Au pas de l’oie.
Bravo, bravo, Paris, on n’y croit pas…
Donc la municipalité aime l’ordre, la similitude, l’unifié, l’unitaire, l’uniforme.
Plus de boîtes de bouquinistes sur les quais, on le savait déjà, ça fait désordre.
On coupe aussi de ci de là pas mal de ces arbres centenaires pour planter de tout petits arbres tout neufs et bien plus écologiques, c’est naturel.
Mais maintenant on va un peu plus tirer au cordeau. Notre Colbert municipal, notre Napoléon III de la chaussée vient en son génie organisationnel de penser.
Désormais, vive le diktat, fini le singulier, le particulier, le fantaisiste, l’original, le scandaleux, on fait dans l’esprit second empire, ce « temps de liberté » où tous les fonctionnaires devaient avoir la même coupe de barbe et les professeurs pas de barbe: on coupe, on taille, on norme, on interdit.
Car désormais sur nos Champs Élysées, tous les cafés, tous les restaurants, toutes les terrasses vont devoir arborer la même couleur un joli vert, pas du tout vert de gris, ouf, nous voici rassurés, et le même mobilier pour les tables, les chaises, les parasols, les stores – fini le rouge de tel élégant bistrot! Au pas! Du vert! – en revanche on ne sait pas encore si les serveurs devront porter la même vêture ni si la soupe servie devra avoir la même texture ou l’entrecôte le même poids et la même origine. Bravo!
Finie la pagaille à la française, maintenant ce sera Berlin 1935 ressuscité à Paname, fini les inventaires à la Prévert, désormais ce sera l’esthétique à la Ceausescu, et on espère très fort très vite le col Mao pour tous. Vive la pensée sociale.
(On ne sait pas encore si les nombreux sans abris devront aussi uniformiser leurs cahutes de fortune. Un oubli?)
© Jacques Neuburger
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