RFI et le ministère de la Culture: « Au départ les Palestiniens sont les Philistins »

Les Palestiniens se voient conférer une légitimité douteuse dans « Les mots de l’actualité », que RFI présente comme « Une chronique pétillante de trois minutes qui explique les mots, leur origine et leur contexte ». 

Le français facile est un podcast proposé par « Radio France internationale » (RFI) en partenariat avec la Délégation Générale à la Langue française et aux Langues de France (DGLFLF) qui dépend du ministère de la Culture. C’est donc sous ce couvert d’éducation, et avec le soutien des pouvoirs publics, que le mot décortiqué ce 31 mai dans la chronique tenue par Yvan Amar était : « Palestine ».

L’introduction nous renseigne sur le choix du mot du jour : « La Palestine, à l’affiche d’une exposition à Paris, nous ramène à l’ambiguïté du mot dans la géopolitique contemporaine ». L’exposition en question, intitulée « Ce que la Palestine apporte au monde » et lancée ce même 31 mai, se tient à l’Institut du monde arabe. Nous avons donc affaire à une opération de promotion de la cause palestinienne, et pour cela tout les moyens sont bons : une petite chronique radiophonique d’apparence anodine permettra certainement d’amplifier l’écho.

Sachant cela, il était permis d’être dubitatif avant d’écouter le podcast. Cela s’avèrera très vite justifié…

Le message prend vite une tournure politique : « Parler de Palestine, indirectement, c’est donc plus ou moins revendiquer la légitimité d’un Etat qui porte ce nom ». C’est exactement ce que fait cet article, sous prétexte d’éducation. La langue française n’est ici pas le sujet, elle est instrumentalisée pour servir de véhicule à une cause.

Le podcast prend ensuite un ton professoral, avec une leçon d’histoire qui commence sur un postulat :  « Le mot Palestine, lui, est très ancien ». Eh oui, car pour revendiquer une légitimité, l’ancienneté ça compte. Et le problème, c’est que les Juifs ont habité la région depuis quelques milliers d’années. L’ancienneté du terme Palestine pourrait-elle rejaillir sur les Palestiniens et renforcer leur légitimité ?

« Dans l’Antiquité, [le mot Palestine] désignait d’abord la région côtière située autour de Gaza ». C’est totalement faux, puisque s’il y a bien eu une « Philistie » à l’époque où la côte était peuplée par les Philistins, ce peuple d’origine probablement grecque qui s’y était établi un millier d’années avant les Romains (la racine P-L-S-T signifiant « envahisseurs »), Philistie n’est pas Palestine.

« Mais ensuite, pendant une très longue période, la Palestine, cette dénomination a été plus ou moins abandonnée, même si parfois on parlait de Syrie-Palestine jusqu’au début du XXe siècle. Et en 1919, à la fin du premier conflit mondial, la Palestine, c’est comme ça qu’on l’appelle, est placée sous mandat britannique ».

Alors là, c’est le grand mélange. Du temps des Romains, la région constituait une province qui s’appelait la Judée. Les Romains durent mater les rébellions de la population juive locale et, en l’an 135 à l’issue de la révolte de Bar-Kokhba, l’empereur Hadrien jugea nécessaire de couper le lien des Juifs avec leur terre inscrit dans la toponymie. C’est ainsi qu’il rebaptisa Jérusalem « Aelia Capitolina » et la Judée, avec un succès plus durable… « Syria Palaestina ». Hadrien remit ainsi au goût du jour le terme « Palestine » en reprenant donc le nom des Philistins qui avaient disparu un millénaire plus tôt. Le seul but de l’empereur romain était d’effacer la trace des Juifs, élément clé que tait le podcast et sans lequel on ne peut pas comprendre l’émergence de ce mot. 

Confusion supplémentaire, au XXe siècle cela faisait bien longtemps qu’on ne parlait plus de « Syrie-Palestine », ce vieux terme romain. Le mandat britannique remit au goût du jour le nom de Palestine qui n’était pas utilisé par le précédent occupant, l’empire ottoman sous lequel aucune entité administrative du nom de Palestine n’existait.

Toutefois, là où le podcast n’est plus dans l’approximation et l’omission mais bien dans l’erreur, c’est sur la fin :

« En tout cas, on voit que si la Palestine est difficile à définir, les Palestiniens, eux, ils existent bien, et qu’au départ les Palestiniens sont les Philistins ».

L’auteur lui-même sent bien que son argument n’est pas très solide puisqu’il fait marche arrière dans la conclusion : « Dans l’épisode de David et Goliath, dans celui de Sanson et Dalila, tout cela témoigne de ces conflits et place les Philistins dans le camp des méchants d’une certaine façon, alors même que cette origine linguistique est tout à fait oubliée quand on parle aujourd’hui de Palestine ; on parle de Palestiniens, bien sûr, et pas de Philistins ».  Il y a effectivement un lien linguistique entre les Philistins et les Palestiniens – mais c’est bien le seul !

Alors pourquoi avoir recouru à une telle falsification historique quelques lignes auparavant en affirmant que les Palestiniens sont les descendants des Philistins ? Il faudrait savoir, d’ailleurs, parce que le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas s’imagine, lui, des ancêtres cananéens  – un autre peuple encore plus ancien et lui aussi disparu.

Il y a différentes manières d’acquérir une légitimité mais la falsification de l’histoire n’est probablement pas la meilleure, car tout subterfuge finit toujours par voir son effet se dissiper.

Nous n’avons pas encore visité l’exposition de l’Institut du Monde Arabe, mais si elle fait preuve de la même rigueur historique, il y a de quoi être inquiet.

Quant à voir non seulement une radio du service public mais aussi le ministère de la Culture prendre de telles libertés avec l’histoire, sur un sujet aussi clivant, qu’il soit permis de demander s’ils servent vraiment ainsi l’intérêt des Français.

© InfoEquitable

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