Il aura fallu une Lettre ouverte de Michel Onfray au recteur Hafiz, enjoignant ce dernier à préférer le verbe à l’épée.
Il aura aussi fallu que s’en mêle le GRDF.
Michel Houellebecq agencera mieux ses propos lorsqu’il les mettra à l’écrit.
Chems-Eddine Hafiz décidera alors.
Après une rencontre avec Houellebecq, le recteur de la Grande mosquée de Paris pourrait retirer sa plainte, écrivent Alexandre Devecchio et Vincent Trémolet de Villers.
Les 2 journalistes annoncent que s’est tenue ce matin, à l’initiative de Haïm Korsia, une rencontre entre les deux hommes. Le recteur et l’écrivain ont évoqué les passages litigieux du dialogue avec Michel Onfray publié dans la revue Front Populaire.
Ladite rencontre a eu lieu en début de matinée: “Les deux chefs religieux et l’écrivain français le plus lu dans le monde se sont donc rencontrés autour d’un café.
Le recteur a tenu à lui faire part de son émoi: “Si l’on suit à la lettre les propos de Michel Houellebecq, explique-t-il, je suis moi-même un voleur. Cette essentialisation n’est pas acceptable d’autant qu’elle vient percuter mon combat pour la distinction entre musulmans et islamisme”.
Michel Houellebecq a expliqué que dans une longue discussion de six heures, certains propos pouvaient apparaître réducteurs et s’est engagé à les préciser dans un futur livre qui regroupera l’intégralité de sa conversation avec Michel Onfray parue dans Front Populaire.
À la fin de ce dialogue, l’écrivain a rédigé à la main le texte suivant:
“À la suite de la proposition de rencontrer le Recteur de la Mosquée de Paris émanant du grand rabbin de France, j’ai pu échanger avec lui ! Chems-Eddine Hafiz m’a fait part de la grande émotion des Musulmans Français causée par certains passages de mon entretien avec Michel Onfray. Il se trouve qu’un livre sera tiré de ces entrevues. Je suis profondément attaché au texte et je veux bien reconnaître que les paragraphes concernés sont ambigus. Je les remplacerai donc, dans l’édition à venir, par des paragraphes explicitant mieux mon propos, et qui, je l’espère, ne heurteront pas les musulmans”.
Le rabbin Korsia est sorti de l’entrevue avec la satisfaction d’avoir évité un procès inutile et préjudiciable pour tous les partis: “Houellebecq est un immense écrivain, un immense penseur”, a-t-il conclu.
Michel Houellebecq confie au Figaro qu’il est “sincèrement soulagé et heureux de cette issue” et d’avoir pu “préciser ses propos” qui correspondent davantage désormais à ce qu’il voulait exprimer: “Ce genre de débat ne doit pas se régler devant un tribunal d’autant que dans le pire des cas le procès aurait eu lieu pendant le débat sur l’euthanasie. Or sur ce sujet j’ai énormément de points communs avec le recteur et les responsablesreligieux en général”.
Enfin, Michel Houellebecq ajoute qu’il est toujours préférable, pour un romancier, de s’exprimer par écrit. Le recteur de la Mosquée de Paris, qui a suspendu sa plainte, précise au Figaro qu’il attend la publication du texte pour la retirer définitivement.”
© Alexandre Devecchio et Vincent Trémolet de Villers
Lettre ouverte de Michel Onfray au recteur de la Grande Mosquée de Paris
Dialoguer plutôt qu’assigner au tribunal : c’est ce qu’a proposé Michel Onfray à Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris, dans une lettre ouverte publiée dans les colonnes du Point et que TJ propose de retrouver ici.
“Monsieur le recteur de la Grande Mosquée de Paris,
J’ai pris connaissance de votre plainte déposée contre Michel Houellebecq pour des propos tenus par lui dans un entretien que nous avons eu pendant six heures pour un numéro spécial de Front populaire consacré à la question de la décadence, ou non, de notre civilisation. Nous avons abordé quantité de sujets, vous vous en doutez bien, qui allaient de l’euthanasie à l’avortement, de la gestation pour autrui à la peine de mort, de la nécessité d’appuyer une politique sur une spiritualité, des sujets ayant généré des avis sur lesquels, il me semble, mais ce serait à discuter avec vous, vous n’auriez pas grand-chose à objecter.
