
L’école publique était chez moi une véritable religion, en dépit d’un parcours personnel plutôt chaotique. Je traîne un handicap, que je dois à l’incompétence d’une institutrice maternelle qui était proche de la retraite en 1953 et m’obligea, en douceur, à utiliser ma main droite en attachant la gauche avec un fil de laine.
J’ai compris beaucoup plus tard, trop tard, grâce à une thérapie. Je suis incapable de dessiner, mon écriture manuelle est épouvantable et la gaucherie de mes gestes m’a valu des ennuis tout au long de ma scolarité.
Heureusement, le service public était alors capable de rattraper un élève : exclu du lycée Charlemagne, en fin de 4ème, au motif d’un comportement « indigne d’un Carolingien », j’ai été récupéré par l’extraordinaire équipe du Collège d’Enseignement Général de mon quartier. La classe des pauvres !
J’ai ensuite réintégré le cycle long, et obtenu le bac philo.
Des années plus tard, mes enfants ont tous rencontré des problèmes dans un grand lycée public. Je n’aurais jamais imaginé avoir recours au privé, et pourtant ils ont tous terminé leur scolarité au lycée privé Edgar Poe.
Bien sûr, ce n’est pas Stanislas, c’est un établissement laïque. C’était financièrement un peu lourd, j’ai parfaitement conscience d’avoir fait bénéficier mes enfants d’une sélection par l’argent. Question de choix, à d’autres l’épargne, la bourse, la pierre et les voyages de rêve, nous avons investi pour nos enfants.
Au même moment, les dirigeants socialistes et les ministres de François Mitterrand expédiaient leurs rejetons à l’école alsacienne…
La dégradation de l’école publique a créé un enseignement à deux vitesses, renforçant ainsi la reproduction sociale. C’est évidemment inacceptable.
La décomposition de la République a commencé par l’école, qui n’assure plus l’égalité. La ministre de l’Éducation Nationale est tristement représentative des classes sociales supérieures. Elle a choisi de soustraire ses enfants à l’école publique.
L’exemple vient de haut, de François Mitterrand à Emmanuel Macron et Gabriel Attal, les plus hautes fonctions reviennent aux anciens élèves des écoles privées…
Or, il est désormais vital de donner à tous les enfants de la République une école gratuite et laïque, et donc de reconstruire totalement le système scolaire. La catastrophe scolaire creuse les fractures culturelles, sociales, et last but not least, religieuses, qui minent déjà la société française.
Il ne suffit pas de dire que l’école est la priorité du gouvernement, il faut une volonté politique. Nous en sommes loin.
© Guy Konopnicki
Né après, du côté de La Place de la Nation, sur la Ligne 9 du métro parisien, sensible Au Nouveau chic ouvrier, ce qui n’interdit pas l’Eloge de la fourrure et moins encore celui de La France du Tiercé, Guy Konopnicki redoute Le silence de la ville, s’inquiète de La gauche en folie, assume La faute des Juifs et avoue avoir un peu évolué depuis Le jour où De Gaulle est parti… Ces titres et quelques autres le définissent, romancier et journaliste, Konop dans la Série Noire et Chroniqueur à Marianne.