TRIBUNE. Quatre anciens chefs militaires ou diplomatiques israéliens estiment que leur pays doit s’engager pour une solution à deux États afin de protéger sa démocratie mais aussi sa sécurité.Par Matan Vilnai, Tamir Pardo, Ami Ayalon et Nimrod Novik*
Du haut de ses 75 ans, Israël peine encore à définir son caractère et son projet. À l’intérieur du pays, des centaines de milliers de personnes descendent dans la rue chaque semaine depuis plus de quatre mois afin de protester contre le projet du gouvernement de faire passer des « réformes » qui, si elles sont promulguées, feront d’Israël une démocratie illibérale. À ses portes, faute de définir quel avenir il envisage avec ses voisins palestiniens de Gaza et de Cisjordanie, Israël navigue entre des cycles de violence de plus en plus fréquents contre le premier territoire et l’annexion rampante du second.
Ainsi, la seizième opération israélienne dans la bande de Gaza en moins de vingt ans a débuté le 9 mai par des frappes visant des responsables du djihad islamique palestinien, en réponse au tir de plus d’une centaine de roquettes vers Israël la semaine précédente. Nommée « Bouclier et flèche », elle a duré cinq jours, jusqu’à ce que les bons offices de l’Égypte permettent d’obtenir un nouveau cessez-le-feu.
Du côté israélien, elle a renforcé la confiance de la population dans les capacités exceptionnelles des services de sécurité du pays, sur le plan opérationnel comme sur celui du renseignement. Des deux côtés, elle est venue rappeler le prix constamment payé par des civils innocents de part et d’autre de la frontière entre Israël et Gaza.
Idéologie messianique
Cependant, avec le tir de plus d’un millier de roquettes en direction de localités israéliennes, ce nouveau cycle d’affrontements rappelle également que l’armée israélienne n’est pas en mesure, à elle seule, de résoudre le problème gazaoui et que les problèmes de ce type ne se prêtent pas à des solutions exclusivement militaires.
Ces événements mettent en évidence le fait, qu’à l’heure où tous les regards sont tournés vers le mouvement de contestation intérieur et la situation politique interne particulièrement difficile, le front palestinien exige néanmoins une attention constante. Comme la preuve en a été faite à maintes reprises à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem, les détonateurs sont partout, capables de déclencher une nouvelle vague de violence à tout moment.
C’est pourquoi, après avoir consacré une grande partie de notre vie adulte à défendre Israël dans les sphères militaire, diplomatique et du renseignement, nous tirons la sonnette d’alarme pour deux raisons : les attaques portées contre les institutions et les valeurs d’Israël, sous couvert de « réforme judiciaire », menacent notre démocratie, et l’absence de décision quant à notre projet national à l’égard des Palestiniens précipite le glissement vers une « formule » à un État, enlisé à jamais dans un conflit sans issue, une réalité qui menacerait à la fois notre sécurité et notre identité juive.
Cette inquiétude est partagée par l’ensemble des 500 membres du mouvement des Commandants pour la sécurité d’Israël (CIS), tous anciens généraux et hauts responsables de l’armée israélienne, de la police et des services de sécurité intérieure (Shin Beth) et extérieure (Mossad), ou ex-hauts fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères.
Nous considérons tous la menace pesant sur notre démocratie comme le point culminant d’un processus militant conduit, entre autres, par des extrémistes déterminés à annexer la Cisjordanie. Pour la première fois de notre histoire, leurs dirigeants, pétris d’idéologie messianique, siègent au sein de notre gouvernement. Le combat en cours autour de l’âme d’Israël fait converger nos deux engagements de toujours : en tant que citoyens, en faveur de la démocratie israélienne, et en tant que hauts responsables militaires à la retraite, au service de la sécurité du pays.
Annexion rampante de la Cisjordanie
Nous sommes parvenus à la conclusion que la séparation entre Israéliens et Palestiniens est nécessaire pour assurer la protection de tous. Nous jugeons de surcroît, à la lumière de notre expertise en la matière, que les dispositifs de sécurité nécessaires à notre défense peuvent être négociés et mis en place dans le contexte de la séparation voulue entre les deux peuples. Quatorze millions de personnes vivent entre le Jourdain et la mer Méditerranée : 7 millions de Juifs et 7 millions d’Arabes. Deux scénarios sont dès lors envisageables : la séparation dans le cadre d’une solution définitive à deux États ou un conflit sans fin dans le cadre d’un État unique.
La poursuite de l’annexion de facto de certaines parties de la Cisjordanie conduira inévitablement à l’effondrement de l’Autorité palestinienne, déjà fragile aujourd’hui. Israël se trouvera alors confronté à un choix cornélien : laisser le Hamas, profitant de la vacance du pouvoir, s’emparer des territoires concernés, ou bien réoccuper la totalité de la Cisjordanie afin de l’en empêcher.
Dans les deux cas, il est peu probable que le calme se maintienne dans la bande de Gaza, ce qui obligera Israël à la réoccuper également. Nous nous trouverons alors face à une alternative désastreuse : accorder des droits égaux à tous les Palestiniens, sacrifiant, ce faisant, le caractère juif du pays, ou les priver de ces droits, renonçant alors à sa nature démocratique.
Nous ne nous faisons aucune illusion : les conditions de la solution à deux États, que nous appelons de nos vœux, sont loin d’être réunies. Il est néanmoins crucial de préserver la viabilité de cette option, d’abord et avant tout en inversant la tendance en faveur de l’annexion rampante, et en voie d’accélération, de la Cisjordanie. Par ailleurs, il est impératif qu’Israël définisse sa frontière orientale, de préférence dans le cadre de négociations, mais à défaut de manière unilatérale.
