Tribune Juive

Les Apartés de Félie. À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie

La coupe du monde de foot au Qatar. On ne parle que de ça. 

 Et, cette image d’un supporter et la légende qui souligne la photo : « Pas de bière au Qatar : sobre, il découvre que le foot c’est nul en fait. »

Pourtant point de rire et même certains ne comprennent pas la blague. Epoque du premier degré et des informations survolées. Epoque de malaise et de tristesse. 

Un  livre de Guibert sur la petite table basse. Son titre: « A l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie ».

Tout autour, ça bruisse  des voix, des injonctions et le sempiternel Secoue-toi!

Bouge ! Tu n’as aucune raison d’aller mal.

Pas d’explications ni de justifications à donner. Mais, un énorme mal être.

Non, la dépression n’est pas un luxe. Ni le bar de la rue Cambon si bien nommé Hemingway.

Servez-vous un daïquiri. Ça va décoiffer du bulbe.

Pourquoi avoir honte de faire une dépression ? Pourquoi avoir besoin de le cacher comme si c’était une maladie honteuse ? De fait, cette maladie vous isole et on se retrouve face à soi-même, souvent sans oser se regarder, atterrée, apeurée, sans repères.On se transforme en un vampire qui ne se reflète pas dans les miroirs.

Vamp Ella semble nous murmurer notre univers rétréci à peau de chagrin, à peau à vif.

Cellule d’isolement volontaire.
On capitonne les murs de sa chambre, on se glisse dans le lit recouvert de couettes et de toutes les couvertures possibles. On se fait un cocon de tristesse.
On ne peut plus rien dire ni faire.
Tout semble outré ou vain. On est à côté de soi dans cette mauvaise mise en scène d’une vie désespérément désorganisée.
Il suffirait de presque rien. On connaît le début de la chanson mais on ignore la suite puisqu’on s’ignore soi-même.
C’est la roulette russe. Une seule balle dans le barillet qui nous fait de l’œil. Mortelle randonnée mentale.
Deux faces Jekyll et  Hyde.
Tirage au sort impossible.
Dernier taxi pour la Land Rover des déprimés.
Besoin de rien, envie de rien.
On change les paroles de chansonnettes de gare en restant sur celui de la détresse et on pense à la maladie.

Show must go on.
Non pas d’accord. Vivre cet état n’est pas une faiblesse. Cela peut toucher vos enfants, vos parents, votre amour.
Dans cette société de l’apparence ou Tiktok devient la référence, celle de l’argent facile et de l’absence d’effort, regardez plus que jamais autour de vous.
Un dépressif peut en cacher un autre.
Une dépression est une maladie mortelle. Ne l’oubliez pas.

© Félicia-France Doumayrenc

Felicia-France Doumayrenc est autrice, critique littéraire, éditrice et peintre.

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