Tribune Juive

Pierre Saba. La Haine et les mots

Edmund Kean dans le rôle de Barabas, 1818

« Nous ne devons plus utiliser des termes qui risquent de blesser »: C’est en ces mots que l’arrière-petit fils d’Agatha Christie a décidé de modifier le titre et les contenus racistes du roman de l’écrivaine.

Ainsi disparaissent le titre du roman « Les dix petits Nègres » d’Agatha Christie au profit de « Ils étaient dix »  et les 74 mentions de « nègre » qu’il contient.

Le titre et le mot « nègre » auraient tout aussi bien pu être maintenus en procédant par avertissements et explications d’éditeur.

Certaines autres œuvres mondiales évoquent une haine raciste et antisémite bien plus agressive qui ne semblent susciter aucune opinion publique susceptible de rectifier, d’effacer ni d’avertir.

Les préventions anti-racistes relatives à la plume d’Agatha Christie ne semblent pas atteindre les ouvrages véhiculant descriptions, termes, récits antisémites.

Deux exemples particulièrement significatifs mais non exhaustifs: l’œuvre de Shakespeare et celle de Marlowe.

S’agissant de Shakespeare, il affuble les Juifs des poncifs antisémites les plus virulents qu’il résume en usurier sanguinaire, c’est à dire vénal et meurtrier (« Le Marchand de Venise », etc)

S’agissant de Marlowe, son ouvrage « Le Juif de Malte » dépeint le « Juif Barabas » dans les pires traits antisémites.

Les associations de lutte contre la haine raciste (LICRA, LDH, etc) pourraient s’inspirer des pressions anti-racistes qui luttent avec succès contre les lexiques sexistes et racistes des œuvres littéraires actuels ou de temps révolus.

Il serait anormal que seul l’antisémitisme soit exonéré ou s’exonère de la censure anti-raciste.

Il en est notamment du ressort comme du devoir des mouvements anti-racistes, particulièrement ceux cités plus haut.

© Pierre SABA

18 avril 2023

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