Une fois celle-ci définie, tous ceux qui résident à l’intérieur du périmètre relevant de notre souveraineté doivent jouir de la totalité des droits consacrés par notre Déclaration d’indépendance. Au-delà de cette frontière et jusqu’au Jourdain, l’armée israélienne continuera à assurer la sécurité jusqu’à ce que des arrangements répondant aux besoins d’Israël soient négociés et mis en œuvre.
Pas de solution militaire
Soyons clairs : le CIS, dont nous sommes membres, n’est pas un mouvement partisan. Étant cependant au fait des défis rencontrés par notre pays en matière de sécurité et de ses capacités dans ce domaine, nous sommes parvenus à trois conclusions. La première : nous sommes plus forts que tous nos adversaires. La seconde : comme l’a une nouvelle fois démontré l’opération « Bouclier et flèche », il n’existe pas de solution militaire permettant de résoudre notre conflit avec les Palestiniens. La troisième : pour qu’Israël n’ait à renoncer ni à sa sécurité, ni à son caractère juif, ni à sa nature démocratique, nous devons parvenir à un accord qui réponde à nos besoins en matière de défense, mais qui garantisse aussi la souveraineté et la dignité des Palestiniens.
Dans cette perspective, le combat actuel pour la défense de notre démocratie coïncide avec notre mission première, celle de faire advenir la fin de l’occupation. Nous sommes convaincus qu’Israël est suffisamment fort pour prendre les risques nécessaires, que les risques inhérents à l’absence de séparation sont bien plus importants que les risques associés à une solution finale à deux États et que c’est la seule voie qui vaille la peine d’être empruntée pour l’avenir de notre pays. Nous croyons qu’il ne peut y avoir de sécurité sans démocratie et que notre démocratie ne saurait être pérenne tant que nous occuperons un autre peuple contre son gré.
Nous voulons espérer que les amis d’Israël à travers le monde partagent cette analyse, fondée sur notre expertise en matière de sécurité, de la double menace qui pèse sur notre pays. Nous apprécions leur soutien à l’égard de tous ceux qui sont déterminés à défendre notre démocratie et à préparer la voie à un règlement du conflit avec les Palestiniens. Et nous sommes certains que notre vision, celle d’un État d’Israël recherchant inlassablement la paix avec ses voisins et ne renonçant sur son sol ni à sa sécurité, ni à son caractère juif, ni à sa nature démocratique, finira par l’emporter.
(*) Matan Vilnai, général de division (à la retraite), a été chef d’état-major adjoint de Tsahal, vice-ministre de la Défense, membre du cabinet des Premiers ministres Ehud Barak et Benyamin Netanyahou et ambassadeur d’Israël en Chine. Il préside le mouvement des Commandants pour la sécurité d’Israël (CIS). Ami Ayalon, amiral (à la retraite), a été directeur du service de sécurité intérieure israélien (Shin Bet) et commandant de la marine israélienne. Tamir Pardo, général de brigade (à la retraite), a été directeur du service de renseignement extérieur israélien (Mossad). Dr Nimrod Novik a été ambassadeur spécial et conseiller diplomatique du Premier ministre Shimon Peres.
Annexion rampante ? Que nenni ! Cette annexion ne concerne que LA ZONE C QUI SELON LES ACCORDS D’OSLO SONT SOUS L’ENTIÈRE ADMINISTRATION ISRAÉLIENNE. En zone B et C, sous l’occupation de l’OLP selon lesdits accords, et où habitent près de 2millions d’arabes, aucun juif n’a le droit d’y habiter !!! De plus, imaginez un État palestinien gouverné par le Hamas, comme à Gaza, à partir duquel des roquettes seraient tirées depuis la toute proche Judée Samarie…
Je pense que ces généraux à la retraite, dont on ne connaît que trop bien leurs origines culturelles, leur déconnexion cultuelle, et leur laïcisme exacerbé, et qui ne représentent qu’une petite minorité de la population, restent contaminés par la doctrine occidentale de la solution dite « à 2 états », qui cache en fait une solution à 3 états, ce qui trahit de leur part une inculture historique flagrante de l’histoire de leur propre pays.
En effet, la référence historique incontestable demeurant la Conférence de San Remo en mai 1920, la SDN (ex ONU) instituait le partage de la Palestine mandataire en 2 états : un état arabe à l’est du Jourdain, et un état juif de la mer au Jourdain.
Les arabes ont choisi d’appeler leur état non pas Palestine, mais Transjordanie, puis Jordanie ; les Juifs ont choisi d’appeler leur état Israël.
Les Juifs ont décidé d’accepter des non-Juifs dans leur état, les arabes ont décidé d’exclure tout Juif de leur état?
Pourquoi faudrait-il encore partager l’état des Juifs en 2 ?
Les arabes qui sont prêts à reconnaître Israël comme état du peuple juif et à le respecter en tant que tel, sont les bienvenus, les autres doivent être les bienvenus dans leur état arabe, de l’autre côté du Jourdain.
M. Dassault disait : « un bon avion est d’abord un bel avion » ; de même, on pourrait dire : « une bonne solution est d’abord une solution simple ».
La » separation » reste globalement une illusion .
Meme avec les frontieres de 1967 ( ingerables et indefendables) il reste 2 millions d arabes dans le pays .
Donc du point de vue de notre defense » physique » je prefere garder la main sur l ensemble de la region , de la mer a la frontiere jordanienne , qui comprend , bien sur , non pas 2 mais 6 millions d arabes et permettre a notre armée de maitriser les frontieres avec les dictatures environnantes , plutot que de me retrouver sourd et aveugle dans un territoire croupion ( 17 km de profondeur au niveau de natanya) avec 2 millions d ennemis potentiel dans le dos, ou plutot sur le trottoir d en face , pour que nos amis français se figurent mieux la situation .