Tribune Juive

L’Institut Montaigne validera-t-il le Rapport sur l’immigration qui prône intégration et non assimilation? Rien de moins sûr

Troubles et débats à l’Institut Montaigne autour d’un rapport sur l’immigration

L’Institut Montaigne », chacun le voit comme un Think tank de haute fiabilité : n’a-t-il pas d’ailleurs été en 2017 classé à la première place du classement « Think Tank & Transparent » de l’Observatoire européen des Think tanks, obtenant les plus hautes notes en matière de gouvernance, de transparence et de production.

Pourquoi l’étude d’ampleur sur l’immigration menée par le consultant Hakim El Karoui tarde-t-elle tant à être publiée.

Annoncée pour septembre 2022, elle est, au 1er décembre, toujours objet de discussions. Est-ce parce que son auteur y défend l’intégration par la « communauté » plutôt que l’assimilation.

Pour rappel : aujourd’hui, L’Institut Montaigne est dirigé par une proche de Vincent Bolloré. On entend dire que ledit Rapport pourrait être recalé.

Hakim El Karoui avait, en septembre 2016, conclu avec ses partenaires de travail autour d’un Rapport sur la cohésion sociale qu’un islam français était possible et qu’il fallait conduire un travail sur l’islam, les peurs françaises étant renforcées par une méconnaissance générale des musulmans de France, de leurs aspirations et de leurs pratiques religieuses.

Le même avait en octobre 2020 dévoilé, via un Rapport pour l’Institut Montaigne, un autre visage des quartiers, invitant l’Etat à moins miser sur la rénovation urbaine et à désormais favoriser l’essor économique des villes pauvres. Il nous avait montré que le 93 était le champion des créations d’emplois, que les JO 2024 et le Grand Paris devraient accélérer ce dynamisme, et que leurs habitants n’étaient pas des assistés… « L’espoir est là », avait affirmé Hakim El Karoui qui travailla sur La Fabrique de l’islamisme et qui voyait dans les banlieues pauvres de l’agglomération parisienne des « Ellis Island » à la française :  À force de concentrer toute la misère du monde au même endroit – parce qu’on n’en veut pas ailleurs -, ne nous étonnons pas des difficultés que cela engendre ! On parle de repli communautaire, mais pourquoi vivent-ils comme dans le pays d’origine ? Parce qu’ils ne sont plus en contact avec la population majoritaire. 

Comment s’étonner, dès lors, que l’étude d’ampleur sur l’immigration qui lui a été confiée défende l’intégration par la «communauté» plutôt que l’assimilation : Rejetant la possibilité d’une «assimilation heureuse» pour promouvoir la voie de «l’intégration», Hakim El Karoui déplore dans ladite étude  la trop grande «concentration résidentielle et scolaire» des populations immigrées et propose plusieurs pistes pour y remédier : limiter leur taux à 50% dans les quartiers prioritaires, les répartir dans les régions, plafonner le logement social à 40% dans les communes, fermer les établissements réseau d’éducation prioritaire (REP) et REP+ et redistribuer les élèves dans d’autres collèges et lycées, etc. 

Rien ici de très révolutionnaire dans un document qui souligne aussi la nécessité, pour l’intégration des immigrés, d’un «encadrement, familial, communautaire ou institutionnel». L’auteur estime que «la communauté est une ressource pour les immigrés et leurs enfants», un «filet de sécurité». «Le processus d’intégration est le plus souvent pensé en France comme un processus dont l’objectif est la rupture totale avec la culture et la communauté d’origine pour embrasser les us et coutumes de la société française. Or, l’étude objective du phénomène montre paradoxalement que ce sont ceux qui préservent la communauté d’origine qui vivent le processus d’intégration le moins heurté», écrit Hakim El Karoui, qui insiste sur un point : «Il ne faut pas confondre maintien de la communauté et communautarisme.»

L’épais rapport de 324 pages est relu, édité, mis en forme. Il porte un titre : les Nouveaux Français. Échecs criants, succès silencieux». Et une date, déjà passée : «septembre 2022.» Manifestement prêt, le document consacré aux sujets brûlants de l’immigration et de l’intégration, que Libération a pu lire, n’est toujours pas sorti, plus de deux mois après sa finalisation. 

Contacté, le Think tank patronal n’a pas répondu. Sollicités aussi, des membres du comité directeur ont décliné ou temporisé. 

Son commanditaire, l’Institut Montaigne, ne semble pas pressé de le dévoiler. Il semble même qu’il s’apprête à recaler le rapport.

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