Votre courroux porte sur des phrases « inacceptables et d’une brutalité sidérante ». Et vous citez ces phrases pour motiver votre plainte. Dont acte. Je suis peut-être le philosophe français le plus insulté du pays, plus d’une dizaine de livres ont en effet été écrits contre moi dont je pourrais dire qu’ils regorgent de phrases, de chapitres, de développements inacceptables et d’une brutalité sidérante. Je ne compte pas les flots d’insultes et de menaces, y compris de mort, auxquelles j’ai fait face – seul. On a dit de moi que j’étais dans le « top 10 des islamophobes de France » en même temps que j’étais le compagnon de route de Daech, c’est dire ! Dans ce même journal où sont publiées ces lignes, Le Point, le philosophe Bernard-Henri Lévy m’a assimilé à Marcel Déat, un collaborationniste français qui a porté l’uniforme nazi sur le front de l’Est, juste parce que j’annonçais que Stéphane Simon et moi allions publier une revue souverainiste ! Je m’honore de ne jamais avoir porté plainte contre qui que ce soit qui m’ait insulté, qui a colporté des calomnies sur mon compte, qui a propagé des contre-vérités sur mon travail ou ma personne – et il y en eut, il y en a, il y en aura.
Je crois en effet à la liberté de conscience, de pensée, de réflexion, d’expression. Or cette liberté ne se morcelle pas car, si on commence à lui donner des limites – et qui les lui donne ? -, alors elle cesse d’exister. Si l’on peut tout dire sauf ce qu’il ne faut pas dire, alors seul importe ce qu’il ne faut pas dire et qui va s’étendre comme une tache d’huile appelée à tout recouvrir d’une vaste prohibition.
Je suis par exemple à la fois pour la liberté de blasphémer mais pour une éthique personnelle du refus du blasphème. Je sais que les caricatures du Prophète vous blessent, je ne vois pas l’intérêt de vous blesser. Même remarque pour ce qui blesse le fidèle d’une autre religion. En dehors du blasphème, l’ironie, l’humour, la subtilité d’une intelligence plus fine que le blasphème me paraissent préférables.
Une partie de la communauté musulmane, dites-vous, se sent offensée par les propos tenus par Michel Houellebecq. Entendu. Je conçois que l’essentialisation, qui est nécessaire pour échanger, ait ses limites mais elle s’avère inévitable dans le débat d’idées puisque, justement, il s’agit d’idées et qu’on n’a rien trouvé de mieux pour entretenir de la réalité ! Je vous propose autre chose que de porter plainte, de judiciariser, d’encombrer les tribunaux avec des questions spirituelles, philosophiques, théologiques. J’ai lu votre saint Livre plume à la main, mais aussi des biographies du Prophète et nombre de ses hadiths. Je sais ne pas me tromper en vous rappelant ce que, monsieur le recteur, vous savez bien évidemment déjà vous-même : le Coran ne cesse de parler d’Allah comme du Très Miséricordieux, du Tout Miséricordieux. Nul n’ignore, bien sûr, et vous moins qu’un autre, que la miséricorde nomme la pitié par laquelle on accorde le pardon au coupable.
Supposons que Michel Houellebecq soit coupable, mais disons alors pour ce faire à quels versets et à quelles sourates ses propos contreviennent et choquent les musulmans en tant que tels. Ne croyez-vous pas que l’imitation d’Allah vous inviterait bien plutôt à pratiquer la miséricorde qu’à traîner un écrivain qui est aussi un penseur devant les tribunaux mécréants de la République française pour qu’elle fasse votre loi spirituelle ?
Je sais, monsieur le recteur de la Grande Mosquée de Paris, que vous êtes juriste de formation et avocat de profession. Mais votre magistère à la tête de cette haute autorité spirituelle qu’est la Grande Mosquée pourrait aussi faire de vous l’initiateur et le promoteur d’une façon supérieure d’envisager les choses autrement qu’en envoyant en justice quiconque ne pense pas comme vous sur la question de l’islam.
