Maxime Tandonnet. Réflexions relatives aux déclarations de M. Pap N’Diaye sur Europe 1, Cnews et l’extrémisme de droite

Entretien pour Atlantico avec M. Rafael Amselem



Pap Ndiaye, le ministre de l’Education, s’en est pris à CNews et Europe 1 qu’il a récemment qualifié de médias « d’extrême droite ». Des déclarations qui n’ont pas manqué de le fragiliser, d’autant qu’Elisabeth Borne elle-même a fini par se désolidariser de son ministre… Avant d’être retoquée par le chef de l’Etat. Comment comprendre ces revirements ? A quel point est-ce problématique ?

Ce pataquès se comprend par l’extrême confusion idéologique qui prévaut dans la sphère présidentielle et gouvernementale. On touche ici au paroxysme du « en même temps ». Le président Macron vient du parti socialiste, probablement de la gauche influencée par Terra Nova qui préconisait l’abandon des références au peuple et à la classe ouvrière pour un alignement sur le multiculturalisme dans un rapport fameux de 2010. Mais pour être élu président de la république en 2017 à la faveur de l’explosion en plein vol de la candidature Fillon, et réélu en 2022, il a opté pour le « de gauche et de droite ». La nomination de M. Pap N’Diaye l’an dernier à la place de M. Blanquer était un coup de communication en faveur de son aile gauche avant les législatives pour séduire une partie de l’électorat mélenchoniste. Cependant, les déclarations de M. pap N’Diaye sur Cnews et Europe 1, qui expriment sa qualité d’homme de gauche, jettent la confusion au sein du pouvoir qui ne sait plus sur quel pied danser.

Effectivement Pap N’Diaye a bien le droit de dire ce qu’il veut mais est-il vraiment anodin qu’un ministre de la république attaque des rédactions entières en les accusant d’être mauvaises pour la démocratie ?

M. Pap N’Diaye n’est pas un responsable politique expérimenté. Il est un universitaire qui ne semble pas avoir d’expérience de la direction d’une structure. Il a été nommé là au titre d’un coup de communication destiné à mettre en valeur la connotation progressiste du pouvoir macronien à un moment donné dans le but d’équilibrer la parole droitière qu’est censé incarner M. Darmanin. Or, M. Pap N’Diaye n’a sans doute pas pris toute la mesure de ce qu’était un ministre de l’Education nationale, responsable d’une administration d’un million de personnes. Les émeutes ne sont pas en faveur de ses thèses favorables à la société multiculturelle. Dès lors, il s’est laissé emporter en ciblant les parfaits boucs émissaires habituels, les médias, en l’occurrence CNews et Europe 1 en utilisant les termes habituels de la gauche morale dans sa chasse aux sorcières, la parfaite formule diabolisante : extrême droite. Cela n’a rien d’anodin. L’extrémisme en général, le vrai, commence par la remise en cause de la liberté de presse et de la liberté d’expression. M. Pap N’Diaye a ainsi exprimé, sans vraiment le vouloir, la nuance liberticide du pouvoir actuel. En démocratie libérale, l’Etat n’a pas vocation à contrôler des médias indépendants ni à leur décerner un brevet de légitimité. En pratiquant le chasse aux sorcières envers des médias non étatiques, en les diabolisant sous la formule « extrême droite », un ministre de l’Education nationale sort de son rôle.


Indépendamment du fond même, n’y aurait-il qu’Emmanuel Macron a avoir le droit de s’inquiéter de décivilisation ? Que Gérald Darmanin à faire un lien entre immigration et délinquance ? Ou à trouver Marine Le Pen molle dans la lutte contre l’islamisme ? La majorité s’arroge-t-elle le droit de parler de certains sujets qui seraient qualifiés d’extrême droite dès lors qu’ils sont évoqués par d’autres ?

