Yossi s’est levé ce matin. Il a pris son petit déjeuner, et, avant d’aller au boulot, il a consulté son téléphone. Mais il ne s’est jamais présenté au travail car il a filé à l’enterrement d’un inconnu.
Et puis, au retour, il a vérifié où en était la cagnotte qu’il a créée pour soutenir les soldats au front, et, comme ses fils l’attendaient pour planifier la cueillette de demain, qui va permettre à un agriculteur de souffler un peu, il a appelé son boss pour lui annoncer qu’il finirait les tâches journalières cette nuit, depuis la maison.
Tamar, elle, ne s’est pas levée tôt. Hier, elle a terminé un peu trop tard la afrashat hala qu’elle a organisée avec plus de cinquante femmes présentes et il a fallu tout ranger. Mais c’était pour la refoua chelema du hayal dont elle ne connaît que le nom, alors qu’importe la fatigue. Même si c’est vrai qu’avec son mari et ses deux fils au front, ça fait beaucoup. Sur le papier.
Mais elle sourit en pensant au couscous géant qu’elle prépare pour chabbat pour la base d’à côté de son village. Les hayalim vont se régaler, et elle, ça la fait kiffer.
Tamar n’est pas femme au foyer, ni cuisinière de métier, mais responsable des ventes dans une grosse start up. Mais, depuis 3 semaines, elle est juste Tamar.
Dévouée et simple, comme Yossi, au service du peuple.
Ces deux personnes extraordinaires gagneraient à être présentées au monde entier. Comme un exemple d’humanité, de dévouement et de citoyenneté.
Mais dans un pays où tout le monde est un Yossi ou une Tamar, quel intérêt? Tout ce que vous voyez d’extraordinaire, multipliez-le par dix, par cent, par mille et vous serez encore tellement loin de la vérité.
Aujourd’hui, la pluie est tombée, la première fois depuis trois semaines où on peut, en restant dehors, pleurer discrètement, sans faire peur aux enfants. Mais riez aussi. C’est notre identité.
Am Israël haï.
© Bernard Zanzouri
Tellement vrai et bouleversant !