Ivan Morane. Le Procès Eichmann à Jérusalem – Dans le Cadre de la Journée Internationale en Mémoire des Victimes de l’Holocauste

En 1961, a lieu à Jérusalem le procès d’Adolf Eichmann, l’organisateur de la « solution finale ». Joseph Kessel le suit pour le compte du journal France-Soir et témoigne quotidiennement pour ses lecteurs mais aussi pour les générations à venir de l’inhumanité et de la lâcheté du personnage qui n’aurait fait qu’obéir aux ordres d’Hitler. Ivan Morane, dont une partie de la famille a été assassinée à Auschwitz, souhaitait, pour le dernier spectacle de sa compagnie, aborder la tragédie de la Shoah (catastrophe en hébreu), tel un devoir de mémoire, et rappeler ce que l’Homme, malheureusement, est capable d’accomplir. Kessel, à la fois journaliste et romancier, lui en donne l’occasion.

Sur scène, Ivan Morane est Kessel, qui se souvient et raconte. Il est juge ou avocat. Il est Eichmann, qui se débat ou se terre dans sa cage de verre, telle une araignée. Incontournable. À voir absolument.

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LE PROJET

« Le procès d’Eichmann » a été largement évoqué et commenté depuis près de 60 ans. Hannah Arendt, bien sûr, mais aussi d’autres ouvrages littéraires et historiques, le documentaire de Rony Braumann et la captation du procès lui-même, longue de plusieurs dizaines d’heures et visibles en ligne ou à Jérusalem.

L’objectif de cette théâtralisation des articles de Joseph Kessel est à la fois de faire entendre au plus grand nombre de spectateurs possible la vision et le ressenti de ce grand journaliste et écrivain que fut Kessel – et le regard si particulier et universel en même temps qu’il a porté sur ce procès -, mais aussi, à travers les mots de ce dernier, de rappeler que ce fut en Israël qu’eut lieu cet évènement après que les agents du Mossad eurent enlevé Eichmann qui se cachait sous une fausse identité à Buenos Aires.

De rappeler aussi, par les échanges entre Eichmann et le procureur ou les juges et que rapporte Kessel , ce que fut la shoah et comment le mal s’est mis à l’œuvre, à travers des êtres médiocres et lâches comme Eichmann.

Destiné aux adultes et aux scolaires, le spectacle fut créé, dans un premier temps, pour 21 représentations lors du Festival d’Avignon 2021. Une tournée nationale et internationale suivra  jusqu’en 2025. 

Le mot de Serge Klarsfeld

« Le texte de Kessel sur le procès Eichmann est en tous points remarquable : il allie la puissance de l’expression à la vision de ce que fut réellement le rôle d’Eichmann et sa personnalité, loin de la banalité du mal qu’a voulu imposer Hanna Arendt : Eichmann fut le véritable maître d’œuvre de la solution finale danstoute l’Europe sauf en Pologne et en Union Soviétique.

Kessel a perçu et exprimé l’essentiel de ce procès en quelques brefs et percutants articles.

L’adaptation théâtrale de ce texte juste et passionnant par Ivan Morane me paraît hautement souhaitable alors que l’on commémorera le 80e anniversaire de l’Occupation et que la déportation des Juifs de France est soulignée dans le procès et dans le texte ». © Serge KlarsfeldAvril 2019.

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LE PROCÈS EICHMANN À JÉRUSALEM

De Joseph KESSEL

Avec l’autorisation de la Croix-Rouge Irlandaise, ayant-droit de l’auteur

Adaptation, mise en scène et interprétation: Ivan MORANE

Et la voix de Shelomo Selinger lisant des extraits de son livre : « Nuit et lumière » *

Avec le soutien de la Fondation Rothschild, de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, de laSPEDIDAM et de l’aide au mécénat de Baudin-Châteauneuf

* Le sculpteur Shelomo Selinger, né en 1928 en Pologne, a été déporté en 1942 dans neuf camps successifs. « Nuit et lumière », coécrit avec Laurence Nobécourt, est paru chez Albin Michel en janvier 2021.

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NOTE DU METTEUR EN SCENE

« J’ai découvert en 2018 les articles que le romancier et journaliste Joseph Kessel a écrit pour le journal France-Soir en 1961 au fil des journées du procès d’Eichmann à Jérusalem.

Pour celles et ceux qui s’intéressent à ce qu’a été le procès de l’organisateur de la « solution finale », beaucoup de documents tant filmiques qu’écrits ont pu être consultés, visionnés, réfléchis. Bien entendu, « Eichmann à Jérusalem » d’Hannah Arendt est une référence incontournable. Mais en 1961, le reportage journalistique avait encore une force immédiate puisque l’image ne dominait pas encore toute l’actualité.

