Gilles william Goldnadel. « La récupération politique de la tuerie à Paris ne pose plus de problème à l’extrême gauche »

TRIBUNE – L’écart à gauche entre les actes et les mots laisse place à de nombreuses contradictions, analyse l’avocat et chroniqueur.

Des manifestants lors d’une marche en hommage et en solidarité avec la communauté kurde de Paris, le 26 décembre. Julien de Rosa / AFP

Cachez ce sein que je ne saurais voir ! La gauche extrême a lu Tartuffe en oubliant que la tartufferie est in fine punie. Une des sources principales d’irritation que la gauche contemporaine inspire, réside dans l’écart entre ce qu’elle dit et ce qu’elle fait.

Commençons par la triste actualité. Aussitôt que William M. avait commis son terrible massacre dans un local kurde, la France Insoumise, Clémentine Autain en tête, incriminait «l’extrême-droite» et réclamait d’en tirer des conséquences politiques. Quelques heures plus tard, des nervis armés de gourdins dans la main droite et de drapeaux rouges dans la gauche, s’en prenaient à des policiers dans le Xe arrondissement parisien. Je rappelle que l’assassinat de la petite Lola, par une ressortissante algérienne sous OQTF, n’avait donné lieu à aucune exaction, mais que la colère engendrée par cette situation avait été tenue par les Insoumis et la gauche médiatique pour une odieuse récupération.

Un autre exemple récent du décalage vertigineux entre la noblesse du discours et la bassesse des actes concerne le rapport avec l’argent. La gauche européenne est tellement dure envers la corruption, qu’elle a été la première au Parlement européen à exiger de sévères sanctions contre le gouvernement hongrois de droite de Victor Orban. Hélas, on apprenait que des députés grecs et italiens, tous socialistes, étaient poursuivis, certains incarcérés, dans le cadre d’une très grave corruption au profit du Qatar. Plus d’un million de dollars en espèces ont été saisis par la police financière belge. On remarquera, en passant, que la presse n’a pas vraiment insisté sur la couleur politique des mis en cause. Nous pouvons supposer qu’il en aurait été autrement si les présumés corrompus avaient habité l’autre camp.

La gauche s’est aussi illustrée par un écart entre la pratique et la théorie dans le domaine de la lutte contre le racisme. Elle a théorisé la lutte antiraciste, et l’a mise en pratique grâce à différentes associations. Mais comme l’a remarqué Jean Baudrillard, le curieux intitulé de «SOS Racisme» semblait dissimuler l’impensé de vouloir le sauver, en exaltant les sentiments victimaires des uns et la culpabilité des autres. Son rejeton racialiste apparu plus récemment a ringardisé le vieil antiracisme de papa, qui ignorait la race, et l’a transformé en machine à détester sans complexe l’homme blanc, pour cause de privilège racial héréditaire.

En dehors de cette folle régression morale, il est inutile autant que lassant de remarquer que la gauche, qui traque le moindre mot de travers d’un antisémitisme en déclin quand il vient du vieux monde chrétien, le supporte avec une philosophie digne des stoïciens quand il provient avec une violence sans frein de la partie islamique.

Autre domaine de régression aggravée : Hier, la gauche se voulait libertaire. Il était interdit d’interdire. Aujourd’hui, elle tient les ciseaux d’Anastasie, prône la culture de l’annulation et va à la chasse aux statues de Napoléon. Son nouvel ennemi s’appelle Elon Musk car il a, entre autres, osé rétablir le compte du Professeur Raoult qui avait vanté les bienfaits de la chloroquine. De même, alors que «gauche» a longtemps été synonyme de «démocratie», le pouvoir plus ou moins autoritaire qu’exerce Jean-Luc Mélenchon sur son parti laisse perplexe.

On terminera comme on a commencé, par le sein de Tartuffe. La lutte contre les violences faites aux femmes faisait partie du domaine réservé de la France Insoumise. Le féminisme relevait de son domaine privé, quasiment de l’appellation contrôlée. L’intransigeance était vertu et le soupçon devoir absolu. La droite égarée qui osait invoquer la présomption d’innocence, voyait incontinent présumer sa complicité. Mais Taha Bouhafs et Adrien Quatennens ont violemment ramené le parti à la réalité. Même les censeurs peuvent faillir.

© Gilles William Goldnadel

https://www.lefigaro.fr/vox/politique/goldnadel-la-recuperation-politique-de-la-tuerie-a-paris-ne-pose-plus-de-probleme-a-la-gauche-20221226

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