Des « Lettres ouvertes », il en pleut chaque jour, et la définition de l’antisionisme, nous en avons tous un peu soupé, me direz-vous. Reste qu’il est là, l’anti sionisme, toujours reconnaissable tout affublé qu’il fût d’oripeaux divers, Reste même qu’il est désormais affiché, revendiqué, de manière décomplexée, permettant, nous l’avons vu, les dérives les plus graves.
Reste encore qu’il faut bien acter l’insuffisance de nos textes et autres Tribunes publiés ici et là sur le sujet.
C’est ce qu’aura saisi Liliane Messika, qui n’a, elle aussi, eu de cesse que d’écrire sur le sujet et qui aujourd’hui nous livre une « Lettre ouverte » de quelque 300 pages, sorte d’invitation à un voyage de découverte dans « l’univers de l’antisionisme ».
C’est bien d’un « univers » qu’il s’agit, et un voyage sans guide éclairé et expérimenté serait dès lors insuffisant : avec l’auteur, qui propose un « décollage de l’aéroport des BIMI ( Bien Intentionnés Mal Informés) », le voyage à destination de l’aéroport du Réel se fera en convoquant l’Histoire, les statistiques, les accusations diverses à l’encontre d’Israël dont celles d’apartheid et d’État génocidaire, avec une escale indispensable « dans les abysses de l’ONU ».
Antisioniste, c’est autorisé : en témoignent les panneaux Decaux londoniens affichant telle une pub pour un énième coca que « Normal people boycott Israël » ou, quasi concomitamment, la promotion du refus d’un vague auteur, lequel s’est fait publier en chinois sans en faire un foin, de voir son livre traduit en hébreu et publié en Israël, sauf si l’éditeur obtient l’imprimatur de BDS. En témoigne aussi l’idylle fantasmée entre Juifs et Arabes que nous conta une récente expo à l’IMA.
Toute une propagande en somme, dans les filets de laquelle les antisémites viscéraux auront attrapé une race nouvellement identifiée par l’anthropologie, « les BIMI auxquels s’adresse l’auteur », puisqu’ils ont, dit-elle, par rapport aux autres antisémites, « la particularité de ne pas être dépourvus de cerveau et qu’ils sauront, parie-t-elle, s’en servir ».
Après avoir évoqué l’antisionisme, et s’être demandé s’il s’agissait d’une opinion ou d’un (res)sentiment, fustigeant via Jankélévitch « cette incroyable aubaine qui nous donne la permission, le droit, et même le devoir d’être antisémite au nom de la démocratie », et avoir interrogé l’accusation d’apartheid, cognant au passage cette exception mondiale que constitue la « semaine anti-apartheid israélien », alors même qu’au Liban existe bel et bien un apartheid anti-Palestinien, après être revenue sur ce qu’elle nomme « la campagne » BDS et avoir déconstruit « le mot magique de colonisation » dans 4 chapitres où s’avère l’érudition historique de l’auteur, Liliane Messika fait leur sort à l’ONU, à laquelle elle consacrera un chapitre, et à sa fille adoptive, la CPI, démontrant ce deux poids-deux mesures qui a entraîné 32 commissions d’enquête diligentées par le CDH, dont 9 furent consacrées … au seul Israël.
Tout au long du passionnant ouvrage, Liliane Messika se livrera à des révisions d’Histoire avant l’examen des faits, rendant ses arguments incontestables, mais emmènera encore à la frontière égyptienne de Gaza ce lecteur qui découvrira comment l’Egypte, sans jamais se justifier, elle, détruisit et scella le réseau de tunnels de contrebande, se fichant comme d’une guigne que la chose empêchât les patients palestiniens de venir se faire soigner en Egypte; elle les guidera chez les dirigeants gazaouis qui mènent grand luxe, les invitera à réfléchir à la « méthode de la France, 1er exportateur mondial de conseils intempestifs » mais encore à ces ONG baptisées « ONJ, Organisations Nuisant aux Juifs ».
Le vol se poursuit, interrogeant les accusations d’État génocidaire et État occupant faites à Israël, puis, convoquant Pierre Rehov, les étapes successives ayant conféré à Jérusalem le statut de lieu saint de l’islam.
Un tel travail ne pouvait se dispenser d’évoquer les médias, la Realmediatik Politik, l’AFP, pour acter le propalestinisme de l’ensemble des médias français : « Quand on haït Israel, on ne compte pas les coups bas ni les in-faux ».
Chers BIMI, si deux derniers chapitres vous rappellent qu’Israël aide l’humanité tout entière et que, l’auriez-vous cru-, il y a des Arabes sionistes, et qu’un autre vous explique que « vilipender les Juifs israéliens à propos de tout ce qui va mal sur la planète a une influence sur le sort réservé aux Juifs français », Liliane Messika vous propose d’aller voir sur place « cette nation qui compte, parmi les plus performantes de la planète ».
Pour info, un addata du 10 février intitulé « Dernière minute » explique comment ça marche, les élections, en Israël, et clôt le bec à ses ennemis : « Le peuple juif est revenu dans son État ».
Bonne lecture d’un ouvrage éclairant, œuvre de salubrité s’il en est, avec, cerise sur le gâteau, l’écriture caustique d’une Liliane Messika qu’on aime et plébiscite, à TJ.
Sarah Cattan
« Lettre ouverte aux anti sionistes de droite, de gauche et des autres galaxies ». Liliane Messika. H Les Éditions de l’Histoire. Collection « Le Monde en mouvement »
Écrivain, Essayiste, conférencière, traductrice, Liliane Messika est auteur de plus de 30 ouvrages, dont plusieurs sur les conflits du Moyen-Orient. Liliane Messika est membre du comité de rédaction de Menora.info.
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