Et tout en connaissant déjà, et le déroulement, et les principales interventions des uns et des autres, etl’issue de ce procès, j’ai véritablement été happé par la théâtralité de ces articles de Kessel comme si je ne « savais » pas, comme si je redécouvrais tout !

J’ai alors immédiatement eu envie de tenter d’offrir cette théâtralité.

Les faits étaient regardés et décrits par un homme dont les origines rendaient tout ce pan de l’histoireinsupportablement proche, par un journaliste dont l’hypersensibilité les rendaient palpables, par un homme de lettres dont l’écriture est une tempête plus ou moins proche, plus ou moins sonore. Le comédien que je suis n’a rêvé, depuis cette lecture, que d’incarner cette langue et cette force.

Une incarnation qui n’est bien sûr pas celle des personnages, mais celle de Kessel les « racontant ». Chaque spectateur pouvant alors entendre « en creux » le ressenti et l’interrogation de Kessel sur tous les « personnages ».

Aucune « reconstitution » réaliste sur scène : un siège pour Kessel et la cage de verre dans laquelle « l’araignée Eichmann » se débat ou se terre.

Un spectacle non seulement pour que la mémoire ne disparaisse pas, mais surtout pour que notre rationalité continue de s’interroger sur l’inimaginable, sur l’horreur absolue, et aussi, de façon presque plus terrible encore, sur « l’humanité » du mal.

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« On peut juger Eichmann à Jérusalem, mais il est indestructible dans la nature humaine »

Julius Margolin. « Le procès Eichmann » 1961 – Ed. Le Bruit du Temps 2016

Le procès Eichmann à Jérusalem sera le dernier spectacle produit par ma Compagnie Théâtrale Réalités/Compagnie Ivan Morane.

Créé en 1982, elle a produit plus d’une cinquantaine de spectacles que j’ai quasiment tous mis en scène.

En 2022, la Cie aura 40 ans. J’en aurai 66. Il sera temps qu’elle s’éteigne.

Je continuerai, je l’espère, encore quelque temps de jouer comme comédien, d’être appelé comme metteuren scène, mais l’énergie incroyable qu’il m’a fallu dispenser pour créer, maintenir en vie et en action cettestructure pourra enfin retomber.

Le « dernier » spectacle de cette structure ne pouvait donc être un projet « parmi d’autres possibles ».

Fondée lorsque j’avais 26 ans dans le prolongement de la SCOP Compagnie Jacqueline Morane, crée par ma mère lors de son départ de la Comédie-Française, la liste des textes, des auteurs, raconte, malgrémoi, une « histoire », un « parcours » que je m’étais bien gardé de préétablir, choisissant les spectacles au gré des désirs, des possibilités financières et surtout de l’écho que ces textes représentaient pour moi face au monde.

Pour cette dernière production, c’est bien sûr différent. Mettre un point final à 40 ans de production théâtrale porte un sens, comme le dernier accord d’une œuvre musicale ou la dernière ligne d’un long roman. Un sens qui sera une « signature » que j’apposerai au bas d’une vie théâtrale qui aura été ma passion et à laquelle j’aurai tout donné.

Le sujet que je n’ai jamais eu le courage d’aborder parce qu’il me touchait trop profondément est celui de la Shoah et de la disparition d’une partie de ma famille à Auschwitz en 1942. C’est en pensant à eux, etpour eux, que j’ai inscrit ce projet à la dernière ligne de l’histoire de ma Compagnie. C’est aussi pour ceux qui en ont réchappé, marqués à jamais par la disparition d’une sœur, d’un frère, d’une tante, d’un oncle, d’un enfant. Et enfin pour mon arrière-grand-père Abraham Lazare Beresniak – l’auteur du premierdictionnaire yiddish/hébreu – qui mourut de chagrin fin 1942 après la mort en déportation de trois de sesneuf enfants.

Leur force, leur courage et leurs souffrances m’ont porté durant toute ma carrière, relativisant chaque jour ô combien les vicissitudes, les difficultés et les douleurs de la création.

Il m’était impossible de fermer cette Compagnie sans les rejoindre par le biais d’une scène de théâtre, et de les saluer.

Ivan MESSBERG-MORANE

Pour mes grands-tantes,

Rinka et Déa Messberg déportées à Auschwitz par le convoi n°14 Pour mes grands oncles,

Maurice, Meyer et Wolf Beresniak déportés à Auschwitz par les convois n°1 et 35 Puisse ce spectacle lesaider à trouver Lumière et Paix.

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À propos d’Ivan Morane

 Ivan Morane est né en 1956. Il est comédien, metteur en scène de théâtre, d’opéra et de grands spectacles, auteur sociétaire de la SACD, scénographe et éclairagiste.

