Rescapée d’Auschwitz-Birkenau, la nonagénaire était ce jeudi l’invitée de l’AMEJD, Association pour la mémoire des enfants juifs déportés de Lille. Elle s’est exprimée devant trois cents lycéens rassemblés à la salle du Gymnase. Un devoir de mémoire.
« Esther, promets-moi de dire au monde ce que les hommes ont été capables de faire à d’autres… » Ces paroles prononcées par sa sœur avant son décès en 1945 dans le camp de concentration d’Auschwitz, Esther Senot ne cesse de les répéter. À l’heure où le négationnisme gagne du terrain, cette parole essentielle, trois cents élèves des lycées Montebello et Gaston-Berger l’ont entendue ce jeudi. « Pour qu’il n’y ait plus jamais ça », a dit Paulette Touzard-Dawidowicz, la présidente de l’AMEJD (1).
« On nous a rasés et on nous a tatoués un numéro. »
À 94 ans, Esther Senot n’a rien oublié de l’horreur. En juillet 42, sa famille fait partie de la rafle du Vel d’Hiv à Paris. Esther, alors adolescente, en réchappe. Mais elle est interpellée un an plus tard lors d’un contrôle d’identité. L’enfer commence. Elle est transférée à Auschwitz-Birkenau. Elle y est enfermée au bloc 27 avec 600 autres personnes. « On nous a déshabillés, on nous a rasés et ils nous ont tatoués un numéro. On n’avait officiellement plus d’identité, on ne pouvait plus prononcer notre nom. Il fallait qu’on apprenne notre matricule en allemand et en polonais. Dans ces conditions-là, on apprend vite. » Son numéro : 58 319.
« Un mouroir avec une épidémie de typhus. »
Après deux ans de camp et de travaux forcés parfois dans un froid glacial, elle participe à la marche de la mort de janvier 1945. « On a marché jour et nuit pendant trois jours. Ceux qui sortaient des rangs prenaient une balle dans la tête. On a fini dans un wagon à bestiaux découvert, à moins vingt degrès avec de la neige. » Peu de déportés parviennent à Bergen-Belsen. « Un mouroir avec l’épidémie de typhus. » Esther fréquentera un autre camp, Mathausen en Autriche. Elle en sortira vivante. Aujourd’hui, la mémoire de la Shoah devient rare. Celle de la petite Parisienne est encore vive.
- Association pour la mémoire des enfants juifs déportés de Lille et du Nord-Pas-de-Calais.
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