dissymétries morales qui ne peuvent que heurter le sens commun, sinon l’intelligence critique. A tel point que l’on pourrait légitimement se demander si cette célèbre assertion par laquelle un philosophe tel que Descartes, père du rationalisme moderne, inaugure son non moins fameux « Discours de la Méthode » s’avère universellement adéquate, voire correcte : « Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée », y affirme-t-il en effet.
Car comment, de fait, juger les actuelles déclarations, émises par la plupart de nos gouvernements occidentaux, à travers lesquelles ils adressent, dans le même temps, de « sincères condoléances » envers un tyran, commanditaire de milliers de meurtres à l’encontre de son propre peuple, tel qu’Ebrahim Raïssi, président, tout récemment disparu, de l’abominable République Islamique d’Iran, et par lesquelles, parallèlement, ils se réjouissent de la demande de mandat d’arrêt international lancé ce 20 mai 2024 par le procureur général de la Cour Pénale Internationale, Karim Khan, à l’encontre de deux des principaux dirigeants, Benyamin Netanyahou (Premier Ministre) et Yoav Galant (Ministre de la Défense), d’Israël ?
Et ce, qui plus est, pour rendre ce jugement définitivement inique, en mettant sur un pied d’égalité, dans un identique procès pour « crimes de guerre » et « crimes contre l’humanité », trois chefs d’un groupe terroriste tel que le Hamas, responsable du sanguinaire pogrom génocidaire du funeste 7 octobre dernier à l’encontre des Juifs, et deux responsables politiques d’un Etat démocratique tel qu’Israël. Injuste, déplorable et scandaleux « deux poids, deux mesures », doublé d’une encore plus scandaleuse équivalence !
De fait : établir ainsi une équivalence entre une nébuleuse terroriste (le Hamas) et un Etat démocratique (Israël) est une honte morale, une erreur judiciaire et une faute politique !
Pour une solution à deux Etats : Israël et la Palestine vivant dans une paix juste et durable
Entendons-nous. J’ai toujours milité, en ce Proche et Moyen-Orient, pour une solution à deux Etats : Israël et la Palestine vivant, côte à côte, dans une paix juste et durable, comme le prône le langage diplomatique ; et certes, nuance oblige, la riposte militaire dans la bande de Gaza, de la part d’Israël, peut-elle s’avérer dès lors, dans sa disproportion, inacceptable, voire condamnable, tant sur le plan moral que politique ou juridique.
C’est d’ailleurs en ce sens que je me suis exprimé, sans la moindre ambiguïté, dans une lettre ouverte, intitulée « Au nom de l’humanité, pitié pour les Palestiniens innocents », que j’ai directement adressée, dès ce 25 octobre 2023, au Premier Ministre d’Israël, Benyamin Netanyahou précisément (https://www.opinion-internationale.com/2023/10/24/lettre-ouverte-dun-intellectuel-juif-au-premier-ministre-disrael-benyamin-netanyahou-au-nom-de-lhumanite-pitie-pour-les-palestiniens-innocents_117254.html).
Et un Netanyahou que je mettais en outre là en garde, avec raison à l’évidence, contre une possible inculpation, à son encontre, de la part de cette même CPI. Non pas, bien évidemment, que je la désirasse. Mais, enfin, l’air est à ce point aujourd’hui vicié, et même nauséabond en matière d’antisémitisme le plus abject, que, la pressentant malheureusement, je la voyais, ponctuellement, venir, comme aux heures les plus sombres de notre (in)humanité !
Un procureur proche du Pakistan, pays refusant l’existence de l’Etat d’Israël
Il y a toutefois une chose que, par-delà même cette lucidité (mais, comme le dit autrefois un grand homme politique français, Félix Faure, Président sous la IIIe République et à qui Emile Zola adressa son admirable « J’accuse » lors de la tristement célèbre affaire Dreyfus, « C’est parfois un grand tort que d’avoir raison trop tôt !), je n’avais pas prévue : c’est que cette incrimination de la CPI, à l’encontre de ces deux importants dirigeants israéliens, serait la très partiale, irrationnelle et tendancieuse œuvre d’un procureur, Karim Khan, d’origine pakistanaise, par-delà même sa naturalisation anglaise.
Oui : un pays, le Pakistan, qui, tout comme l’actuelle République Islamique d’Iran, refuse obstinément, jusqu’à vouloir sa destruction, l’existence de l’Etat d’Israël en tant que tel !
C’est dire si ce seul fait, aussi objectif qu’incontestable, devrait normalement invalider, la rendant nulle et non avenue en l’état, tant elle s’avère politiquement orientée et subjectivement énoncée, la décision de cet inénarrable, et bien mal conseillé ou documenté, procureur.
