« Le petit blond de la casbah », d’Alexandre Arcady

Bon

 lundi 

« Le petit blond de la casbah »

 Film d’Alexandre Arcady

   Avec Michel Boujenah

 Pascal Elbé

Jean Benguigui

Je vais souvent au cinéma et je crois être  en mesure d’identifier un bon film. 

Même si cette notion est parfois considérée comme très subjective. 

   Des goûts et des couleurs, dit- on…

 N’empêche…

   Le succès signe en général une presque unanimité qui démontre que nous sommes tous sensibles aux mêmes paramètres…

Quand on est accompagnée d’une amie exigeante qui sort du cinéma le coeur serré d’émotion et qui  avoue avoir connu un grand  plaisir à voir ce film, on se sent moins seule.

Moins seule ? pourquoi ?

 Ben parce qu’il semble que les distributeurs qui ont visionné cette autobiographie d’Alexandre Arcady

aient serré les lèvres, pincé le nez, et déclaré l’opus irrecevable.

 Quoi?

 Un film sur un petit pied noir qui replonge dans ses racines ?

  Qui recherche les paillettes que l’Algérie faisait danser devant ses yeux ?

  Pffffff….

 Blackboulé, Arcady !

  Ce qui, pratiquement,signifie qu’aucune grande salle ne le propose aux spectateurs, UGC et Pathé l’ayant disqualifié sans regret..

 Il passe à Paris au Drugstore Publicis,  cinéma appartenant à Sophie Dulac, petite-fille de Marcel Bleustein-Blanchet qui possède également le Majestic Passy  qui héberge le « CineClub Yiddish pour tous » une fois par mois.

Bref…

Le mot « juif » ne terrorise pas Sophie Dulac.

  Vous me suivez. 

   Le film est une pure autobiographie.

Pas de message subliminal. 

  Simplement, la description de ce qui est arrivé à un petit juif d’Algérie, et à des milliers d’autres – juifs ou pas juifs du reste.

   Un ressenti…

   Un vécu…

 Et quand ces Sépharades sont arrivés, les Ashkénazes  biberonnés aux turpitudes nazies et aux familles décimées ont regardé avec sidération ces tribus qui avaient pensé à décrocher un morceau de soleil qu’ils charriaient dans leur nostalgie et leur amertume  et qui présentaient au  monde une image  joyeuse, bruyante, solidaire, généreuse, portant leur judaïsme en bandoulière et peu  rompus  aux circonvolutions ashkénazes pour prononcer le mot « juif »…

  Mais ces familles souvent tapageuses, expansives, ces filles belles comme des astres et ces play boys aux yeux de braise n’avaient pas  gravé dans leur mémoire que la plage et les saladiers de couscous fumant embaumant des chabbats pleins de  cris et de rires …

 Beaucoup d’entre eux avaient laissé, outre une partie de leur coeur, des biens qu’ils se sont attaché à retrouver en France à la sueur de leur front. 

Après avoir souvent partagé de minuscules appartements où ils cohabitaient en famille souvent élargie…

La France aidait ses concitoyens  de là-bas à hauteur d’un préjudice évalué à la louche.

Parfois  juste à la petite cuillère.

Sans compter le traumatisme de la guerre d’Algérie pour ces Français habitués à une coexistence plutôt pacifique où ils s’épanouissaient en général assez bien et n’envisageaient pas de quitter ces bleus qui étoilaient la rétine…

  Une coexistence brutalement broyée par les exactions dont la  symétrie renvoyait dos à dos ces communautés autrefois si paisibles…

  Et le film raconte tout ça…

    En pire, car la famille est dysfonctionnelle…

  Le père, un hongrois alcoolique et paresseux, ne subvient que piteusement aux besoins de sa famille ( 5 garçons), la mère fait le gros dos, soutenue par sa sœur, sous le regard de sa propre mère qui ressemble plus à une mauresque locale ( campée par un incroyable Jean Benguigui déguisé en femme) qu’à une métropolitaine estampillée française par le décret Crémieux.

 Et l’un des cinq enfants, qui deviendra  plus tard Alexandre Arcady, dénote avec ses cheveux d’or et ses yeux bleu azur dans ce paysage d’enfants aux peaux et aux yeux couleur de raisins séchés au soleil …

  Patrick Mille incarne magnifiquement Arcady adulte, revenu présenter son film dans une Algérie asphyxiée, éteinte, où il recherche désespérément les étoiles que sa mémoire fait danser devant ses yeux.

 C’est sa petite histoire mêlée à  la grande Histoire de la France et de l’Algérie qu’il nous raconte dans ce récit mélancolique qui fait perler des larmes  d’émotion et  même -on peut le dire- des vrais pleurs…

  Rien de grandiose ni de grandiloquent dans ce film, juste un quotidien heureux vu à hauteur d’enfant dans un pays qui exhalait un bonheur simple, puis la violence d’une guerre qui laissera des traces indélébiles et le chaos miséreux qui pose ses ombres sur une terre qui peine à se reconstruire…

Un beau film vraiment. 

Qui mérite d’être soutenu.

Malgré le silence et le mépris indignes qui le mutilent injustement…

 Chaque jour apporte son lot d’informations apocalyptiques sur les victimes et les otages dont ni une mairie ni une chaîne de télévision n’a jugé bon d’exposer les portraits…

   Des otages français, certes, mais pas français comme…

  Enfin, vous voyez, hein…

    Je vous embrasse

© Michèle Chabelski

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