Á la suite du scandale de l’implication dans les massacres du 7 octobre 2023, de plusieurs employés de l’UNRWA dans la Bande de Gaza, au-delà de la suspension du financement de l’agence onusienne, c’est la question-même des « réfugiés palestiniens » qui est enfin posée. En effet, tandis que plus de 800 000 Juifs furent expulsés des pays arabes ou contraints à l’exil après 1947[1] sans que ne leur soit en rien reconnu un quelconque statut de réfugiés, ne serait-ce que temporaire, personne ne s’est s’offusqué jusqu’à aujourd’hui, ni même étonné de l’incongruité du statut de réfugiés à vie et sur plusieurs générations, dont bénéficient aux frais de la communauté internationale, les Arabes de Palestine qui ont quitté leurs villages entre 1947 et 1949 et de tous leurs descendants sans fin.
Par ailleurs, le règlement définitif de la question d’un État palestinien voisin de l’État d’Israël se repose avec acuité sous la forme « du jour d’après ». Or le problème des perspectives post-guerre Israël/Hamas à Gaza réside dans le manque flagrant d’interlocuteurs palestiniens véritablement désireux de prendre en charge un État palestinien. Car c’est une chose de proclamer l’existence de l’État « Palestine », « au nom de dieu [sic] et du peuple palestinien » (comme l’a fait l’OLP en 1988)[2]et de faire campagne pour que cet État virtuel soit reconnu par les organisations internationales et tous les États de la planète[3], une autre est de prendre la responsabilité de sa création réelle et de sa gestion raisonnée en respectant son voisin l’État d’Israël.
Les belles âmes appellent aujourd’hui à la création urgente d’un État palestinien pour assurer « la paix au Proche-Orient », bâtissent « une feuille de route vers la paix[4] » et exigent qu’Israël l’adopte sans délai. Certes, l’extrême droite israélienne travaille depuis longtemps à la construction dudit « grand Israël », et aujourd’hui, elle est représentée dans l’alliance gouvernementale dirigée par Benjamin Netanyahu qui par ailleurs, a en tête un agenda tout personnel en poursuivant la destruction -indispensable au demeurant- des infrastructures du Hamas à Gaza.
Mais les dirigeants occidentaux semblent ignorer que si aujourd’hui une majorité d’Israéliens[5] (bien au-delà des soutiens à Benjamin Netanyahu) ne croient plus dans « La solution à deux États », c’est que les massacres génocidaires du 7 octobres et les vagues d’antisémitismes qui ont immédiatement suivi, n’ont fait que confirmer ce sentiment qui n’a cessé de se renforcer au fil du temps : les leaders palestiniens quels qu’ils soient, ne veulent pas d’un État « à côté » d’Israël, quelles qu’en soient les frontières et la capitale. Ainsi, « un sondage réalisé trois semaines après les attaques a révélé que 28,6 % des Israéliens juifs étaient en faveur d’une solution à deux États, contre 37,5 % un mois plus tôt, selon le sondage Peace Index de l’université de Tel Aviv.[6]«
Ce net décrochage dans l’opinion publique israélienne dû bien sûr au traumatisme des massacres, fait toutefois suite à une lente dégradation amorcée depuis les années 2000. Pourquoi le mouvement La Paix maintenant est-il à ce point affaibli ? Pourquoi le Parti travailliste est-il réduit à presque rien ? Ne serait-ce pas parce qu’en Israël, les partisans sincères de « La solution à deux États » n’ont jamais trouvé de partenaires palestiniens fiables après avoir signé des accords de paix ? Et que dire de tous ces kibboutzniks de gauche, massacrés le 7 octobre parfois grâce aux renseignements fournis par ces Gazaouis-mêmes qu’ils croyaient leurs amis et qu’ils avaient soutenus et aidés ?
