L’Allemagne vient de bloquer une aide de 7 milliards supplémentaires à l’Ukraine, et vient de persuader les USA et, surtout, le Canada, de rendre à la Russie une turbine du Nordstream, laquelle turbine, fabriquée par Siemens, était en réparation au Canada.
Cette guerre est aussi, pour moi, un miroir du monde réel : pourquoi faut-il qu’une turbine qui est employée à Viborg, au nord de Pétersbourg, pour actionner le Nordstream, et donc la fourniture de gaz à toute l’Europe, soit envoyée au Canada pour y être révisée, et je me demande comment ils l’envoient, cette turbine, et de quoi elle a l’air, cette turbine, et comment ils font pour envoyer le gaz, concrètement parlant, dans les tuyaux.
J’apprends que, ces turbines de Nordstream, il faut les arrêter pour maintenance : tous les ans, en juillet, pendant quelques jours, et, tous les dix ans, pour plus longtemps, avec, visiblement, démontage.
Et, me dit l’article de journal d’où je puise mon savoir aveugle (aveugle, parce que je ne comprends rien à la chose elle-même), c’est que l’Allemagne était persuadée que la Russie avait des turbines de réserve, ou de rechange… ce qui me stupéfie, parce que, les turbines russes, ce sont des turbines allemandes, fabriquées par Siemens, et que, donc, Siemens doit en avoir le compte.
Et, visiblement, des turbines, Poutine en a, en réserve, parce que je vois mal et Gazprom et Siemens signer un contrat qui ne prévoit pas de mécanisme de rechange ou de maintenance…
L’Allemagne dépend du gaz russe pour plus de 60% de ses besoins. Les gouvernants allemands (Angela Merkel) n’ont pas jugé utile de chercher à diversifier les sources d’approvisionnement, et, en conséquence, l’Allemagne est totalement dépendante de la Russie. La Russie coupe le gaz, l’Allemagne, littéralement, s’effondre. Elle tombe dans une récession catastrophique, parce qu’il ne s’agit pas seulement, on comprend bien, du gaz fourni aux ménages en hiver, mais de l’énergie donnée aux entreprises. La crise allemande, mécaniquement, provoque une crise globale dans l’Union européenne, et d’abord chez nous, en France, — pays qui, lui, ne dépend du gaz russe que pour moins de 20 %, parce que nos dirigeants (depuis, visiblement, assez longtemps — je ne sais pas qui, était-ce déjà Chirac ?) avaient pensé à diversifier nos sources.
Le résultat de cette récession est évident : il y aura une crise sociale, le gouvernement, démocratique, ne pourra que tomber, et, d’une façon ou d’une autre, le parti qui gagnera sera un parti pro-russe (même si l’Allemagne n’a pas — je touche du bois — l’équivalent de notre Rassemblement lepeniste). À partir de là, la marée populiste, déjà si forte, risque d’être irrésistible, dans l’ensemble de l’Europe…
J’en profite pour dire que j’ai appris comment l’Ukraine, elle, se fournit en gaz : elle aussi, elle utilise le gaz russe, à part que, quand ce gaz arrive dans ses tuyaux à elle, — je veux dire pour sa consommation nationale, parce que les canalisations de gaz russe continuent de passer par l’Ukraine, et, ces canalisations-là, les bombes russes ne les visent pas du tout, mais pas du tout du tout —, ce gaz provient de Pologne ou de Slovaquie, et on parle de « flux inversés », parce qu’il s’agit d’une revente : une part du gaz acheté par la Pologne (à la Russie ou ailleurs) et la Slovaquie est revendue (avec bénéfice, naturellement) à l’Ukraine, et c’est un deal qui fonctionne depuis, visiblement, 2016. L’Ukraine paie donc son gaz plus cher que les autres pays européens, mais c’est le — un des — prix de son indépendance.
Tout ça pour dire que, l’Allemagne, et la France, et, dans une moindre mesure, l’Italie, essaient par tous les moyens de composer avec Poutine, selon le principe de Mme du Barry « encore un instant, monsieur le bourreau » ). Et Poutine joue de ça. Nous sommes entrés, en ce milieu du mois de juillet, dans un période de maintenance, et Poutine vient d’arrêter toute fourniture pendant dix jours. Personne n’y croit, à cette maintenance, même si, disent certains spécialistes de la chose, ça tombe réellement comme ça, — on tombe, là maintenant, en pleine guerre, dans une période de maintenance qui revient tous les dix ans. Allez savoir, je n’en sais rien.
Mais le chantage de Poutine est clair. Non, comme il vient de le dire, « les choses sérieuses n’ont pas encore commencé ». Il a des armes de destruction massive, et à long terme, et il les utilisera évidemment, — je le répète, parce qu’il joue, littéralement, sans aucune métaphore, sa propre vie, pas seulement la vie de son régime : la sienne, en propre (si j’ose dire). Nous essayons toujours de considérer qu’il est un dirigeant comme un autre, mais non : il est un mafieux, et un mafieux acculé. Un mafieux qui, lui-même, est soumis à des sanctions drastiques, et, oui, catastrophiques.
