Ypsilantis. Des tableaux juifs – 1/10

Ygal Allon et le « plan Allon ». Israeli Deputy Prime Minister Yigal Allon (L) meets with US Secretary of State Henry Kissinger (C) and Israeli Prime Minister Golda Meir before dinner at the prime minister’s residence, Jerusalem, Feb. 27, 1974. – Facebook/The Prime Minister of Israel

Read more: https://www.al-monitor.com/originals/2016/03/israel-allon-plan-palestinian-land-grab.html#ixzz7lMP5Hjni

Cette suite de tableaux se propose de rapporter des moments liés d’une manière ou d’une autre à l’histoire du peuple juif, en diaspora et en Eretz Israel. J’ai tenu à conserver un certain désordre, tant dans la thématique (diversement juive tout de même) que dans la chronologie. Je me laisse guider par une idée qui me vient en marchant ou en travaillant, suite à une découverte sur le World Wide Web, dans des bibliothèques ou chez des bouquinistes. Ce désordre m’est cher (la vie est un désordre) et par ailleurs il ménage un effet de surprise que les lectrices et lecteurs sauront apprécier, je l’espère. 

Je consacrerai le premier tableau de cette suite de dix tableaux à Ygal Allon (1918-1980) et au « Plan Allon », un homme et un plan très peu connus en dehors d’Israël ; et je ne suis pas certain qu’ils soient si connus en Israël même. Ci-joint, une notice biographique avant d’exposer le « Plan Allon ».

Ygal Allon naît sur une terre qui deviendra Israël. Membre de la Haganah, il est cofondateur du kibboutz Guinossar, au bord du lac de Tibériade. En 1941-1942, il s’engage chez les Britanniques et combat l’armée de Vichy au Levant. Il participe à la création du Palmah, qu’il commande de 1945 à 1948, et à la guerre d’Indépendance (1948-1949) au cours de laquelle cette unité de choc accumule des succès déterminants. David Ben Gourion freine son élan, notamment en Cisjordanie, un accord (secret) ayant été passé avec le roi de Jordanie. Ygal Allon quitte Tsahal en 1950 afin de se consacrer à son kibboutz et entrer en politique. Il occupe plusieurs postes ministériels dans deux gouvernements mais jamais celui de la Défense. Les politiques se méfient probablement de cet homme impétueux aux vues trop indépendantes – ce qui lui avait coûté le commandement de l’état-major en 1949. Cet homme très à gauche (comme tous les membres du Palmah) refuse de voter en faveur du plan de paix présenté à Camp David (1978). En effet, Ygal Allon qui avait également opéré dans le Sinaï au cours de la guerre d’Indépendance souhaite qu’Israël conserve le saillant de Rafah (à la frontière israélo-égyptienne), la pointe de Sharm el-Sheikh (à l’entrée du golfe arabo-persique) et quelques bases militaires proches de la frontière israélienne.

Ygal Allon est l’un des meilleurs stratèges de l’histoire d’Israël. Ses réussites tactiques au cours de la guerre d’Indépendance ne sont qu’un aspect de ses qualités de soldat. Mais le nom de cet homme est surtout connu pour être associé à un plan, le « plan Allon », présenté en 1968, au lendemain de la guerre des Six Jours.

Ygal Allon 1918-1980

Le « plan Allon »

Le « plan Allon » ? Ce plan est très pragmatique. Ygal Allon est un homme de terrain, comme Ariel Sharon et, à ce propos, je suis frappé par certaines similitudes entre ces deux militaires entrés en politique. Ce plan prévoit un partage des territoires conquis après la guerre des Six Jours en prenant en compte deux données vitales : la géostratégie et la démographie.

La géostratégie. Israël doit annexer certaines zones afin de sécuriser son territoire et desserrer l’étreinte. Les zones que désigne ce plan sont au nombre de huit :

1. La vallée du Jourdain et la ligne de crête qui la surplombe sur la rive occidentale.

2. Les piémonts cisjordaniens face à Tel Aviv.

3. Le Goush Etzion et les abords de Latroun qui protègent le corridor de Jérusalem.

4. Un vaste Jérusalem-Est afin d’éviter une continuité entre les quartiers arabes les plus orientaux et les villes de Cisjordanie.

5. L’espace sud-cisjordanien avec Kyriat Arba et l’ample corridor qui y conduira à partir de la mer Morte et encerclera la région d’Hébron et sa nombreuse population arabe.

6. Dans le Sinaï, le saillant de Rafah afin de mieux surveiller la bande de Gaza.

7. Sharm el-Sheikh afin de protéger l’accès maritime à Eilat.

8. Le plateau du Golan qui permet non seulement de sécuriser la vallée du Hulé en Galilée mais également de surveiller la plaine syrienne du Hauran qui conduit à la capitale syrienne distante d’à peine plus de quarante kilomètres.

La démographie. Ce plan d’annexion prend soin de contourner autant que possible les zones peuplées d’Arabes, des zones qui selon ce même plan pourraient être rattachées au huit cent mille Arabes de Cisjordanie dans une fédération jordano-palestinienne. La bande de Gaza quant à elle reste liée à l’Égypte.

Ce plan n’a été retenu ni par les Israéliens, ni accepté par un dirigeant arabe, à commencer par les dirigeants palestiniens. On peut toutefois noter qu’il a eu un effet implicite puisque jusqu’à la venue au pouvoir du Likoud, en 1977, les gouvernements travaillistes qui se sont succédés n’ont pas établi d’implantations hors des limites de ces zones susceptibles d’être annexées par Israël.

(à suivre)

© Olivier Ypsilantis

Né à Paris, Olivier Ypsilantis a suivi des études supérieures d’histoire de l’art et d’arts graphiques. Passionné depuis l’enfance par l’histoire et la culture juive, il a ouvert un blog en 2011, en partie dédié à celles-ci. Ayant vécu dans plusieurs pays, dont vingt ans en Espagne, il s’est récemment installé à Lisbonne.

https://zakhor-online.com/

Suivez-nous et partagez

RSS
Twitter
Visit Us
Follow Me

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*