Les bras m’en tombent. Jeudi x septembre.
Je traverse les Cévennes au petit trot. Je chante à tue-tête dans les lacets et je m’arrête pour pisser dans le sous-bois, extatique.
Le problème c’est que je dois m’arrêter fréquemment, pas pour des raisons de sous-bassement , mais parce que quand je conduis , j’écris dans ma tête. A un moment faut noter la bonne phrase ou l’idée qui tue, tout en dépassant un camping car de trente mètres.
Ce que les gens emmènent dans leur convoi exceptionnel me sidère. La moto, le jet ski, le drone, les chiens, la chèvre, la grand mère et les enfants, c’est la conquête de l’Ouest. Et la télé écran géant pour regarder Netflix.
Les indiens n’ont pas encore attaqué mais je surveille les crêtes pour voir s’il n’y a pas de messages de fumée. Les apaches aiment bien Netflix.
Je voulais faire des clips de tout ça , j’ai douze heures de rushes, mais allez monter dans Prozerpine sur un smartphone, déjà ras la gueule avec mes dix paires de pompes, une caisse de vins Corse, la tente Quechua (au cas où je ne ferais virer par des lecteurs qui trouvent que je mange salement ). Sans parler de la valise avec mes vestes Hugo Boss. Je suis un No Mad snob.
Donc j’attendrai l’étape La Rochelle ou j’ai loué un truc au bord de l’océan. J’ai croisé en Camargue des gitanes qui vendaient de la bonne aventure, je me suis senti frère de sang et de route, même si j’ai planqué mon porte-feuille.
Ah chiotte-minou, voilà un propos qu’il est discriminant. C’était pour rire hein ? Pour parodier le grand Léo Ferré “poète vos papiers”.
C’est que l’humour dans un monde gouverné par les componctueux et les comprimés de la glande sudoripare est mal vu, et qu’il faudra désormais se prosterner devant l’internationale des moralistes et apocalypticiens.
Je m’en fous , je rigole dans ma forteresse intérieure et je braille “let’s spend the night together”…
PS : je sais plus la date, alors ce jour est né sous X.
Denis Parent
La Chronique de Denis Parent “Les bras m’en tombent”, que tous ses lecteurs assimilent à ses humeurs, est née il y a trente ans dans “Studio Magazine”, où l’auteur nous entretenait de cinéma.
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