Bon
Mardi
Et cette lancinante question de Facebook :
“À quoi pensez vous ce matin?”
Et par habitude, comme tout le monde, je réponds:
“Ben à toi , mon chéri”!!
Et là je me rends compte que ce n’était pas la réponse escomptée.
C’est Facebook, quoi.
Pas l’amoureux éploré qui craint qu’une seule de vos pensées n’ait pris le large vers… allez savoir quoi… et qui s’interroge, inquiet ou même jaloux…
Le “À quoi tu penses” signifie en fait:
“C’est toujours moi en gros plan sur la photo, dis? Entouré de ces ombres insignifiantes qui gravitent autour de toi et aspirent l’oxygène que tu pourrais intégralement me réserver ?”
Quand on vit avec quelqu’un qui vous demande:
“À quoi penses tu?”, Il est exclu, je dis bien, exclu, de dire la vérité.
Surtout si on veut éviter une guerre intestine, y’en a assez à l’extérieur…
On ne répond donc pas:
“Faut que je prenne rendez vous chez l’esthéticienne. Demi -jambe, ça suffira, je pense. Le reste, on verra avant les vacances…”
Ça coupe l’ambiance érotico matutinale qui soude les amoureux en faisant hisser les couleurs comme un trouffion dans la cour de la caserne …
Ni:
“J’ai oublié d’acheter ta mousse à raser”.
En fait, on affirme : “Ils étaient en rupture de stock..
En rupture de mousse à raser?.
Chez Carrefour?
Oui.
Le camion a dérapé et s’est renversé…”
Regard mi – incrédule mi- courroucé…
Pour faire bonne mesure et ajouter un rien de réalisme :
“Le chauffeur est mort…”
Il hoche la tête, très partiellement convaincu..
Ni non plus:
“J’ai pas envie de claquer une fortune pour l’anniversaire de ta mère. Faut que je trouve un truc pas cher qui fasse de l’effet…
Chez Gifi? Tiens, c’est une bonne idée, ça!!
Tenez Sylvie.. .J’ai trouvé cette balayette bleue lavande… Assortie à vos yeux… et créée par Balenciaga pour les 30 ans de la marque…”
De quoi allumer le feu de l’increvable snobisme qui fait vibrer Sylvie…
Ni non plus:
“J’ai acheté des pompes au prix d’un studio à Central Park”.
Celles-là, ils ne les soldaient pas.
Le petit hic, c’est qu’elles ne sont pas exactement de la même taille que mes pieds..
Mais en même temps, si on vise la compatibilité totale, on limite ses chances dans la vie…
Pas plus que:
“Je peux pas préparer le dîner, mon vernis n’est pas sec…
Toute façon j’ai pas fait les courses non plus…”
À quoi on ajoute, un rien perfide :
“Tu les as faites, toi?”
Elle est cruelle, celle-là, rapport à la charge mentale, voyez- vous… Cette idée 2.0 qui fait du compagnon un associé à part entière de la gestion ménagère…
Ils ont voulu l’égalité, ben ils l’ont…
Évitez aussi :
“La banquière m’a appelée: ça sent le roussi…
Les intérêts du découvert vont peser sur le week-end à Ibiza…
Et quand je dis peser…
C’est presque un synonyme d’écrabouiller…
Le mieux, c’est que j’y aille avec Marion. Un de ses potes pourra nous loger…
Toi t’aimes pas dormir chez les gens…”
Interdit aussi :
“J’ai brûlé ta chemise bleue…
Et fait déteindre ton polo vert…
Il est devenu chartreuse…”
Y a des mots plus poétiques que d’autres…
Caca d’oie par exemple, c’est pas poétique…
Pas non plus:
“J’aime pas ta soeur… j’ai jamais osé te le dire…
J’en ai marre de l’entendre se vanter d’avoir des yeux de chat…
Elle en a surtout les griffes…
Et je trouve qu’elle ressemble plutôt à une hyène…”
Éviter aussi :
“Notre fille arrête ses études. Elle a rencontré un street artist…
Un quoi?
Un mec qui fait le trottoir…
Notre fils est amoureux de sa prof de gym… Elle est enceinte.
Il dit qu’il a quand même 18 ans…”
Version 2.0 de la même histoire:
“Notre fils est amoureux de son prof de tennis. Un très beau mec.
Ils vont bientôt se marier”.
Vous comprenez donc pourquoi c’est beaucoup plus sûr de répondre:
“À toi, mon chéri!!!”
Que cette journée vous offre des réponses à toutes vos questions, des solutions à tous vos problèmes et la capacité de tout endurer sans stress et en douceur, dans le doux cocon de l’amour et de l’amitié.
Je vous embrasse
© Michèle Chabelski
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