Elisabeth Borne dit vouloir lutter contre le racisme et l’antisémitisme
Un « marronnier » médiatique est un événement qui se produit tous les ans et qui oblige les journalistes à trouver quelque chose de nouveau à en dire. La lutte contre l’antisémitisme en fait partie.
Le marronnier 2023 de Madame Borne arriverait fort à propos et elle aurait fort à faire, s’il ne se résumait pas à une énième annonce. En effet, les derniers chiffres du ministère de l’Intérieur français disponibles, ceux de 2021, font apparaître 857 faits antichrétiens, 589 faits antisémites et 213 faits antimusulmans[1].
Cette surreprésentation des victimes juives, sur un total de moins d’un demi-million de citoyens, contraste avec la rareté de l’islamophobie, d’autant plus remarquable qu’il y a dix à douze fois plus de musulmans que de Juifs en France.
En chiffres, les agressions physiques ont constitué 50% des incidents antisémites signalés en 2022, dont trois meurtres : Jérémy Cohen, 31 ans, lynché par des racailles le 16 février 2022, a été percuté et tué par un tram en tentant de les fuir. Deux hommes ont été inculpés le 16 avril 2022. René Hadjadj, 89 ans, a été poussé par la fenêtre du 17ème étage par un voisin musulman le 17 mai 2022. Eyal Haddad, 44 ans, a été assassiné à Longperrier le 19 août 2022 par son colocataire Mohammed Dridi.
Deux données intéressantes figurent dans un autre rapport, qui déborde largement des frontières de l’Hexagone. Il provient du Ministère de la Diaspora de l’État juif : 70% des agressions antisémites mondiales sont liées au sentiment anti-israélien et 68% des contenus antisémites sur Internet proviennent de milieux pro-palestiniens ou d’extrême gauche[2].
Est-ce pour les encourager que le gouvernement a choisi, pour rendre public son communiqué, l’Institut du monde arabe, où la carte du Moyen-Orient excluait l’État juif jusqu’en 2019[3] ?
Cinq objectifs qui n’en sont pas, pour lutter contre un fléau qui hait
Relativisions : l’impact des objectifs fixés par la Première ministre sont si vagues qu’ils ne risquent pas de fâcher les partenaires de la France dans l’IMA, ni d’embarrasser les auteurs d’actes antisémites et encore moins de rassurer les Juifs français : le premier est de « mesurer la réalité du racisme, de l’antisémitisme et des discriminations ». Autrement dit, il s’agit de doublonner l’enquête et le rapport annuels du Ministère de l’Intérieur.
Manque de confiance en celui-ci ? La première ministre croit-elle qu’il prend les vessies antisionistes pour des lanternes palestinophiles ? Cela n’expliquerait cependant pas l’incapacité des trois cadavres de 2022 à la convaincre de la réalité de l’antisémitisme.
Le deuxième objectif a de quoi interpeller : « Oser nommer la réalité de la haine ». Et si celle qui dit (et qui y est pas) donnait l’exemple ? Elle pourrait nommer les 587 actes anti-Juifs, lister leurs victimes et dénoncer leurs auteurs. Hélas ! Les associations de bienfaisance palestinolâtres grouillent d’incitateurs au meurtre de Juifs et inondent la Toile de leur fiel. Alors s’il n’en reste qu’une à ne pas voir, ne pas entendre et ne pas croire, c’est notre bonne Borne !
Objectifs flous et vœux pieux
Le troisième pseudobjectif, « Mieux éduquer et former« , évite de préciser les cibles de ces éducation et formation. Notre pays se fait une spécialité de regarder le doigt qui montre la lune et de tirer sur le messager : l’historien Georges Bensoussan a été traîné devant les tribunaux pour avoir évoqué l’antisémitisme inhérent à l’éducation traditionnelle musulmane. Pourtant, il est aussi visible dans les cités françaises que dans les Territoires palestiniens, où l’on distribue des bonbons et tire des feux d’artifice pour célébrer la mort de civils juifs dans des attentats terroristes[4].
Dans la catégorie Noyer-la-carpe-farcie, admirons aussi les objectifs 4 et 5, « sanctionner les auteurs et accompagner les victimes ».
Si elle veut donner consistance à l’avant-dernier, notre première Borgne devrait ouvrir l’œil et se porter partie civile contre Adel Amastaibou, coupable mais irresponsable du meurtre de Sébastien Selam le 21 novembre 2003 et contre Kobili Traoré, auteur irresponsable au cannabis de la torture et de l’assassinat de Sarah Halimi, le 4 avril 2017.