Est-ce un crime de manifester des avis qui, sauf erreur de ma part, et sauf à ce que vous m’en apportiez la preuve, ne semblent pas contrevenir à un seul verset du Coran : lequel dirait en effet que l’islam n’est pas une religion conquérante et qu’il ne doit surtout pas l’être ? Il me semble que la chose se trouve régulièrement dite dans votre Livre et que Michel Houellebecq prend acte sociologiquement de ce qu’annonce votre texte sacré et des réactions que cela suscite en France. Dès lors, où et quand y aurait-il motif à colère, à courroux ?
Je vous propose, plutôt que de nous envoyer les uns les autres des avocats à la figure, ou des noms d’oiseaux et toute autre façon inélégante de régler les problèmes, de les envisager pour ce qu’ils sont : avant toute chose, et en amont de la politique, des questions intellectuelles dont nous pourrions débattre dans un lieu de votre choix et selon des modalités à votre convenance. Un débat public où nous pourrions aborder ces questions avec un médiateur choisi par vous montrerait qu’on peut préférer dans l’islam ce qui fut au centre de la rencontre de Ratisbonne dont feu le pape Benoît XVI a parlé en son temps et qui, au XIVe siècle, permit à un chrétien et à un musulman de se rencontrer et de se parler : il nous faut dialoguer, surtout sur les sujets qui fâchent, car le Verbe est toujours supérieur à l’Épée qui, elle, témoigne de l’échec de la raison. Et personne, jamais, n’a intérêt à l’échec de la raison. C’est toujours quand la déraison apparaît qu’on se le dit ; mais c’est toujours trop tard.
Dans l’attente de votre réponse, veuillez croire, monsieur le recteur, à l’expression de ma plus haute considération.
© Michel onfray
Il est vrai que Michel Onfray aurait pu porter plainte contre BHL (qui depuis 40 ans fait énormément de tort aux Juifs français soit dit en passant) et surtout contre les organes de désinformation BFMTV, Le Monde, L’obs etc…La grande fachosphere que l’on nomme les médias français accentue ses attaques contre les intellectuels et les dissidents en France : ça sent le sapin ! Onfray aurait pu porter plainte pour diffamation et calomnie…mais le pot de terre aurait perdu face au pot de fer. L’attitude d’Onfray l’honore…mais il est honteux pour cette triste Europe d’en être arrivée là. Surtout après le prix Nobel attribué à un individu comme Annie Ernaux qui elle aurait mérité des procès.
Tribune juive , fidèle à sa vocation, n’a jamais épargné les organes communautaires surtout quand ils préféraient faire le dos rond en se taisant . Le Grand Rabbin de France n’a pas été épargné par la critique surtout quand il s’est avisé de donner des consignes de vote . Il valorisait la fausse idée du vote juif ! Pour Houellebecq qui est le meilleur écrivain français vivant , le GR s’est intelligemment interposé pour éviter un procès sans objet mais qui aurait pu être porteur de troubles ! Félicitons notre Grand Rabbin ! Kola kavod !
La victoire significative d’une “autorité” musulmane. Un écrivain français qui doit négocier son propos avec un dirigeant religieux ! La “dhimmitude” est déjà là. L’opinion publique des non-musulmans devient sous contrôle. La laïcité, fondant la liberté d’expression souveraine du citoyen, n’est plus qu’une coquille vide. Les Français se rendent-ils compte de l’anéantissement progressif de leur culture, c’es-à-dire de leur propre manière de faire monde ? La peur les empêche de dire ou de bouger ..on s habitue à tout …même à ça
Macron ayant été élu grâce aux voix des islamistes et des decoloniaux (qui sont les nouveaux colonialistes) il va de soi que la laïcité a purement et simplement cessé d’exister. Mais ce n’est pas le plus grave : la France est déjà de facto un État islamiste, racialiste et antisémite : la “nouvelle France”. Michel Houellebecq et Michel Onfray appartiennent à la “vieille France” : celle des Lumières et de l’humanisme. Il est inutile de se battre pour des causes perdues.