Yael Bensimhoun. Entre deux alertes j’ai rêvé

Entre deux alertes, cette nuit, j’ai rêvé qu’on pouvait remonter le temps. Oh pas de 100 ans … De seulement 24 heures. Chouette rêve. 

“Soyez prêts! ” criait une voix. “N’allez pas là bas “, disait une autre . Et quelques-uns de ces visages   entraperçus trop rapidement à la télé hier soir, parce que morts ou portés  disparus, murmuraient un vague merci ou chantaient Simhat Thora. 

Mais la sonnerie stridente et de plus en plus inquiétante a retenti, ramenant tragiquement  le temps à son heure et dans ma tête,  l’horreur du jour précédent.

A moitié endormis , mon plus jeune fils et moi  courons pour la énième fois à  l’abri.  Juste à temps. Les explosions cette fois encore sont terrifiantes. Pas étonnant,   l’immeuble adjacent au mien est touché.  L’hôpital aussi.

Mon fils et moi échangeons  un regard. “Maman, je peux venir dormir à côté de toi ?” me dit- il en franchissant le seuil de la maison.

Mes larmes se  mettent  à couler. Demain il repartira à sa base. Cette même base située à la frontière de Gaza, prise d’assaut il y a  une vingtaine d’heures par des terroristes assoiffés de sang et qui ont tué son camamarade de chambrée. Par miracle mon Yehonatan avait eu une permission exceptionnelle pour ce shabbat.   Il a échappé à l’horreur mais son cœur saigne depuis l’annonce et il lui tarde de rejoindre ses compagnons. 

Je retrouve alors les gestes d’antan, quand il était enfant et que je lui caressais la tête en lui chuchotant que les sirènes, bien sûr,  “ce n’est rien”. Car mon garçon  a 20 ans et comme tous nos jeunes de 20 ans, il est né sous les bombes . 

Un bip. La lumière de mon téléphone vient de s’allumer.  Un message de mon autre fils, mon aîné.  “Voilà, je suis en route, ils m’ont appelé”, dit la légende d’une  photo d’un beau jeune homme en uniforme. “Je t’aime maman.”

Je t’aime aussi, mon fils. Tellement. 

Que toutes les prières et l’amour des mamans fassent vite revenir nos soldats et que D.ieu veille sur nous tous. 

© Yael Bensimhoun