Il faudrait aussi qu’elle cesse de détourner les oreilles quand un assassin de Juifs hurle des insultes antisémites. C’est ce qu’ont fait ceux qui ont tué Jérémy Cohen, René Hadjadj et Eyal Haddad. Alors, on sanctionne les auteurs, ou on nomme une commission qui statuera sur la différence entre antisémitisme et loup-solitaire-souffrant-de-troubles-psychicophobisme ?
Si on résout la quadrature du 4, on pourra aussi cocher le 5 en ayant moins de victimes à accompagner. Mais est-ce bien là le but recherché ?
Championnats du monde de débilité malveillante : Etats-Unis en vains cœurs
En 2023, le Ramadan, propice aux offrandes de cadavres juifs à Allah, commencera le 22 mars. Le Coran n’est pas antisémite, a dit ma pharmacienne, qui connaît quelqu’un qui l’a lu, c’est une coïncidence si les vrais croyants multiplient les meurtres d’infidèles et de « sionistes » pendant le mois du Ramadan.
En tout cas, ce mois sacré musulman a donné l’occasion aux États-Unis de nous battre à plate couture dans la discipline dont nous détenions, jusqu’à présent, la médaille olympique : le lancer de conseils inopportuns.
Deux envoyés spéciaux de Joe-le-taxidermisé sont allés « exhorter Israël à prendre des mesures préventives dans les semaines à venir afin de s’assurer que la période sensible ne soit pas marquée par de nouvelles effusions de sang[5] ». Comme si les inventeurs du Dôme de fer avaient besoin de conseils Wokistanais…
Il ne faut surtout pas voire là une soudaine sollicitude vis-à-vis des civils israéliens, dont l’ex-vice-président d’Obama se fiche comme de son premier dentier.
Il s’agit de la stratégie du billard à trois bandes : 1) éviter les victimes israéliennes, pour 2) diminuer les occasions de réjouissances ostentatoires côté palestinien, car 3) elles portent préjudice à l’image des Palestiniens, qui doit être celle d’innocentes victimes. So what ? Pourquoi le président américain se soucierait-il de l’image des Palestiniens ? Parce qu’ils sont indispensables aux démocrates, qui ne sortent jamais dans les médias ou les manifs sans ces doudous.
Pour éviter à ses supporters de devoir encore supporter une liesse palestinienne mal-t’à-propos, les envoyés de Joe Bidon ont demandé à Netanyahou de s’engager à respecter l’apartheid mis en place depuis 1967 sur le Mont du Temple, alias Esplanade des mosquées : les musulmans peuvent y jouer au foot jusque dans la mosquée al-Aqsa, alors que les Juifs n’ont accès au parvis qui surplombe le Mur des lamentations que sous étroite surveillance, pendant des créneaux horaires bien précis et à condition de n’y faire aucun geste évocateur de prière[6].
Le jeu de cette erreur
Quelle différence y a-t-il entre cette situation et celle qui prévalait avant qu’Israël reconquière sa capitale, annexée par la Jordanie en 1949 ?
Et d’une, entre 1949 et 1967, les Juifs n’avaient JAMAIS accès au Mont du Temple. Et de deux, cet apartheid anti-juif mis en œuvre par le Waqf (autorité religieuse) jordanien, est le seul et unique dont l’État juif est responsable et coupable.
C’est ballot, parce que c’est le seul qu’Amnesty International ne réprouve pas.
© Liliane Messika
Écrivain, Essayiste, conférencière, traductrice, Liliane Messika est auteur de plus de 30 ouvrages, dont plusieurs sur les conflits du Moyen-Orient. Liliane Messika est membre du comité de rédaction de Menora.info.
[1] https://www.vie-publique.fr/en-bref/284419-actes-racistes-et-antireligieux-des-chiffres-en-hausse-en-2021
[2] www.jns.org/68-of-online-antisemitism-comes-from-palestinians-or-progressives/
[3] https://fr.timesofisrael.com/linstitut-du-monde-arabe-inscrit-israel-sur-sa-carte-du-moyen-orient/
[4] https://fr.timesofisrael.com/les-palestiniens-fetent-le-massacre-commis-dans-une-synagogue-de-jerusalem/
[5] https://www.timesofisrael.com/in-now-annual-tradition-us-urges-israel-to-keep-friction-in-check-ahead-of-ramadan/
[6] https://www.timesofisrael.com/in-now-annual-tradition-us-urges-israel-to-keep-friction-in-check-ahead-of-ramadan/amp/