Tribune Juive

Georges Benayoun. OUI OUI fait de la géopolitique

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Le monde de la culture! Rien que ça. Moi j’ai plutôt lu un tract de la chambre syndicale de la bijouterie fantaisie, un enfilage de perles aussi laborieuses et pathétiques les unes que les autres. Et particulièrement dégueulasses. On soulignera la qualité de certaines signatures -Eric Cantona, vraiment-, on se désolera de la présence de talents respectés, on ne s’étonnera pas de celle des forcenés de la passion anti-juive, on pleurera la récidive inexcusable d’amis égarés -deux fois, ça certifie la bêtise-, mais on remarquera que beaucoup d’artistes signataires de l’appel à la marche pour la paix ne se sont pas fait avoir une seconde fois.

On ne va pas perdre (trop) de temps à analyser, dans le détail, un texte fat et inutile. Juste quelques points. « Nous nous lèverons, nous manifesterons, nous écrirons, nous interpellerons, nous nous réunirons… »

Bigre! Israël n’a qu’à bien se tenir s’il ne veut pas subir les foudres de ces soldats de la morale à sens unique. Parce que, c’est bien d’Israël, ce coupable absolu, dont il s’agit. De Hamas, seul responsable des malheurs de son peuple, aucune mention. La charge est univoque: « L’inacceptable politique d’apartheid », « système cruel de domination et de crime contre l’humanité ». Les mots ont été choisis pour faire mal. Ils n’abîment que leurs auteurs et soulignent leur ignorance et leur inculture crasse. Renvoyer l’insupportable victime d’hier au statut inespéré de bourreau d’aujourd’hui, participe à leur exaltation, à s’auto-designer centre d’importance. « Nous condamnons », « nous exigeons, nous ne céderons pas, nous rejetons », « nous dénoncerons »… on imagine la jubilation.

Et ce n’est pas, en fond de texte, en essayant de se rattraper in extremis sur les massacres du 7/10, qu’ils donnent le change. Bien au contraire, ils s’enfoncent et sombrent. « Nous sommes horrifiés par la mort de plus de 1 200 Israéliens le 7 octobre et la prise d’otages, pour lesquels nous appelons au retour immédiat. Nous partageons l’immense douleur de toutes celles et ceux confrontés à des pertes injustes ».

La « mort »? Non! Un pogrom génocidaire, les massacres d’enfants qui émeuvent seulement quand ils ne sont pas juifs, les féminicides, les viols, les tortures, les démembrements, la crémation. « Pertes injustes »? Parce qu’il y aurait, concernant les seuls juifs, des pertes acceptables et d’autres qui ne le seraient pas? Une rhétorique éprouvée et malodorante que la présence de certains signataires, en flirt prononcé avec la haine du juif, confirme.

S’indignant à deux balles dans un réflexe pavlovien, ce monde de « culture » dont ils se revendiquent s’est depuis longtemps éloigné de la pensée au profit d’une parodie émotionnelle ordinaire.

Reste une question, pourquoi cette obsession d’Israël, du Juif?

© Georges Benayoun

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