Laurent Kern Z’al nous a quitté à l’entrée de la nouvelle année 5783.
Nous lui rendons ici hommage et partageons également celui écrit par Moïse Taïeb- rabbin de Bordeaux-
Lolo c’était un modèle de dévouement, de générosité, de bonté.
Il avait fait don de lui et s’était mis très jeune au service des autres depuis son passé militant et engagé aux EEIF jusqu’à ses fonctions de présidence au sein de la communauté de Neuilly Ancelle.
Pilier de la communauté juive de Neuilly – Président puis Vice-président, Président du CCJC, le centre culturel et communautaire dont il a été un des membres essentiels et fondateurs , Président du Gan de Neuilly, un temps à la direction de Moadon avec encore plein de projets en tête qu’il n’aura pas pu finaliser.
Lui qui n’aimait pas les titres et encore moins ceux qui les mettent en avant, il aurait bien rigolé devant l’énoncé de toutes ces fonctions. C’était clairement un homme d’action, Il n’avait pas son pareil pour mener et lancer des projets qu’il fallait concrétiser ; il en était tout à la fois l’instigateur, le bâtisseur et le moteur. Il rassemblait autour de lui pour mener des actions, créer des concepts, trouver des solutions parfois farfelues, et dégoter de l’argent, même quand il n’y en avait pas !
Il n’hésitait jamais à monter au créneau avec énergie, habilité et humour – cet humour à nul autre pareil – pour défendre ses idées ou rappeler certains fondamentaux des actions communautaires aux responsables sans se soucier de son image et quitte à se retrouver à contrecourant.
Humble et discret, il n’était pas de ces juifs professionnels qui cherchent la lumière mais résolument tourné vers les autres à l’écoute de chacun, des qualités et des valeurs humaines héritées de son éducation rares de nos jours mais qu’il a su préserver et transmettre et mettre au service et de sa communauté et de son prochain.
Car oui il avait le souci de la transmission et du passage de flambeau.
Il voulait faire rayonner la communauté en dehors, et s’appliquait à faire connaitre le Judaïsme vers l’extérieur et les institutions locales et politiques.
Il prônait un judaïsme ouvert à tous et n’hésitait pas à accueillir chaque nouvelle famille qui arrivait à Neuilly comme si c’était la sienne.
Aujourd’hui tout le monde est un peu orphelin car chacun se rappelle avoir hérité quelque chose de Laurent.
Notre Lolo, toute la communauté, le Président , le Rabbin, les membres du CA, les Fidèles, les Permanents et les Bénévoles nous te te remercions car nous te devons tant et nous te faisons la promesse de continuer le chemin que tu nous as tracé dans la joie à l’image de ce que tu étais pour nous tous – Un Mench –
Baroukh Dayan Haemet Laurent Kern (Schlomo Leib ben Moshe) -1963/2022-
Laurence Faibis Jakubowicz et Marco Anoufa
Hommage à Laurent Kern par Moïse Taïeb – Rabbin de Bordeaux
Mon cher Laurent,
De toutes les plaisanteries, bons mots et blagues que tu pouvais faire, celle de nous quitter un soir de Roch Hachana est sans doute la moins bonne… mais elle n’est pas de ton fait et malgré la peine, la douleur et la tristesse que, pour une fois, tu nous causes, nous ne pouvons qu’accepter ce que D.ieu décide surtout en ces jours redoutables.
Je ne sais par où commencer tant se bousculent dans mon esprit, les souvenirs depuis notre enfance et adolescence à Neuilly jusqu’à cette dernière soirée en Israël il y a quelques semaines où nous sommes rentrés ensemble en taxi et où ta fatigue et ton épuisement, face à cette sale maladie qui te rongeait, commençaient à altérer ton optimisme légendaire alors qu’avec Nadine vous veniez de faire votre aliah et que vous m’aviez montré fièrement vos passeports israéliens.