Le macronisme est une idéologie étrange qui donne le sentiment de vouloir incarner la pensée unique et disposer d’une sorte de monopole du bien et de la vérité, de la gauche à la droite. Cette tentation s’exprime dans la sublimation ou l’adoration du chef qui atteint un niveau sans précédent dans la Ve République. Il ne supporte pas d’être débordé sur ses ailes, droite ou gauche. La Nupes est devenue à gauche une sorte de mal absolu comme, à l’inverse, tout ce qui lui dispute la place à droite. Ainsi, quand certains constats ou certaines déclarations s’inscrivent à l’aune d’une allégeance macroniste, ils bénéficient d’une sorte d’imprimatur. Les mêmes propos, exactement les mêmes, venus d’autres horizons, privés de l’estampille « camp du bien » sont voués aux gémonies et renvoyés au mal absolu : extrême droite ou extrême gauche.

Que disent et que valent, selon vous, ces accusations incessantes en « extrême droite », qui sont évoquées régulièrement ? Et de la tendance de l’exécutif à sortir du champ de la République ses adversaires politiques ?

Oui les formules extrême droite mais aussi, à un moindre degré, extrême gauche, sont une forme d’excommunication. Nous sommes en post-démocratie, vivons dans un régime de totalitarisme doux. Les opposants ne sont bien entendu pas déportés, emprisonnés ou massacrés comme dans les régimes totalitaires européens du XXe siècle. En revanche, ils sont exclus du champ de l’expression légitime. « L’extrémisme » est assimilé à complotisme, populisme, climato-scepticisme, xénophobie, etc. La parole de l’opposant est ainsi considérée comme illégitime, porteuse de scandale, indigne, monstrueuse. Elle rompt avec le tolérable, l’acceptable. Elle est hors du champ de la raison. Elle doit donc être maudite, rendue inadmissible. Et c’est le « bien macroniste » qui trace la limite de la parole acceptable et non acceptable. Cette vision se retrouve dans le champ politique. Il existe un bien suprême, éclairé, détenteur de la vérité et face à lui ne doivent subsister que des extrémismes. En 2027 aux prochaines élections nationales, ce bien suprême, post national, post frontières, élististe, anti-peuple, doit se retrouver (à travers le successeur de M. Macron, non rééligible) au second tour face au mal absolu. Et l’emporter haut la main. Telle est la logique du système politico-médiatique et tout ce qui tendra à la contester sera inévitablement diabolisé, traité en épouvantail.

© Maxime Tandonnet

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5 Comments

  1. Le systeme au pouvoir a mis en reserve le  » macron bis » j ai nommé le sieur Philippe qui fut opportunement retiré de son poste de premier ministre pour former un parti bidon et prendre la suite du fantoche actuel .
    Finalement grace au contexte favorable , le systeme a maintenu son pantin actuel 5 ans de plus .
    Nous verrons donc Edouard Philippe  » affronter  » la Le Pen de service et devenir automatiquement le prochain pantin aux ordres du systeme .
    C est y pas beau le democratie française ?

  2. Mr Tandonnet est lui-même complètement empêtré dans le politiquement correct. Pourquoi ne dit-il pas tout simplement que Pap Ndiaye est un raciste notoire et que sa seule présence au gouvernement suffirait à discréditer la totalité de ses membres et de LREM ?

  3. L’extrême droite existe et est même majoritaire…Simplement vous ne la voyez pas la où elle est la plus présente…cad l’idéologie dominante. Il y a 50 ou 40 ans les indigénistes et pseudo « insoumis » auraient été qualifiés de fascistes purs et durs. Tout comme Ursula von der leyen et les actuels dirigeants de l’UE. Pourquoi n’est-ce plus le cas aujourd’hui ? Parce qu’ils sont devenus dominants au point de se faire passer pour le camp du bien.

  4. En dehors de quelques internautes, pas un seul commentateur n’est capable de nommer les choses par leur nom ! « A une époque d’imposture universelle, dire la Vérité est un acte révolutionnaire. » (Orwell)

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