Rémi Ferrand. Ce rire sur les video d’émeutes, ce rire on le reconnaît

Image tirée du livre Max et Moritz (1865) illustrant l’expression Schadenfreude 

Nanalyse

Ce qui me choque et m’impressionne beaucoup sur les différentes vidéo d’émeutes que nous voyons ces jours ci tient dans la bande-son qui les accompagne.

Je m’explique. La plupart de ces vidéos sont tournées par des émeutiers eux-mêmes ou bien par des gens présents sur la scène qui commentant ce qu’ils voient.

Et que la vidéo montre un pillage, une agression, un dégradation c’est presque toujours les mêmes commentaires qui ressortent.

La pauvreté de vocabulaire aidant, c’est presque toujours les mêmes mots :

– Wesh (×4 ou 5)

– Whallah (x3)

– J’y crois pas !

– C’te dinguerie !

– Le dééélireeeee…

Et ça tourne en boucle. Cette litanie n’étant interrompue… que par des rires.

Car tout le monde s’exclaffe dans ces vidéos.

On rit à gorges déployées. On rit d’un rire gras, qui vient de la gorge et où roulent des R comme on le ferait avant de cracher.

Et ce rire on le reconnaît

Et ce rire on le reconnaît.

C’est le rire du chahut qui a pourri tant de classes et fait renoncer tant de professeurs.

C’est le rire de la meute parce que le rire n’est pas solitaire et il est difficile de ne pas penser alors aux hyènes.

C’est la culture du lazi et de l’irréverence qui veut faire tomber tout et ne propose rien.

C’est le rire des harceleurs.

C’est le rire des violeurs qui crachent sur la femme qu’ils viennent de piétiner et qui s’éloignent.

C’est le rire des tortionnaires qui ajoutent l’insulte à la souffrance comme on ajouterait du sel dans une plaie à vif.

C’est un rire de malfaisance pure.

C’est un rire appris et partagé.

C’est le rire du mal.

Et l’on a envie soudain de réécouter l’adresse de ce vieux moine imaginé par Umberto Eco et Jean-Jacques Annaud qui nous avertissait dans “Le nom de la Rose” :

“- Le rire est un souffle diabolique qui déforme les ligaments du visage et fait ressembler l’homme au singe…”

Pour une fois, et pour une fois seulement, on aurait presque envie de lui donner raison.

© Rémi Ferrand

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