Tribune Juive

Lettre ouverte de Sonya Zadig suite au post de l’Imam Chalghoumi concernant Mahsa Amini

Cher Hassan Chalghoumi,

Votre communiqué m’a fait chaud au cœur, rendre hommage à Masha Amina assassinée pour avoir mal mis son voile vous honore, je sais votre courage et votre ouvrage pour la paix, je connais les risques que vous prenez, en effet, vous portez bien votre nom Hassan, un homme bon. Nous nous sommes rencontrés il y a peu à l’ambassade de France en Israël, vous souteniez un voyage de jeunes musulmans en et cela ne m’a laissé aucun doute sur vos engagements pacifistes. 

Votre communiqué à propos de Masha et votre prise de position sur le hijab en tant que symbole d’oppression ne peut que nous rapprocher ; toutefois, votre phrase sur l’égalité de l’homme et de la femme comme faisant partie intégrante de l’avenir de nos civilisations m’interpelle.

 » Un acte horrible et horrifiant quand on tue pour le Hijab n’est pas le symbole de la femme musulmane mais instrument de l’oppression. La religion se vit dans le cœur, l’esprit et la prière et en aucun cas n’est motif de haine, de répression et de régression de la femme. La femme est l’égale de l’homme et partie intégrante de l’avenir de nos civilisations. Honte à ce regime et aux pourfendeurs de la liberté qui jouent contre leur propre civilisation et jeunesse. Prions pour ⁦‪#Masha_Amini« , écriviez-vous sur Facebook


De quelle civilisation parlons-nous ici ? Et permettez-moi, d’où parlez-vous lorsque vous dites cela ? Parlez-vous de votre place d’Imam, littéralement celui qui se tient devant pour diriger la prière commune , celui qui conduit les prêches du vendredi et qui se réclame du kitab ? Kitab dans lequel justement la femme n’est pas l’égale de l’homme, ou bien, prenez-vous de fait vos distances avec un texte sacré dont la dimension atemporelle et donc anhistorique est axiomatique pour tous les croyants se réclamant de la religion musulmane ?


Votre hommage m’oblige en tant que femme née en terre d’islam; mais quid du verset 34 sourate 4 du coran dans lequel l’inégalité femme-homme est inscrite noire sur blanc ?
Les hommes ont autorité sur les femmes, en raison des faveurs qu’Allah accorde à ceux-là sur celles-ci…et quant à celles dont vous craignez la désobéissance, Exhortez -les, éloignez-vous d’elles, dans leurs lits et frappez-les. Si elles arrivent à vous obéir, alors ne cherchez plus de voie contre elles, car Allah est certes haut et grand.

Masha a finalement désobéi à la prescription d’Allah et fut tué pour cela , comment comptez- vous concilier vos aspirations honorables d’égalité hommes-Femmes avec le dire de Dieu d’une supériorité ontologique de l’homme sur la femme inscrite dans le texte sacré lui-même ?


Je suis bien évidemment disposée à ouvrir ce débat avec vous afin de trouver une sortie honorable à cette impasse exégétique dans laquelle nous nous trouvons pour que plus aucune femme ne soit désormais assassinée sous couvert d’une injonction littéraliste du texte coranique. 


Je reste persuadée qu’entre gens éclairés, un pont demeure possible.

© Sonya Zadig

Née en Tunisie, de père musulman et de mère chrétienne, Sonya Zadig a fui son pays très tôt pour s’installer en France et échapper à un destin tragique. Psycho-clinicienne en France, Sonya Zadig est l’auteur d’essais, romans et de nombreux papiers dans des revues scientifiques ou à La Revue des 2 mondes. Proche d’Elisabeth Badinter, elle se réclame du féminisme universaliste et se bat pour réhabiliter la femme dans l’Islam, mais également pour faire savoir la place qui est attribuée aux juifs dans le Coran. 

Elle a été désignée en 2021 comme une des 109 Marianne à l’initiative de Marlène Schiappa, alors ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, en charge de la Citoyenneté. 

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