Un jour d’automne de l’année passée … Je guidais une retraite spirituelle à Ouirgane dans le Haut Atlas… À 40 km de l’épicentre du séisme …
À la fin de la journée, nous partions mes stagiaires et moi … En tout 7 femmes et moi … dans une randonnée… Et au détour d’une colline … On croisa une vieille femme Amazighe qui surveillait ses chèvres et chantait des airs mélancoliques …
Les filles ont adoré et elles voulaient lui parler … Elle accepta … Et j’ai fait le traducteur…
Après quelques minutes de discussion, elle invita tout le monde à prendre le thé … dans sa maison en haut d’une petite colline.
Elle prépara le thé et posa sur la petite table du pain fait maison , Amlou, du miel, et des noix d’Imlil …
Les filles étaient étonnées par la générosité de cette vieille femme … Puis elle commença à parler de sa vie difficile mais joyeuse …
Elle avait traité les filles comme si c’étaient ses propres filles … Elle leur touchait les cheveux comme si elle les connaissait depuis toujours … et leur donnait des conseils de beauté pour avoir des « yeux d’anges » … Car « l’Amour passe souvent par le regard », disait-elle.
Le soleil commençait à décliner et on demanda la permission de partir. Lalla aicha nous accompagna jusqu’au chemin en bas de la colline sur une centaine de mètres et avant de la saluer pour partir … naturellement les filles cotisèrent entre elles et lui tendirent 2000 dhs …
Lalla aicha refusa catégoriquement… et leur dit : « Je suis peut-être pauvre par rapport à vous mais je ne suis pas une mendiante … J’ai fait mon devoir comme le faisaient mes ancêtres depuis la nuit des temps: nourrir les voyageurs qui passent à côté de la maison ».
Puis elle se tourna vers ses chèvres … Elle appela la plus âgée d’entre elles … « taskurt » …
Taskurt vint vers elle et toutes les autres chèvres la suivirent et Lalla aicha dirigea le petit cheptel vers un petit enclos, rentra chez elle et ferma la porte …
Les filles, quant à elles, restèrent bouche bée devant la générosité et la dignité de cette vieille femme… et sur le chemin du retour… un silence monacal s’abattit sur le groupe …
Le soir au dîner … je leur expliquai la mentalité des Amazighs et leur sens inné de la générosité et du partage … et que le fait de vouloir payer la générosité… était perçu comme une insulte … d’où la réaction de Lalla aicha …
Hier soir … une de ces filles qui avaient participé à la retraite de ouirgane, haut cadre dans une multinationale, m’a appelé… pour avoir des nouvelles de Lalla aicha … après le séisme …
Puisque elle n’avait pas de téléphone, je décidai de monter à Ouirgane aussitôt pour voir si elle était toujours vivante …
J’arrive à Ouirgane … Je cherche le chemin difficilement … Je me faufile entre les arbres et tout d’un coût la petite colline de Lalla aicha apparaît … Mais pas la maison … Mon cœur palpite à vive allure … Je me suis dit … que certainement elle était décédée … Je m’approche encore .. et là il n’y avait plus l’ombre d’un doute … La maison est par terre. Les chèvres sont encore là, ensevelies sous les décombres… J’ai lâché une larme … Me suis assis sur un petit rocher pour méditer et prier pour cet ange terrestre : Lalla aicha …
Je restai quelques minutes les yeux fermés … Tout d’un coup … Je sentis quelqu’un me taper sur l’épaule gauche … J’ouvris les yeux … C’était un homme d’un certain âge …
« Vous n’êtes certainement pas de notre village … Puis-je vous aider? » Il me parlait en darija …
Je lui répondis en berbère: « Je suis venu voir ce qu’elle est devenue Lalla aicha ? »
Lui : » Sa maison est détruite et son petit cheptel est décimé… Mais Lalla aicha est vivante »
Je ne croyais pas ce qu’il disait …
Puis il ajouta … que le soir ou il y avait eule séisme … elle était chez sa fille en bas du village et là-bas la maison avait tenu bon …
Le miracle a de nouveau fonctionné pour cette vieille femme … Et quand j’ai raconté le sort de cette femme à toutes les filles qu’elle avait accueillies chez elle avec tant de tendresse et de générosité, elles ont décidé à l’unanimité qu’on finance ensemble la reconstruction de sa maison et l’achat d’un nouveau cheptel …
Demain je vais rencontrer Lalla aicha pour lui transmettre cette bonne nouvelle …
Et comme dit l’adage : « Tout passe … et cela aussi finira par passer ! »
Azul !
O’Louzi
Amoon
Militant amazigh marocain, Omar Louzi est issu d’une grande famille de résistance contre le colonialisme: nombre de membres de sa famille subirent les exactions et autres atteintes graves aux droits de l’Homme commises pendant les années de plomb par l’Etat marocain.
Omar Louzi, (Anmoon), Chamane Berbère, est Coach-Thérapeute. Il est Directeur de Wellness TV et Co-Fondateur de « Yoga pour Tous«
Svp un nr tel pour joindre Omar louzi