Nous espérions tous te voir pour le mariage de Benjamin et à la fête honorant Madame Cahen le lendemain, mais les médecins ne voulaient pas te laisser voyager, alors tu as tout suivi par zoom…
Tu as été mon premier animateur aux EI, on disait encore les louveteaux, avant les bâtisseurs et je me souviens du 60ème anniversaire, où tu as tenu en haleine une foule de plusieurs centaines de personnes, sous un chapiteau détrempé en attendant que le projecteur de film 35 millimètres soit réparé…
Aucun défi ne te faisait peur, tu aimais échanger, parler et raconter, qui ne se souvient pas de l’histoire du gloutier qui racontée par toi pouvait durer des heures ….
Mais tu étais aussi une des mémoires de la communauté de Neuilly prenant la suite de ta chère maman, connaissant les familles, leurs histoires mais aussi les anecdotes sur les rabbins, officiants ou administrateurs ou fidèles de la communauté.
Tu aimais aussi jouer aux cartes comme à tous les jeux de société, et rire sans jamais te prendre au sérieux, toi qui signait les mails bourrés de fautes d’orthographe que tu nous envoyais « le concombre masqué »…
Tu as été fidèle à ton engagement EI. Tu as été un bâtisseur et pas un discuteur… et ceci dans tous les domaines personnels, familiaux, professionnels, associatifs et communautaires.
Tu as été de tous les combats pour transmettre la Torah et le judaïsme dans un esprit joyeux, heureux, apaisé et décomplexé : tout monde attendait tes interventions et commentaires lors de l’office des jeunes de Kippour à Neuilly, devenu après l’office achkénaze et qui n’aura plus la même saveur sans toi.
Tu connaissais toutes les problématiques communautaires, éducation, sécurité, communication, financement parfois au risque de faire peur aux esprits frileux.
Mais tu fus aussi un précurseur pour réfléchir à la communauté de demain, aux procédés à mettre en place pour plus de transparence, pour la construction d’une communauté juive durable d’un point de vue écologique et environnemental et tu t’intéressais à toutes les réflexions contemporaines et modernes sur la Halakha, que ce soit sur l’étude, la place et la participation des femmes.
Je t’avais d’ailleurs envoyé les Actes des Assises du judaïsme de Bordeaux, et tu fus l’un des rares dirigeants communautaires à relever avec finesse les manques de ces travaux et les nouveaux domaines à explorer.
Tu te seras battu contre l’avis de tous et surtout celui du Consistoire pour que le centre communautaire Jérôme Cahen de Neuilly existe et devienne une réalité.
Tu es allé voir les donateurs, un par un, as expliqué le projet, le montage juridique et je me souviens de tes larmes le soir de Kol Nidré alors que les dirigeants consistoriaux de l’époque avaient voué le projet à l’échec et fait de toi l’homme à abattre, parce que tu ne voulais pas te plier à leurs exigences …
16 ans plus tard, leurs noms ont été oubliés dans les poubelles de l’histoire et comme nous l’avions toi et moi dit, dans nos discours de Kippour, le Centre Communautaire était devenu une réalité.
Pour que ce Centre soit un lieu de vie, tu n’avais pas peur de mettre la main à la pâte, en dressant les tables, organisant les activités, emballant ou déballant des cartons, roulant la moquette ou en faisant l’article au micro lors du marché de Hanouka ou du salon du livre avec ton humour légendaire, qui parfois, voire souvent, choquait ou décontenançait ceux qui ne te connaissaient pas… Nous qui te connaissions adorions tes sorties tonitruantes.
Mais tu suscitais les activités, les projets et les portais jusqu’à leur aboutissement. Tu savais motiver les équipes et faire en sorte que chacun donne le meilleur et sans jamais tirer quelque avantage ou profit personnel du fait de tes fonctions de Président ou Vice-Président, adoptant un look résolument sans cravate même lorsque tu côtoyais des politiques.
Tu n’hésitais pas non plus s’il fallait dénoncer des malversations ou des injustices.
Au 90ème anniversaire des EI, tu as ramassé pendant des heures et des jours les déchets, fidèle à tes idées et sans honte à accomplir ce que certains nommeraient de basses besognes.