Entre antisionisme et antisémitisme
Pis : ainsi ne suis-je pas loin de penser moi aussi, à l’instar de Benyamin Netanyahou précisément, qu’il y a manifestement là également, dans cette injuste inculpation, un très condamnable soupçon, conscient ou inconscient qu’il soit, sinon d’antisémitisme déclaré, du moins d’antisionisme sournois !
D’où cette conclusion, imparable sur le plan judiciaire : aux juges de la CPI donc, qui auront en cette lamentable affaire le dernier mot, d’invalider, s’ils sont véritablement dépositaires de cette éminente « Critique de la faculté de juger » dont un philosophe tel qu’Emmanuel Kant fit l’un des pivots majeurs de sa pensée, cet inique mandat d’arrêt international, ne serait-ce que pour « vice de forme » au vu de la personnalité de son commanditaire, à l’encontre des responsables politiques d’Israël !
© Daniel Salvatore Schiffer
Philosophe, écrivain, auteur d’une quarantaine de livres, directeur de l’ouvrage collectif, autour de 33 intellectuels majeurs, « L’humain au centre du monde – Pour un humanisme des temps présents et à venir » (Editions du Cerf), Daniel Salvatore Schiffer vient de publier « Rockisme contre wokisme » (Erick Bonnier, 2024)
Mr Schiffer a raison, il faut proteger les gazaouis innocents , cela ne devrait pas etre tres difficile , vu le nombre certainement ridicule de gazaouis sincerement prets a vivre pacifiquement a nos cotés …… peut etre un grand meeting dans une cabine telephonique ferait l affaire ?
Derrière ce « en même temps dans les 2 camps » se cache une volonté stratégique et politique nourrie par la détestation d’Israël, pour certains , l’antisémitisme pour d’autres . Cette méthode vise à casser , humilier affaiblir Israël dans le seul but d’imposer un état palestinien certes légitime mais sans négociations compromettant une paix durable au mieux une trêve de quelques visant à endormir Israël d’une nouvelle attaque du Hamas ou groupe similaire.
Si les demandes d’arrêts avaient étés faites séparément peu après le 7 octobre contre les chefs du Hamas et ce la aurait été à la faveur d’Israël et cela à l’encontre des intentions des défenseurs des palestiniens à tout prix et tant pis si cela aurait pu avoir plus de pression pour libérer les otages. De plus selon les dires de Mr Curiat avocat CPI , à la télévision suisse sur RTS le 21 mai , ce la auraient entraîné des « accusations de soutien aux puissants « terme stigmatisant les juifs par les antisemites. Allant dans ce sens j’imagine que l’antisémitisme déjà révélé après le 7 octobre aurait été exacerbé dangereux et contre productif à la longue pour ces mêmes défendeurs d’un état palestinien à tout prix.
Toujours selon les dire de Mr Curiat si cela avait été fait séparément contre dirigeants israéliens, il y aurait eu des accusations antisemites. D’où la nécessité de faire en même temps dans les 2 camps pour ne pas être pris dans le piège de l’antisémitisme et de jouer sur tous crimes doit être puni. Mais pour cela il fallait attendre et durer cette guerre avec prises d’otages et boucliers humainspour obtenir plus d’éléments raisonnables pour mettre à mal Israël.
@Sebbane La détestation d’Israël est TOUJOURS liée à l’antisémitisme. Antisionisme et antisémitisme sont deux synonymes.
Merci pour votre retour, mon but était effectivement de montrer que cette méthode « du en même temps dans les 2 camps » masque un anti sémitisme en utisant les propos tenus par Monsieur Currat si Monsieur Khan avait fait des demandes de mandats d’arrêt séparément.
J’entends bien que la détestation d’Israël est liée à l’antisémitisme et effectivement pour moi aussi l’antisionisme est synonyme d’antisémitisme . Mais nombreuses personnes se réfèrent au dictionnaire Larousse qui propose 2 définitions masquant là aussi un flou. Être hostile à Israël ou être contre l’expansion du sionisme. Et c’est cette dernière qui me dérange. Certains disent qu’ils détestent ou contestent Israël à cause de l’occupation des territoires palestiniens mais qu’ils reconnaissent le droit à Israël d’exister. D’où l’antagonisme d’être à la fois sioniste et anti sioniste qui sert bien les antisemites et d’autres s’en défendent en se référant à la définition du dictionnaire. Cela me perturbe
Merci pour votre réponse. Dans la grande majorité des cas, ceux qui se disent « antisionistes » tendent à justifier les crimes antisémites et actes terroristes du Hezbollah et du Hamas au nom de la lutte contre « »l’occupation des territoires palestiniens » ». C’est particulièrement flagrant depuis le 7 octobre. On est bien d’accord sur le fond.
Nuit et Brouillard à La Haye tome 2. https://www.tribunejuive.info/2024/01/16/nuit-et-brouillard-a-la-haye/