« Chagall et moi ! » : cinq regards d’artistes sur le créateur du « Message biblique »

Des artistes d’aujourd’hui, tous domaines confondus, se confrontent au peintre mystique et onirique pour fêter les 50 ans du musée qui porte son nom, à Nice.

musée Chagall Nice

Marc Chagall, esquisse pour « Le Paradis », 1961. © RMN-GP / Gérard Blot © ADGAP, Paris 2023

Musée Marc Chagall. Nice

« Peut-être dans cette Maison viendront des jeunes et des moins jeunes chercher un idéal de fraternité et d’amour tel que mes couleurs et mes lignes l’ont rêvé. » Le 7 juillet 1973, dans un discours vibrant, ode à l’universalité et au dialogue spirituel, Marc Chagall inaugure, le jour de ses 85 ans, le musée qui porte son nom à Nice. Dès 1952, en assistant à la construction de la chapelle du Rosaire à Vence (Alpes-Maritimes), dessinée par Matisse, il avait imaginé à son tour un lieu de recueillement, pour lequel il réalisa nombre d’esquisses inspirées de la Bible. Le projet, prévu sur le site des Chapelles de Vence, fut finalement abandonné, au profit d’une donation à la France du cycle du Message biblique.

Vingt ans plus tard, le rêve de Chagall ressuscite à Nice, à deux pas des arènes de Cimiez, où André Malraux, le ministre des Affaires culturelles de l’époque, a fait bâtir une « maison des arts pour tous » : un écrin sur mesure qui abritera les œuvres octroyées à l’Etat par le peintre – plus de 500 pièces au total, parmi lesquelles des tableaux, des gravures, des croquis, des sculptures. C’est alors le premier musée national consacré à un artiste en vie.

Chagall
Marc Chagall, « Dieu crée l’Homme », estampe originale, 1931-1934. / © RMN-GP / Gérard Blot © ADGAP, Paris 2023

Marc Chagall est mort en 1985, mais son musée, qui souffle ses cinquante bougies cet été, est bien vivant. En cette année de célébration, Anne Dopffer, la maîtresse de maison, donne carte blanche, en trois épisodes, à des créateurs d’aujourd’hui qui livrent leur vision du maître. Ce deuxième volet (visible jusqu’au 4 septembre) voit ainsi l’écrivain et traducteur de la Bible Frédéric Boyer, associé au dessinateur Serge Bloch, retraduire en images et en mots le Message biblique à partir des travaux sur la Création et le Paradis en les confrontant au texte fondateur. Un exercice réjouissant, comme lorsque le tandem s’interroge sur l’apparition d’un ange dans La Création de l’Homme qu’on ne retrouve pas dans le livre saint.

Serge Bloch
Serge Bloch, « Un ange court », vitrophanie, création digitale pour le musée national Marc Chagall, 2023
© Courtesy de l’artiste. 2023

« La démarche du peintre est similaire à celle du parfumeur »

Plus loin, un opus musical pour violoncelle du jeune compositeur Ilia Osokin fait écho au vitrail de La Création du monde, via un dispositif de spatialisation sonore quadriphonique. Dans une salle adjacente, c’est une autre partition qui se joue. Jean-Claude Ellena y propose une expérience sensorielle au visiteur : contempler la série du Cantique des Cantiques en humant les senteurs que le parfumeur a concoctées pour chacun des cinq tableaux. Note commune aux flagrances, la rose est ici mixée à la vanille et à la fève tonka (Doux est mon repos) ou au patchouli et à l’ambre (A Vava, ma joie et mon allégresse – Vava, c’est Valentina, la femme de Chagall). « Je me suis rendu compte que la démarche du peintre est similaire à celle du parfumeur : d’abord, les grands traits, les figures importantes, puis l’ajout de détails pour rendre l’œuvre plus pertinente », commente le célèbre nez.

Keong-A Song
Keong-A Song, série Main à main, 2023. « Souvenir du nid. 1887-1907 : l’enfance à Vitebsk ». / 
© Courtesy de l’artiste. Production musées nationaux du XXe siècle des Alpes- Maritimes, 2023.

Originaire de Séoul, l’illustratrice Keong-A Song, compose, quant à elle, une Main à main, constituée de douze dessins et d’une sculpture de papier, autour des lieux de vie et des expériences de voyage de Marc Chagall. 

Délicatement colorées, ses productions à l’encre de Chine et à l’aquarelle mêlent personnages fantastiques, postures circassiennes, objets du quotidien et éléments paysagers, empruntés au lexique narratif et symbolique de l’artiste, à l’instar de Souvenir du nid qui évoque son enfance à Vitebsk dans l’actuelle Biélorussie. Chagall l’avait lui-même écrit : « Tous ces sujets font partie du pays dont je viens, et ces choses, sans aucun doute, ont laissé en ma mémoire visuelle une plus profonde impression que toutes les autres que j’ai pu recevoir. »

© Letizia Dannery

https://www.lexpress.fr/culture/art/chagall-et-moi-cinq-regards-dartistes-sur-le-createur-du-message-biblique-G6UWML6AHNE53GXA7HVQBPRRBY/

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