Comme à Moadon, ce dernier poste dans l’engagement communautaire et au service des autres, qui correspondait finalement à tes aspirations profondes plus que les interphones ou les ascenseurs…
Tu nous as tous obligés, moi le premier, à donner le meilleur de nous-mêmes pour faire de Neuilly une communauté exceptionnelle par sa diversité et ses différences.
Et tu fus le premier à me féliciter de mon choix de quitter Neuilly pour Bordeaux car ce départ m’enrichirait d’une nouvelle légitimité.
En écrivant tout cela, mes yeux sont pleins de larmes, tant il y aurait encore beaucoup à dire.
Je pense à Nadine, ton épouse, ta complice, la femme de ta vie, à Esther, à Raphaël et Simon dont tu étais si fier et qui te ressemblent tous les 3, tant par leur humour, leurs caractères enjoués mais qui pour les garçons chantent bien mieux que toi !
Tu n’avais pas hésité à créer avec toute la bande la Colo Kern tous les étés pour prolonger en famille, encore, cette ambiance de tendre camaraderie et d’affection acquise aux Ei et que chacun ressentait aussi dans votre maison de Courbevoie.
Je n’oublie pas Ethan ton petit-fils qui a illuminé tes dernières années et donné de nouvelles forces pour guérir et Michel, ton frère, dont j’imagine le chagrin.
Tu citais souvent cette citation de Rabbi Tarfon dans les pirké avot, les maximes des pères, qui disait que « ce n’est pas à toi de terminer le travail, mais tu ne dois pas t’en détourner »…
Mon cher Laurent, tu ne t’en es pas détourné un seul instant ni pour ta famille, ni pour tes amis, ni pour ta communauté sans jamais ménager tes efforts et toujours avec talent, discrétion, efficacité, mais surtout tendresse et amour.
C’est sur la terre d’Israël, à Péta’h Tikva, la Porte de l’Espoir, que tu vas reposer, toi, le fils et petit-fils de parents et grands parents achkénazes ayant connu la guerre et la Shoah.
Tu nous manques tous déjà tellement…
Veille sur Nadine et sur ta famille et fais-nous quelques signes pour nous aider à continuer sans toi, nous te le devons bien.
Affectueusement à toi
Moché T.
Je suis très attristé du départ de Laurent ZATSAL je suis sur pour un monde meilleur
Je l’ai connu dans mes années de présidence dans une communauté des Hauts de Seine il était très sarcastique à l’égard des autorités consistoriales et officielles car en effet c’était un homme d’action au verbe rare et efficace
Il était dévoué à la communauté mais très conscient des difficultés à exercer cette fonction de dirigeant communautaire
J’ai toujours apprécié sa vision de la communauté et de ses problèmes et souvent déception qu’il exprimait avec son humour yiddishs
Baroukh Dayan haemet
Ancienne collègue proche de Laurent, Je tiens à dire que nous ne l’oublierons jamais. Un homme brillant discret et toujours dans la bienveillance, son humour va nous manquer à tous. Une belle rencontre de vie. Marlyne George
J’ai connu Laurant Kern (et son frère Michel) quand il avait 13 ou 14 ans car il était le meilleur ami de mon frère au lycée Pasteur et/ou aux E.I. C’était un garçon vouzvouz, adorable et des plus charmants. Mon frère ayant fait son alyah peu après sa majorité, je l’ai complètement perdu de vue mais j’entendais de temps à autres son nom cité.
Le hasard m’a fait tomber des nues, il y a quelque 3 ou 4 ans, quand je l’ai retrouvé accueillant les visiteurs lors d’une journée aux livres au centre Jérôme Cahen où je l’ai vu être devenu un homme aux mêmes traits physiques, tout autant affable qu’auparavant, et plus souriant encore, occupant une position notable auprès de la communauté, et me « reconnaissant » près de 50 ans plus tard comme s’il m’avait quittée la semaine précédente.
Choquée quand j’ai appris sa mort de la bouche mon frère, je le croise à l’occasion – comme today – sur le net et mon coeur à chaque fois se brise. Lama si gentil et si tôt ?! (Ok, je connais le discours en réponse…)