D’abord régisseur son, régisseur lumière, régisseur de plateau, régisseur général, depuis 1971, il est comédien, puis assistant metteur en scène. Il signe en 1974 sa première mise en scène avec Faust de Goethe.

Il crée en 1981 le Mouvement Corneille et, en 1982 la Compagnie théâtrale qui porte son nom et qui sera soutenue de 1984 à 2012 par le Ministère de la Culture.

Entre les opéras, les pièces de théâtre, les grands spectacles et les concerts scénographiés, il a signé plus de quatre-vingts dix mises en scènes depuis 1974.

« Le Procès Eichmann à Jérusalem »: La Presse en a parlé


« Lehaïm !

Le procès Eichmann à Jérusalem

Par Marie Sorbier. Le 20 Juillet 2021

[…] Depuis Jérusalem, l’auteur livre des textes sensibles d’une puissance littéraireà faire pâlir les journalistes d’aujourd’hui mais dévoile surtout son regard d’une humanité endécalage avec la monstruosité que la justice des hommes doit juger. La langue est fluide, ciselée, pleine d’allant et se prête avec justesse à l’oralité ; les mots de Kessel et la présence d’Ivan Morane parviennent à faire théâtre.

Et si l’indicible parvient à nous heurter, si nous pouvons entendre ce que Kessel rapporte, c’est que la proposition scénique ne se laisse jamais encombrer par du pathos, un parti pris nimême un message. Le spectateur garde son libre arbitre ; la mort du coupable est-elle lasolution? Reste-on un homme quand on a exterminé avec application six millions d’êtreshumains? Ivan Morane grâce à tous les sentiments et la colère contenus permet à chacun, àla fois de prendre conscience de ce que le procès met au jour sur la banalité du mal etdémontre la puissance du théâtre. Car que faut-il pour laisser poindre l’émotion juste? L’art de l’acteur réside dans ce presque rien qui vaut tous les artifices. Et si ce spectacle,classique dans la forme, est essentiel, c’est qu’il parvient à délivrer frontalement une parole qui déplace.

Trop souvent dans nos pérégrinations théâtrales nous interrogeons la nécessité des propositions ; ici, tout est vital. [..;] Tout se termine par cette injonction, la seule, qui maintient l’espoir malgré tout, « la vie! » 


Le procès Eichmann à Jérusalem

Pour la dernière production de sa compagnie, Ivan Morane crée un spectacle bouleversant, d’une clarté et d’une maîtrise stupéfiantes. Il adapte pour la scène Le Procès Eichmann à Jérusalem relaté par Joseph Kessel, éclairant autant la dignité de la justice que le cas Adolf Eichmann.

L’histoire est hallucinante. L’accusé, qui se défendit en se présentant comme exécutant obéissant aux ordres, planifia avec un zèle enthousiaste l’assassinat industrialisé de tout unpeuple, « solution finale » du dénommé « problème juif ». [..;] En adaptant ce texte, Ivan Morane a pu enfin concrétiser un souhait qui lui tenait à cœur : aborder la Shoah sur un plateau de théâtre. […] L’importance de la parole, de la connaissance, de la transmission se révèle d’autant plus que sur la Shoah le silence et les non-dits ont longtemps tu d’immenses blessures. Un spectacle à voirabsolument, pour tous publics.


AVIGNON OFF 2021 – « LE PROCES EICHMANN A JERUSALEM » –

D’après Joseph Kessel – Adaptation, mise en scène et interprétation : Ivan Morane – Théâtre des Halles – du 7 au 30 juillet à 19h.

Rendre compte du procès Eichmann à Jérusalem d’après les articles de Joseph Kessel, adaptés, interprétés et mis en scène par Ivan Morane relève d’une gageure.

Pour Ivan Morane : « Il m’est indispensable d’accomplir cette œuvre de mémoire , face aux plus jeunes générations , de faire entendre la réalité de ce qu’est aussi l’homme parfois malheureusement ». Le projet est donc de théâtraliser ce procès et de fait c’est la première représentation à laquelle nous avons assisté dans le cadre du festival OFF d’Avignon en ce mois de juillet 2021. Une tournée nationale et internationale est prévue dès la saison 2022/2023.

Admirable monologue, interprété avec justesse, sans effets de prétoire, sobre. Tel est l’objectif de la mise en scène et la théâtralisation des échanges entre Eichmann dans sa cage de verre, et le procureur : Faire ressortir l’inhumanité, la médiocrité, la lâcheté du personnage, ce à quoi Ivan Morane nous a donné à voir une très grande maîtrise du texte.

Comment penser sa liberté en temps de détresse… La haine, et le pardon ?

A voir.


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