D’ailleurs, le 17 janvier dernier, le chef du Hamas à l’étranger, Khaled Meshaal, n’a-t-il pas déclaré : « Nous rejetons l’idée d’une solution à deux États. Notre objectif est clair : un État palestinien du fleuve à la mer, du nord au sud. Le 7 octobre a renouvelé le rêve et l’espoir[7] » de cette Palestine. Si des naïfs ont voulu croire que le Hamas accepterait « un État dans les frontières de 1967[8]« , les voilà éclairés. Mais dans le fond, que le Hamas ne puisse être un interlocuteur pour mettre en œuvre à court terme « La solution à deux États », cette opinion est très largement partagée. Simplement, cette position vient de loin et se trouve soutenue bien au-delà des groupes djihadistes palestiniens.
A l’époque de la Palestine mandataire sous domination britannique, les Arabes avaient refusé ouvertement le principe de l’existence d’un territoire national accordé aux Juifs, que ce soit sous la forme « d’un foyer national juif » selon la formule de la Déclaration Balfour en 1917 ou suivant un plan de partage proposé déjà par la « Commission Peel » en 1937[9] puis dans le « Livre blanc » en 1939. Ces tentatives s’étaient soldées in fine par des violences à l’encontre des populations juives de Palestine. Le Plan de partition de l’ONU de 1947 déclencha le même refus, l’agression du jeune État israélien à peine née, par les armées des pays arabes qui l’encerclaient, et en représailles à la création d’Israël, au moins 800 000 Juifs furent chassés des pays arabes ou contraints de fuir.
Les « Accords d’Oslo » de 1993 ont été remis en cause par la poursuite du terrorisme palestinien sur les populations israéliennes, les initiatives diplomatiques de 2000-2001 ont quant à elles été contrées par « la seconde intifada », et la tentative de relance du dialogue en 2003 s’est enlisée malgré le démantèlement des implantations dans la Bande de Gaza et l’évacuation de la zone par Israël en 2005. Si certains responsables israéliens ont une part de responsabilité dans ces échecs successifs, il est choquant qu’elle soit toujours la seule à être mise en avant tandis que « le refus palestinien d’un État juif[10] » fait systématiquement l’objet d’un déni. Pourtant depuis les années 90, c’est toujours à l’initiative de coalitions internationales ou d’Israël, et jamais à partir de projets de « solution à deux États » qu’aurait pu avancer l’OLP, que des négociations se sont amorcées.
Après les traités de paix signés avec l’Égypte en 1979 et avec la Jordanie en 1994, la rupture des négociations israélo-palestiniennes par Yasser Arafat[11] en 2000 à Camp David (II), puis l’impossible négociation de Taba en 2001 sur fond de « seconde intifada », ont alors fait envisager à Israël la perspective d’un contournement du « problème palestinien ». C’est ainsi que les « Accords d’Abraham » actant la reconnaissance de la légitimité de l’État d’Israël par les Émirats arabes unis et le Bahreïn en 2020, ont rouvert le processus de normalisation de l’État hébreux avec ses voisins. Certes sous la pression de leurs « rues » propalestinistes respectives après le 7 octobre, les pays musulmans de la région ont interrompu ce processus de rapprochement avec Israël, mais ils y reviendront probablement après la fin de l’opération de Tsahal dans la bande de Gaza, en fonction de leurs intérêts économiques et stratégiques.
Il faudra alors que chacun prenne ses responsabilités et cette fois, les pays arabes ne devront plus s’y soustraire. Ce sont eux en premier lieu qui doivent en effet enfin régler la question des « réfugiés palestiniens » en intégrant dignement leurs « frères » dans leurs États respectifs et/ou en garantissant la viabilité pacifique d’un État palestinien qui ne menacerait plus son voisin israélien dans son être et dans son droit légitime à l’existence.
Mais pour cela, et si l’on veut que « La solution à deux États » ne reste pas une formule incantatoire, il faut aussi avoir le courage de lutter contre l’idéologie islamiste, des Frères musulmans notamment mais pas seulement, cultivant la haine des Juifs, qui est sans doute le frein le plus important à la coexistence d’un État palestinien à côté d’Israël.
© Renée Fregosi
Source: le Point
Notes
[1] Voir par exemple Malka Hillel Shulewitz. « The Forgotten Millions: The Modern Jewish Exodus from Arab Lands ». Continuum. 2001. p. 208.
