En cette veille de Roch Hachana, permettez moi de partager avec vous un enseignement de notre père le Grand Rabbin Alain Abraham Goldmann Zatsal qui aurait eu 92 ans aujourd’hui 14 septembre ou en date hébraïque le 3 Tichri (Tsom Guedalia)
Il a écrit ce texte en 2009 alors que la fête de Roch Hachana tombait ,comme cette année, un Shabat et un dimanche.
« Une page se tourne : Roch Hashana »
Cette année, Roch Hashana, début de notre année religieuse, sera particulière, puisqu’elle débute et coïncide avec le jour du Chabbat. Il nous faudra à présent attendre jusqu’en 2020, soit onze années, avant que ne cela ne se renouvelle de la même manière.
Certes, il nous faut accepter le calendrier tel qu’il se présente, mais il faut convenir que cela est bien plus facile de concilier une vie professionnelle, quelle qu’elle soit, lorsque les fêtes religieuses se présentent comme en cette année 5770.
Le fait que le premier jour de Roch Hashana ait lieu un Chabbat, a une particularité qui ne peut manquer de nous interroger.
En effet, nous savons que cette solennité constituant le début des dix jours de pénitence – assereth yemé techouvah, est généralement marquée au cours de l’office du matin par les sonneries du CHOFFAR, corne de bélier nous rappelant le sacrifice d’ISAAC..
Si l’on est empêché d’assister à un office public, on peut entendre les sonneries réglementaires chez soi. Mais le chabbat, il est interdit de sonner le CHOFFAR.
Il s’agit là d’un interdit remontant déjà à l’époque du Temple de JERUSALEM (Roch Hashana 29 b).
La raison de cet interdit nous semble difficile à comprendre.
La Bible nous dit pourtant : « Au septième mois, le premier jour du mois, il y aura pour vous convocation sainte ; vous ne ferez aucun œuvre servile (MELEKHETH AVODAH). Ce sera pour vous le jour de la Fanfare (TEROUAH) (NOMBRES XXIX, 1). Mais cette prescription formulée par la Torah se trouve amendée par un texte de la Michna disant : « Lorsque Roch Hashana coïncide avec le Chabbat, le Choffar ne peut être utilisé qu’à l’intérieur du Temple, mais nulle part ailleurs » (Roch Hashana – Chapitre 4 – michna 1).
Pour justifier sa position, le Talmud se fonde sur un autre verset de la Torah disant : « Le premier jour du mois, aura lieu pour vous un repos solennel ; commémoration par une fanfare, (ZIKHRONE TEROUAH), convocation sainte » (LEVITIQUE XXIII, 24). Ce dernier verset nous permet de comprendre la position rabbinique selon laquelle, s’il est interdit le Chabbat de sonner du CHOFFAR, il nous est possible d’en mentionner l’usage à l’intérieur de notre Rituel de prières, ce que nous ferons cette année par exemple.
Il nous semble utile et intéressant de rappeler ici les significations des diverses sonneries généralement entendues. Elles sont de trois sortes : la TEKIAH, sorte de staccato d’un seul son, les CHEVARIM, trois sons brisés comme des gémissements, et enfin la TEROUAH, composée de neuf sons brefs ressemblant à des sanglots. L’on doit être admettre que tout cela exprime d’une certaine manière les sentiments profonds qui sont les nôtres, lorsque nous sommes face au Juge Suprême auquel nous remettons notre destin en ce jour de Roch Hashana.
En allant plus au fond des choses, il nous faut savoir ce que ces différentes sonneries ont à faire avec notre solennité ? Rappelons que Roch Hashana est considéré dans la Tradition Juive comme étant l’anniversaire de la création du monde. Nous venons alors proclamer notre Foi selon laquelle le Tout-Puissant nous assurera l’existence d’un monde de perfection et de paix, un havre harmonieux. Cela est expressément indiqué dans la prière du MOUSSAF, dans une série de textes lus pour accompagner les sonneries de TEKIAH au cours desquels nous disons : « Que toutes tes œuvres, Seigneur, reconnaissent que tu es leur Créateur ; que toute créature te rende grâce de son existence, et que tout ce qui respire proclame que l’Eternel, D.ieu d’Israël, est Roi, et que sa royauté domine tout ».
C’est à ce passage de notre prière que résonne la sonnerie de la TEKIAH comme pour exprimer notre exaltation et notre Foi optimiste en la Providence divine.
Mais cet optimisme est malheureusement tempéré par les autres sonneries relevant des gémissements ou des sanglots qui peuvent nous gagner lorsque nous contemplons l’état du monde dans lequel nous vivons.
Il est loin d’être idyllique ou paradisiaque et nous plonge dans la terreur et l’angoisse. Nous semblons très éloignés d’un ensemble de nations faisant promesse de fidélité à un D.ieu de justice, de compassion et de paix. Le monde est un lieu de corruptions, de guerres et de bombes humaines.
C’est une véritable vallée de larmes. Nous le constatons chaque jour.
Nous avons donc toute raison à Roch Hashana de pleurer devant D.ieu et de lui exprimer notre souffrance, pour qu’Il se souvienne de nous et nous aide à nous régénérer moralement et spirituellement.
C’est le sens qu’il convient de donner à la série de sonneries appelées TEROUAH
Lorsque le Shabbat coïncide avec Roch Hashana, une autre motivation vient en ligne de compte
Le Chabbat est une sorte d’avant-goût du monde futur, un jour de paix et d’harmonie nous permettant d’entrevoir ce qui peut éventuellement se produire dans les jours de rédemption. Roch Hashana constitue une promesse de Rédemption alors que celle-ci est déjà réalisée par le Chabbat. Mais en fait, celle-ci n’est pas du tout réalisée si l’on observe notre Histoire, faite du sang et des larmes du sacrifice des juifs.
On doit se souvenir notamment de nos millions de morts victimes de la Shoah, et de toutes les victimes du terrorisme aveugle endeuillant nos familles.
Quand la différence entre l’espoir de bonheur et la réalité des malheurs quotidiens est trop flagrante, c’est alors le silence qui s’impose, comme dans le cas du Grand-Prêtre ARON ayant tragiquement perdu deux de ses fils et ayant gardé le silence sans marquer de révolte. « VAYDOM AHARON », dit le texte. Il nous a montré la voix permettant de continuer à croire.
C’est donc le silence qui s’impose dans nombre de situations.
Nous remarquerons que lors de chaque circoncision, il est d’usage de réciter un verset tiré du Prophète EZECHIEL qui proclame ceci : « BEDAMAYIKH ‘HAYI – vis dans ton sang, vis dans ton sang » (XVI, 6). Or le mot DAM – le sang vient de la même racine que DOM – se taire, faire silence. Ce fut le cas d’ARON comme pour tous ceux qui ont connu des tragédies, pour lesquelles la réponse la plus digne apportée aux bourreaux et aux agresseurs reste le silence. Car il n’y aura jamais assez de mots ni de termes assez forts pour exprimer notre douleur.
C’est peut-être là le sens qu’il convient de donner à ce premier jour de Roch Hashana où il nous est interdit de sonner le CHOFFAR pour ne pas violer le caractère sacré du Chabbat. Il nous faut malgré tout, faire ce qui est en nos moyens pour participer à l’instauration d’un monde meilleur, fait de Paix et de Fraternité.
Chana Tova Oumetouka. Que l’Eternel vous accorde à tous Sa bénédiction. »
Chana tova à tous
Une guérison complète pour tous les malades et en particulier Chalom ben Hai , Haim ben Mazal Tov et David Ben Yossef
© Ariel et Alain Goldman Zl
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