L’historien dénonce l’islamisation de la cause palestinienne et la dimension sacrale de la lutte contre Israël. Ils voient dans l’antisionisme radical le “gauchisme islamisé des imbéciles”.
En 1955, Raymond Aron publiait “L’Opium des intellectuels”, où il soumettait à un examen critique impitoyable le système des croyances dogmatiques des intellectuels de gauche de son temps, marqué par la séduction qu’exerçait le totalitarisme communiste. Après le nazisme et le lénino-stalinisme, (prolongé par le maoïsme), un troisième totalitarisme a fait irruption dans l’histoire mondiale : l’islamisme. Mais s’il y a aujourd’hui une idéologie islamiste et un islamisme-mouvement, un empire islamiste mondial n’existe pour l’heure que dans les rêves de ses partisans.
Dans la réalisation de leur projet d’islamisation de tous les pays, malgré quelques succès (de l’Iran à l’Afghanistan), les islamistes en sont encore au stade de la conquête des esprits, dans les populations musulmanes du monde entier comme dans les secteurs des populations non musulmanes susceptibles de croire aux principaux mythes de la propagande islamiste. L’un d’entre eux est celui du musulman victime d’une “islamophobie” portée et diffusée par les nations occidentales et par Israël.
Mythologies délirantes à la ligne
Du musulman-victime au Palestinien-victime, le pas est rapidement franchi. C’est pourquoi, loin de se réduire à une revendication nationaliste comme une autre, la cause palestinienne s’est islamisée pour se transformer en cause des causes : “cause principale des Arabes”, “cause universelle” des gauches révolutionnaires (marxistes, tiers-mondistes, altermondialistes et décolonialistes), cause islamique justifiant le djihad, etc. Et, puisque le sionisme est assimilé par les antisionistes à une forme de racisme et à un colonialisme, la défense de la cause palestinienne prend place parmi les objectifs des mobilisations antiracistes. Le nouvel opium des intellectuels, en France, dérive d’un petit nombre de mythologies contemporaines, fabriquées sur la base d’idées fausses ou douteuses, voire délirantes. Ces mythologies de notre temps se croisent et se renforcent mutuellement, pour assurer à leurs adeptes un confort intellectuel et moral. On peut y voir les composantes de la vulgate antisioniste et prétendument antiraciste d’aujourd’hui.
En premier lieu, la thèse de la substitution : l’islamophobie aurait historiquement remplacé l’antisémitisme en Europe. L’antisémitisme ne serait donc plus qu’un phénomène résiduel, un ensemble de survivances, alors que l’islamophobie représenterait la véritable menace. Corrélativement, la mémoire de la Nakba [“Catastrophe” en arabe, désigne l’exil forcé de Palestiniens lors de la création d’Israël, en 1948, NDLR) est cultivée afin de relativiser et de “passéiser” la mémoire de la Shoah.
En deuxième lieu, la confusion, entretenue par les islamistes et leurs alliés gauchistes, entre la critique et le rejet de l’islamisme, même sous ses formes djihadistes, et l’islamophobie en tant que racisme antimusulman impliquant la haine de l’islam.
En troisième lieu, la prétendue explication sociologique ou plus exactement sociologisante : l’islamophobie serait la cause principale de l’islamisme radical. Les djihadistes tueur de Juifs et de “mécréants” seraient des stigmatisés, des exclus, des discriminés et des révoltés ; bref, des individus à plaindre et à “comprendre”. Ces terroristes, emportés par leur juste colère, n’auraient guère péché que par quelques bavures, au demeurant inévitables. Mais on doit leur accorder des circonstances atténuantes.
En quatrième lieu, la diabolisation d’Israël et des sionistes, accusés de “massacrer” les Palestiniens “innocents”, mais aussi d’être à l’origine de la désintégration des États au Proche-Orient et de la montée en puissance des organisations djihadistes. Le “complot sioniste”, “américano-sioniste” ou “occidentalo-sioniste” expliquerait tous les malheurs des Arabes et des musulmans. Corrélativement s’est diffusée la vision compassionnelle des Palestiniens, lesquels en tant que “victimes” titulaires, monopolisent la capacité d’indignation de la majorité des intellectuels de gauche, engagés ou non dans le militantisme antisioniste.
En mars 2012, l’islamo-terroriste Mohamed Merah, pour justifier l’assassinat d’enfants juifs, avait déclaré vouloir “venger les enfants palestiniens”. Le mythe du meurtre rituel chez les Juifs, cette invention du XXIIe siècle dans l’Europe chrétienne, a été intégré dans la culture antijuive du monde musulman, pour devenir un thème d’accusation contre les sionistes, criminalisés en tant qu’”assassins d’enfants palestiniens”. Dans la dernière guerre de Gaza, déclenchée par l’attaque djihadiste meurtrière du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, le thème de l’assassinat d’enfants palestiniens par Tsahal a aussitôt été réactivé par la propagande palestinienne et ses relais partout dans le monde.