[2] Romane Laignel Sauvage. « Le 15 novembre 1988 : Yasser Arafat proclame la création de l’État palestinien », INA, 9 septembre 2023, https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/yasser-arafat-palestine-dirigeant-proche-orient
[3] Louis Dubar. « Quels pays reconnaissent déjà l’État palestinien et quel est son statut au sein des Nations unies ? » France Info 5 novembre 2023, https://www.francetvinfo.fr/monde/palestine/carte-quels-pays-reconnaissent-deja-l-etat-palestinien-et-quel-est-son-statut-au-sein-des-nations-unies_6153708.html
[4] Toute l’Europe, 23 janvier 2024, « Feuille de route pour Gaza : l’Union européenne réaffirme une solution à deux États », https://www.touteleurope.eu/l-ue-dans-le-monde/feuille-de-route-pour-gaza-l-union-europeenne-reaffirme-une-solution-a-deux-etats/
[5] Voir Indice de la paix de l’Université de Tel Aviv, Findings – The Peace Index – November 2023 : https://social-sciences.tau.ac.il/sites/socsci.tau.ac.il/files/media_server/social/2023/Findings-November-2023-EN.pdf
[6] « Dans un Israël traumatisé, les pacifistes gardent l’espoir d’une solution à deux États ». Times of Israel. 8 décembre 2023. https://fr.timesofisrael.com/dans-un-israel-traumatise-les-pacifistes-gardent-lespoir-dune-solution-a-deux-etats/
[7] Voir https://www.youtube.com/watch?v=V8yug98BqNc
Ou Saba Net (Agence de presse yéménite) 18 janvier 2024 : « Meshaal : Nous rejetons le terme de solution à deux États et la solution est de se débarrasser de l’occupation », https://www.saba.ye/fr/news3297355.htm
[8] Voir par exemple Alain Gresh. Le Monde diplomatique. 22 décembre 2008 : « Khaled Meshaal : nous voulons un État dans les frontières de 1967 ». https://blog.mondediplo.net/2008-12-22-Khaled-Mechaal-Nous-voulons-un-Etat-dans-les
[9] Voir Georges Bensoussan. Les origines du conflit israélo-arabe (1870-1950), Éditions Que sais-je ? / Humensis, Paris 2023.
[10] Voir Shmuel Trigano, « Le refus palestinien d’un État juif », Controverses, n° 7, 2008, p. 38-43.
[11] « Selon l’ancien président démocrate des Etats-Unis, le chef de l’Autorité palestinienne a commis une ‘erreur colossale’ en refusant les offres de paix formulées par les Israéliens et les Américains’. Le Temps, 26 juin 2004, « Dans ses Mémoires, Bill Clinton n’est pas tendre envers Yasser Arafat », https://www.letemps.ch/monde/memoires-bill-clinton-nest-tendre-envers-yasser-arafat
Renée Fregosi est Philosophe et politologue. Présidente du CECIEC, Membre de Dhimmi Watch et de l’Observatoire des idéologies identitaires, son dernier ouvrage paru est « Cinquante nuances de dictature. Tentations et emprises autoritaires en France et ailleurs », aux Éditions de l’Aube. 2023.
Bien dit.
Voir aussi (et éventuellement intégrer au TJ) sur « le Point »:
https://www.lepoint.fr/monde/israel-accuse-de-genocide-la-bonne-lecture-de-l-ordonnance-de-la-cij-28-01-2024-2550912_24.php
Avis perso : la meilleure et la plus précise analyse jamais lue sur le sujet.. Un bel écho au dernier ouvrage de Georges Bensoussan. Un grand merci.
Il est clair que la « question palestinienne » ne pourra trouver une solution que le jour où les pays arabes – et particulièrement l’Egypte et la Jordanie – comprendront enfin qu’il leur faut être partie prenante dans les négociations ; la partie à deux Israel/palestiniens étant définitivement terminée depuis le 7 Octobre.