Et je ne parle pas du prix de ces importations de gaz : depuis le 24 février, la Russie a reçu, rien de la part de l’UE, la somme de 52 milliards d’euros (divisez par 140 jours de guerre, et regardez combien nous sommes forcés de payer Poutine pour qu’il bombarde les Ukrainiens), mais, naturellement, Gazprom ne vend pas qu’à l’Europe : il y a la Chine, et l’Inde, et le monde entier. Ce qui fait que c’est bien plus de 100 milliards d’euros, ou de dollars, que Poutine a engrangé, d’autant que, par les lois du marché, le prix du gaz, en période de guerre, a atteint des sommets et que, même s’il vend moins de gaz en 2022 qu’en 2021 ou 2020, Poutine peut toucher davantage…
Dès lors, nous assistons à une espèce de course contre la montre, même si c’est une course lente, quasiment immobile au jour le jour. D’un côté l’effet cumulé d’une défaite militaire et des sanctions économiques ; de l’autre, la menace, tout à fait réelle, imminente et, à vrai dire, déjà engagée, d’une crise de toute la zone européenne, provoquée par Poutine, et une crise mondiale, là encore provoquée par Poutine, pour l’approvisionnement en céréales (là encore, j’en parlerai, j’espère, une autre fois, cette aberration que je découvre, que le blé ukrainien préserve l’Afrique de la famine…). La défaite militaire russe, elle est loin d’être actée — c’est le moins qu’on puisse dire. Même si, oui, je continue d’affirmer qu’elle est inévitable… si les alliés n’obligent pas l’Ukraine à faire la paix pour, eux, avoir du gaz.
Poutine n’en est plus à la négociation. Il vient de se revendiquer du Goebbels de février 1943. Il faut, au contraire, pour le monde entier, accroître l’effort d’aide militaire à l’Ukraine, accroître encore la pression économique, l’embargo, et, tout en refaisant les réserves (qui, en France, allez savoir pourquoi, ne sont pleines qu’à 55%), tout en essayant par tous les moyens d’éviter l’affrontement direct, que, là encore, Poutine va continuer de chercher, — bref tout faire pour que, d’ici l’hiver, le monstre du Kremlin ne soit plus en état de nuire.
On peut rêver, mais le couperet est là, — principe de réalité. Pour l’instant, l’aide militaire ne vient quasiment plus que des USA, qui ont leur propre gaz (de schiste) à vendre.
© André Markowicz
« D’où je puise mon savoir aveugle (aveugle, parce que je ne comprends rien à la chose elle-même) »…
Enfin une parole de vraie sous la plume d’André Marcowicz !
D’accord avec Lucie Kowalski ci-dessus.
J’ai déjà commenté (en le réfutant) l’autre article de Markowicz sur cette page intitulé « Vacances. Pas un mot sur l’Ukraine ».
Celui-ci m’inspire une autre remarque : Markowicz détaille, sur la majorité de l’article, les raisons pour lesquelles (normalement…) nous devrions avoir intérêt à nous arranger avec la Russie. Il a raison sur ce point.
Il parle aussi de l’inanité des « sanctions », à double tranchant et qui in fine nous coûterait au moins aussi cher qu’à la Russie. Il a raison là aussi.…
Ce n’est pas eux qui manqueront de gaz, de pétrole et de blé…Ils ne manqueront pas d’argent non plus puisqu’ils vendent leurs hydrocarbures plus cher, moyennant éventuellement des intermédiaires comme l’Inde.
MAIS Markowicz est totalement incohérent en tirant des conclusions contraires : « Il faut….accroître l’effort d’aide militaire à l’Ukraine, accroître encore la pression économique, l’embargo ».
Markowicz marche sur ses lacets… Où croit-il aller ?
Complément d’infos : Markowicz dit vrai. L’Ukraine utilise pour ses propres besoins, quoique indirectement (en passant par des pays limitrophes), du gaz russe ; qu’elle paie cher et qui finance l’effort de guerre russe. Business as usual.
MAIS elle fait « mieux » : le gazoduc russe le plus ancien (« brotherhood », traduisez « fraternité »), traverse le territoire ukrainien sur au moins mille km pour alimenter l’Allemagne.
Il n’a pas arrêté de fonctionner un seul instant, guerre ou pas ; l’Ukraine perçoit au moins un milliard de dollars annuel de droits de passage et la Russie collecte le prix du gaz qui finance son effort de guerre…
Or, un tel ouvrage comporte de nombreux point d’arrêt techniques qui permettent d’en cloisonner des segments au besoin. L’Ukraine n’a AUCUN problème pour ce faire (arrêter le gaz) MAIS elle ne le fait pas…
De quel droit on nous demande des efforts, coûteux en risqués, pour un pays qui ne fait pas un simple effort technique ?
Nous sommes en Europe, donc voisin des Russes.
De ce fait nos intérêts à long terme ne sont pas ceux des Américains.
L’euro est au plus bas face au dollar. Nos intérêts sont divergents. Par ailleurs le rouble est au plus haut.
Les sanctions ne sanctionnent que l’Europe.
« De ce fait nos intérêts à long terme ne sont pas ceux des Américains. »
Les Américains conseilleurs ne seront pas les payeurs … Ils peuvent joyeusement nous envoyer au casse-pipe, n’en ont rien à foutre. Comme Markowicz, d’ailleurs. Depuis que je le lis, je me pose la question : Pour qui roule-t-il au juste, celui-là ?
Je regarde la T.V. .
Un enfant tué par les tirs russes.
Bizarre, les obus Ukrainiens ne tuent jamais. Ils n’ont jamais rien détruit, même pas un trottoir.
Bizarre.