
A la fin des années 50 , au début de 1960, la licence en droit c’était 3 ans d’études à la Faculté de Droit , Place du Panthéon . Le cours de Droit Civil , matière primordiale, c’était le domaine du Professeur Mazaud dans le grand amphithéâtre et il commençait son cours tous les lundi à 8 heures précises. On y assistait tous , parfois assis sur les marches des escaliers . Et on relisait les notes qu’on avait pu griffonner puis on en faisait des fiches qu’on relisait très souvent jusqu’à pouvoir les réciter . Atmosphère sérieuse et même austère , respect total sauf pour les chaisières du Jardin du Luxembourg : les chaises étaient payantes ; on changeait de place tout le temps pour éviter leur carnet à souche .
Après avoir réussi aux trois années d’examen , on allait chercher le précieux document : la licence en Droit qui ouvrait les portes des administrations , des banques et même des écoles de commissaires de police.
La licence en Droit permettait d’entrer à Sciences Po , rue Saint Guillaume, directement en seconde année .
Autre ambiance : les étudiants , presque tous en blazer bleu et pantalons fumée de Londres , étaient plus vifs et bruyants: les rejetons des instruits , des riches , des puissants. La politique c’était un must, « Le Monde « sous le bras , on assistait à la conférence de Jacques Fauvet . Et chacun calculait ses chances d’être admis à l’ École Nationale d’ Administration , l’ ENA qui avait en charge la formation des élites de la politique en marche vers le pouvoir .
C’était exaltant et c’était toujours respectueux , on était dans un des temples du savoir et on dissimulait notre joie d’en faire partie.
Hier , des reportages sur les chaînes d’information : le grand amphithéâtre Boutmy couvert de drapeaux palestiniens , le désordre et l’agressivité : Gaza et ses criminels présentés comme des victimes alors qu’il s’agit de preneurs d’otages et des criminels les plus barbares de l’Histoire .
Quoi ? Les étudiants de Sciences Po , les intelligents recrutés dans tous les milieux pour demain gouverner le pays, tomberaient dans le piège et transmuteraient les victimes en bourreaux ?
Que ne relâchent ils pas leurs otages , ces terroristes qu’ils admirent ? Et les bombardements s’arrêteraient ! Sacrifier leur population pour sauver leur peau et leurs milliards volés ? Et les étudiants sont tombés dans le piège ?
Quelle déception ! Quelle tristesse !
Même Sciences Po se défait et le pays aussi : France mère des arts , des armes et des lois .
Les ministres et les directeurs ont publié des communiqués pour condamner ce qui s’est passé . Ils manquait les mots : Gaza, Israël, Hamas , Tsahal , terroristes , otages , massacre, viols , torture …
Il manquait la vérité , le courage !
On a été surpris : des étudiants nuls pour évaluer une situation et des officiels habiles pour rédiger un texte habile .
En souvenir des années de jeunesse et d’études rue Saint Guillaume , nous avons eu honte .
© André Simon Mamou