La mort du philosophe Guy Samama

Philosophe engagé aussi bien dans la politique que dans le monde de l’édition ou des revues, Guy Samama est mort à Paris le 18 juillet, emporté par le Covid-19, à l’âge de 79 ans.

Né à Imperia, en Italie, le 2 juin 1943, il était le fils d’un avocat engagé dans la Résistance, Paul Samama, et de son épouse, Anny Gougenheim, qui fut arrêtée et déportée. Ce drame initial jouera un rôle important dans le dévouement du penseur à la recherche et au devoir de mémoire.

Des études classiques, hypokhâgne et khâgne au lycée Louis-le-Grand (Paris), puis cursus à la Sorbonne, le conduisent, agrégé de philosophie, à enseigner plus de deux décennies tant dans le secondaire qu’en classes préparatoires (1970-1994), tout en préservant un lien fort avec l’université – il est assistant à la Sorbonne dès 1969, au séminaire de Georges Canguilhem (1904-1995), philosophe auquel il restera lié.

Guy Samama intègre en 1978 l’équipe de Jean-Philippe Lecat (1935-2011), ministre de la culture et de la communication du gouvernement de Raymond Barre, où il est chargé du dossier des compagnies théâtrales. Avec l’arrivée au pouvoir de François Mitterrand, Jack Lang le charge d’une mission auprès des Jeunesses musicales de France (1981-1982). Bientôt, Guy Samama rejoint le ministère de l’éducation nationale, où il s’occupe notamment des techniques nouvelles et de l’innovation pédagogique.

Nouveau visage d’« Approches »

La cohabitation le conduit aux services des affaires étrangères en tant que chargé de mission (1986-1988). Mais si son parcours dans la sphère politique se poursuit – il est conseiller à la direction des affaires culturelles de la région Ile-de-France (1994-1995) –, c’est l’engagement éditorial de Guy Samama qui prend alors le dessus.

Après avoir participé, dès 1976, à la fondation de la revue L’Avant-Scène Opéra, dont il fut le premier rédacteur en chef (1976-1979), il travaille successivement avec les Presses universitaires de France, Fayard, Hachette, et finalement François Bourin (2011-2013). Mais c’est son investissement dans le domaine des revues qui rend le mieux compte de son engagement.

Collaborateur régulier de la revue Esprit, où il s’affirme comme un fin spécialiste d’Albert Camus, Guy Samama a incarné le nouveau visage de la revue Approches, fondée en 1974, qui vise à éclairer le contemporain en le dégageant de l’actualité éphémère pour privilégier la pluralité des regards et des « approches ».

Fondée par le père mariste Robert Plusse, marquée par la pensée d’Emmanuel Mounier (1905-1950), philosophe catholique initiateur d’Esprit, la publication change sous l’impulsion nouvelle de Samama, qui en prend la direction de la rédaction en 2010.

« Ouvrir une brèche »

En témoigne le remplacement du sous-titre initial, « Questions sur l’homme, questions sur Dieu », par « Littérature et sciences humaines » – annonciateur des remarquables numéros spéciaux qu’il dirigera, consacrés à Stefan Zweig, Henry Bauchau, Irène Némirovsky, Sylvie Germain, François Jullien ou Jean-Bertrand Pontalis –, puis par une formule qui résume bien le programme qui aura été le sien au long de sa vie : « Ouvrir une brèche ».


Guy Samama en quelques dates

2 juin 1943 Naissance à Imperia (Italie)

1969 Intègre le séminaire de Georges Canguilhem

2010 Directeur de la rédaction de la revue Approches

18 juillet 2022 Mort à Paris

© Philippe-Jean Catinchi

https://www.lemonde.fr/culture/article/2022/07/22/la-mort-du-philosophe-guy-samama_6135776_3246.html

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