Zombies indifférents
Pour comprendre la récente vague antijuive mondialisée, il faut commencer par reconnaître sa matrice théologico-politique islamiste. Ce qui caractérise aujourd’hui l’antisionisme radical, c’est le fait qu’il a été islamisé. L’État juif, visé au premier chef par le djihad, est voué à la destruction. La haine des Juifs a trouvé sa nouvelle cible, et l’israélicide est au programme. En témoigne la prophétie menaçante du fondateur des Frères musulmans, Hassan al-Banna, qu’on trouve citée dans le préambule de la charte du Hamas, (rendue public en août 1988) : “Israël s’élèvera et restera en place jusqu’à ce que l’islam l’élimine, comme il a éliminé ses prédécesseurs”. La prophétie est régulièrement répétée par les prédicateurs musulmans participant à la propagande palestinienne.
Dans la perspective de la judéophobie islamisée, la présence juive sur une terre musulmane est intolérable, comme l’énonce l’article 28 de la charte du Hamas : “Israël, parce qu’il est juif et a une population juive, défie l’Islam et les musulmans”. L’antisionisme radical ainsi islamisé revient à dépolitiser le conflit israélo-palestinien. D’où l’appel au djihad énoncé dans l’article 13 de la charte : “Il n’y aura de solution à la cause palestinienne que par le djihad”. C’est cette djihadisation de la “résistance” palestinienne qui suscite un fol enthousiasme dans les milieux islamo-gauchistes. Le Parti des Indigènes de la République a tweeté le 7 octobre 2023 : “Gloire à la résistance palestinienne”. Et le lendemain : “La Palestine vaincra, et sa Victoire sera la nôtre”.
La cause palestinienne continue de jouer le rôle d’une nouvelle “cause du peuple” ou d’une “cause prolétarienne” mise au goût du jour. Mais la vision islamiste apocalyptique du “combat final” contre les Juifs, censés incarner l’ennemi absolu, voire le Mal, confère une dimension sacrale à la lutte contre Israël et le “sionisme mondial”. La charte du Hamas en témoigne. À travers l’islamisation de la cause palestinienne, nouvelle cause sacrée, et la “sionisation” polémique du Juif, la lutte contre les Juifs redevient la voie de la rédemption.
Il y avait naguère, dans les deux dernières décennies du XXIè siècle, le “socialisme des imbéciles”. Il y a aujourd’hui le gauchisme islamisé des imbéciles, c’est-à-dire l’antisionisme radical. Les premiers se réclamaient d’un socialisme national menacé d’être corrompu par les Juifs, les seconds s’inspirent d’un victimisme à visage islamique. En France, les premiers criaient “Mort aux Juifs !” Et “La France aux Français”, les seconds crient aujourd’hui “Mort aux Juifs !”, “Sionistes assassins !” et «”Mort à Israël !”, slogans ponctués d’”Allahou akbar” proférés par leurs compagnons de combat islamistes.
Face à ces appels au meurtre purificateur au nom d’Allah comme au nom de l’anticolonialisme et de l’antiracisme, ces intellectuels de gauche applaudissent bruyamment, ou bien, en consommateurs d’opium, se bouchent les oreilles et se cramponnent à leurs utopies consolantes et impolitiques, oscillant entre le pacifisme et l’égalitarisme. On ne saurait attendre d’eux, zombies indifférents aux massacres commis par le Hamas en Israël, qu’ils s’émeuvent des souffrances endurées par les victimes palestiniennes de la dictature islamiste À Gaza.
© Pierre-André Taguieff
En ne nommant pas ces fascistes par leur nom, PAT ajoute de la confusion a la confusion. Il est d’ailleurs très confus dans ses prises de position. D’un côté il dénonce l’islamisme, le wokisme, l’antisémitisme, le racisme anti-blancs et le racialisme. De l’autre il défend les USA et nos gouvernements européens qui sont (au même titre que Mélenchon) devenus les promoteurs de tout ce qu’il dit combattre. Il ne semble pas avoir compris que défendre les USA, la GB et l’UE revient de facto a défendre l’islamisme, le wokisme etc…Le discours sur une prétendue “islamophobie” est encore plus porté par les médias, les universités Anglo-saxons, français et européens que par ceux des pays musulmans dans leur ensemble. En haut de l’article il fait allusion à l’Afghanistan tombe aux mains des islamistes, mais…la faute a qui ? Qui a arme et finance les islamistes afghans a la fin des années 70 et pendant les années 80 ? Les USA et l’Angleterre. D’où vient BLM ? Des USA. Qui propage le plus de Fake news au sujet de la France et de la prétendue “islamophobie ” qui y regnerait ? Les médias anglo -saxons, du New York Times et du Washington Post a The Guardian en passant par CNN et la BBC. Pour qui les plus dangereux islamistes et antisemites ont appelé a voter des deux côtés de l’Atlantique ? Pour Joe Biden et Emmanuel Macron.