Le XXème siècle est le couronnement de XX siècles de mensonges, d’hypocrisie et de lâcheté de l’humanité tout entière.
L’histoire du Peuple de la Bible et de l’Etat d »Israel est jalonnée de mensonges, de persecutions, tous issus de mensonges indiscutables.
Nul besoin d’en faire la liste, beaucoup trop longue, mais édifiante.
Depuis le Mensonge du Deicide, suivi des appels au genocide des Juifs du Coran, Israel est devenu le seul souffre douleur des « faiblesses » de l’inhumanité.
Aujourd’hui la communauté internazionale,a mué son Antijudaisme contre son jumeau, l’Antisionisme.
Avec arrogance et un cynisme quasiment revendiqué elle s’autorise à intervenir et dicter sa politique au Peuple souverain d’Israel.
Silence total sur l’énorme mensonge des « Droits légitimes du Peuple Palestinien ». Peuple inventé en 1967 sur une terre Palestinienne Juive.
Silence total sur la volonté affichée de tous les Pays musulmans de respecter un Coran genocidaire, modele de Mein kempf.
Silence total sur les appels permanents à la Destruction d’Israel par la majorité des états musulmans. Ceci bien evidemment en contravention avec la charte des Nazions Unies, et Silence de cet organisme soumis.
Silence aussi sur les manifestations monstres des États et peuples arabo-musulmans, de soutien au genocide du 7 0ctobre. Certains, comme l’Égypte. La Jordanie, le Maroc ayant signé des traités de Paix avec Israël, dont on voit bien que seule la Haine du Juif prévaut.
Silence aussi sur les manifestations de soutien au Hamas des populations chrétiennes Eurabeennes.
L’hypocrisie pousse donc les courageux collabos de l’islam genocidaire à nous imposer une « solution à deux Etats » dont il est aiséde deviner les consequences pour Israel et l’ensemble des Juifs.
Ne nous y trompons ils savent très bien qu’il s’agirait d’une « Solution finale à deux Etats ».
La ficelle et trop grosse et nous sentons tous qu’il s’agit vient des convulsions d’un animal blessé a mort qui tente de pousser devant lui un bouc emissaire. Une Civilisation en voie de désintégration, au bord du gouffre de l’Histoire.
RESISTONS! RESISTONS! JUSQU’AU BOUT !!!
A peu près d’accord avec cet article, à l’exception du dernier passage : « en garantissant la viabilité pacifique d’un État palestinien qui ne menacerait plus son voisin israélien dans son être et dans son droit légitime à l’existence ».
Je répète ce que j’ai déjà écris dans ces mêmes colonnes : Y a t il un seul pays arabe qui s’inscrive dans une démarche démocratique garantissant la paix avec des voisins non musulmans ? Si oui, il faut le nommer explicitement immédiatement ; comment passer d’une population arabe palestinienne dont les 2/3 soutiennent les actions du Hamas et veulent l’éradication d’Israël en tant que pays du peuple juif, à une population arabe parfaitement pacifique ? Toutes les voies essayées depuis 30 ans ont échoué.
La seule solution réside dans la séparation physique et claire des 2 populations, au travers de frontières sans ambiguïté, soit le Sinaï au sud et le Jourdain à l’est.
mais pour y arriver, il faut d’abord que l’occident cesse de faire croire aux arabes palestiniens qu’ils peuvent encore rêver à un état imbriqué dans Israël, et qu’il cherche une solution unique dans les frontières d’Égypte et de Jordanie, au demeurant seul véritable état palestinien viable.
à l’origine , la Jordanie c’était la terre destinée aux Palestiniens, certains sont partis à la suite de 48, indépendance de l’état d’Israël et ils sont restés dans des camps car ils ne veulent pas évoluer et le roi de Jordanie , trouve qu’il a assez de Palestiniens chez lui et les Egyptiens ont peur qu’ils mettent le pays à feu et à sang .
que faire alors, les enfants palestiniens sont élevés dans la haine des juifs comme les autres pays autour .Aujourd’hui il est impossible de leur faire confiance après le massacre qu’a subit Israël