Allemagne. Accusée d’antisémitisme, la directrice du prestigieux rendez-vous d’art contemporain démissionne

Sabine Schormann.  SWEN PFORTNER / DPA

La directrice de la Documenta, célèbre exposition allemande d’art contemporain à Cassel, va quitter son poste suite à une polémique autour de contenus jugés antisémites, ont annoncé samedi les responsables de cette manifestation.

Accusée d’antisémitisme, la directrice générale de la Documenta, Sabine Schormann, quitte son poste.

Sabine Schormann, la directrice de la Documenta, rendez-vous incontournable de la création contemporaine, a fait face ces derniers mois à des accusations d’antisémitisme et quitte définitivement son poste, un accord ayant été trouvé avec elle pour « résilier son contrat », selon un communiqué publié samedi par de la Documenta.

Ledit Conseil de surveillance, instance de contrôle, s’est dit « profondément consterné » par l’exposition,  lors de l’ouverture de la manifestation en juin, de « motifs clairement antisémites ».

En cause, Taring Padi, une fresque exécutée par un collectif d’artistes indonésiens, et People’s Justice, une une banderole où un soldat représenté à tête de porc et portant une étoile de David porte un casque sur lequel est inscrit … « Mossad ». Mais encore un homme cochant toutes les cases d’une caricature antisémite, depuis les dents affûtées jusqu’aux oreilles pointues, en passant par le gros cigare aux lèvres.

L’oeuvre a été rapidement recouverte à la demande de l’ambassade d’Israël et des représentants des Juifs d’Allemagne.

Des employés de la Documenta décrochent « People’s Justice », l’œuvre du collectif d’artistes indonésiens Taring Padi, à Cassel (Allemagne) le 21 juin 2022.
People’s Justice. Photo Uwe Zucchi / DPA / AFP

On apprend via un communiqué que toute la lumière sur cette affaire sera faite afin d’éviter d’autres « incidents antisémites » dans le monde culturel et artistique.

Pour sa part, Claudia Rotha, ministre allemande à la Culture, a approuvé le départ de Sabine Schormann et demande qu’un travail soit fait pour savoir comment de tels contenus antisémites ont pu être exposés.

Remko Leemhuis, Directeur de l’American Jewish Committee, a reproché pour sa part dans le quotidien Bild à l’instance de contrôle de la Documenta de ne pas aller assez loin et demande que soient évoquées sans détour des « caricatures antisémites ».

Un point de vue partagé par le président du Conseil central des juifs d’Allemagne, Josef Schuster, pour qui le départ de Mme Schormann aurait dû intervenir bien plus tôt.

La foire d’art s’était déjà ouverte par une autre polémique voisine : un collectif palestinien présent à l’exposition, The Question of Funding, très critique envers l’occupation israélienne, a été accusé d’être lié au mouvement Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS). Celui-ci prône le boycott d’Israël en raison de son occupation des Territoires palestiniens. Le BDS a été étiqueté comme « antisémite » par le parlement allemand en 2019 et n’a pas le droit de toucher d’argent public. Or, environ la moitié du budget de la Documenta – 42 millions d’euros – provient de l’Etat fédéral.

Le scandale est un coup dur pour ce rendez-vous majeur de l’art contemporain mondial, dont la première édition a eu lieu en 1955 pour apporter une réponse tranchée à la propagande nazie sur l’ »Entartete Kunst » ou Art dégénéré, et qui se déroule tous les cinq ans, montrant en une trentaine d’endroits de la ville et pendant cent jours des oeuvres de plus de 1.500 artistes.

Une direction intérimaire sera désignée.

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