Les apartés de Félie. Semaine sous haute tension

Indécente a minima, pointée du doigt pour antisémitisme, Mathilde Panot accuse encore la PM de vouloir “gouverner par effraction”. © Stéphane de Sakutin / AFP

Début du mois de juillet sous haute tension et nous ferons l’impasse sur les excellents résultats du bac qui perd, au fil des ans, son sens, sauf pour les élèves qui se sont donné les moyens de mériter une mention bien ou très bien.

Des Etats-Unis où rien ne s’arrange

En effet, ce premier juillet,  la loi House Bill 1557 , Don’t say gay est entrée en vigueur en  Floride où il est désormais interdit d’enseigner des sujets en lien avec l’orientation sexuelle ou l’identité de genre à l’école primaire. Le texte s’applique de la maternelle jusque chez les élèves de huit ou neuf ans.

Le gouverneur républicain de Floride, Ron DeSantis, a signé cette loi en mars dernier, estimant que c’était aux parents de parler de ces questions avec leurs enfants. Au Conseil d’administration des écoles publiques du comté d’Orange, à Orlando, enseignants, parents d’élèves et militants sont nombreux à s’opposer à cette loi.

Selon le fondateur de l’association LGBTQ + One Orlando , Josh Bell, les ambitions du gouverneur Ron DeSantis sont ailleurs : Notre gouverneur a toujours misé sur les idées extrémistes : il essaie de se positionner pour la présidence en séduisant l’électorat de Trump. Plus vous êtes extrême, plus vous obtenez de votes, et il utilise la communauté LGBTQ comme une cible politique, explique le militant à Radio France.

Quelques jours après l’arrêt de la loi Roe v. Wade rendant aux Etats la liberté d’interdire les avortements, il est donc aussi interdit de parler de sa sexualité dans les écoles de Floride.

En début de semaine, Madame Elisabeth Borne a accordé une interview à Elle. Dans cette dernière, elle a précisé avoir saisi le Comité consultatif national d’éthique (CNNE)  pour un éclairage sur la notion du consentement lors des examens gynécologiques, après une enquête visant la secrétaire d’Etat au développement, Chrysoula Zacharopoulou, gynécologue de profession. Cette spécialiste reconnue de l’endométriose est visée par une enquête après deux plaintes pour viol et une troisième pour violences déposées ces dernières semaines. Sans se prononcer sur ce cas précis, la première ministre affirme qu’il faut traiter le sujet » quand il y a « des femmes qui ressortent d’examens médicaux en ayant souffert et avec le sentiment de ne pas avoir été respectées. Elle ajoute : Mais j’entends aussi un certain nombre de médecins qui se sont exprimés pour dire qu’il fallait faire attention aux mots employés, notamment au terme de viol, et juge très important, lorsqu’il y a des examens intrusifs, de prendre le temps de recueillir le consentement.

Ces recommandations , attendues à l’automne, devront permettre de mieux guider les professionnels dans l’exercice de leur mission, tout en répondant aux attentes et au souci légitime des patientes quant au respect de leur volonté, de leur intégrité, conclut Elisabeth Borne, qui précise que l’affaire de Mme Zacharopoulou, restée au gouvernement, et celle de Damien Abad, évincé, qui est lui aussi visé par une enquête pour tentative de viol, sont deux sujets différents : Dans le cas de M. Abad, il y a un devoir d’exemplarité (…) On n’attend pas simplement des hommes politiques ou des responsables qu’ils ne soient pas pénalement répréhensibles. On attend d’eux qu’ils soient exemplaires.

Ce jeudi 7 juillet, le Parlement Européen a demandé que le droit à l’avortement soit inscrit dans la charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne, ce qui est une avancée nécessaire afin qu’aucun état ne puisse revenir en arrière comme c’est le cas aux USA.

Une pécadille? Non, une polémique justifiée

En effet, c’est ce mercredi 6 juillet où la Première ministre faisait, comme il se doit, son premier discours de présentation devant le Parlement, qu’il s’est produit un réel tremblement de terre.

Je n’entrerai pas, point par point, sur le discours de la Première Ministre que je vous invite à lire à la suite de cette article, mais la féministe que je suis profondément a été touchée par ses phrases qui ne ressemblaient pas aux mots creux et habituels des longues allocutions parfois bien ennuyeuses auxquelles nous sommes habitués.

Pour preuve :

Première ministre de la France, je le dois à la République.

C’est elle qui m’a tendu la main, en me faisant pupille de la Nation, alors que j’étais cette enfant,

dont le père n’était jamais vraiment revenu des camps.

C’est elle qui m’a montré que le travail peut déjouer les destins tracés et qui m’a donné un métier.

C’est elle qui me guide et me pousse dans mon engagement.

Elle, à qui je veux rendre un peu de ce qu’elle m’a donné.

C’est la République, qui a ouvert la voie à tant de femmes avant moi.

Je pense à Irène Joliot-Curie, Suzanne Lacore et Cécile Brunschvicg,

premières femmes membres d’un Gouvernement, en 1936, sous le Front populaire.

Je pense aux 33 premières femmes à faire leur entrée dans cet hémicycle au lendemain de la Libération.

Je pense à Simone Veil, dont la force et le courage m’inspirent à ce pupitre.

Je pense à Edith Cresson, première femme à accéder aux fonctions de Première ministre.

Je sais, dans cette Assemblée présidée pour la première fois par une femme et comme chaque femme sur ces bancs,

ce que je dois à toutes celles qui ont ouvert le chemin avant nous.

Je crois à la force de l’exemple

et le combat continuera jusqu’à ce que l’égalité ne pose plus de question.

Dans cette partie de son discours, elle exprime sa gratitude envers la France, elle pupille de la nation, fille de  Joseph Bornstein, rescapé du camp d’extermination nazi  Auschwitz-Birkenau et qui se suicida tel Primo Levi en 1972, à l’âge de quarante-huit ans.

Cette histoire bouleversante, elle n’était en rien obligée de la livrer mais ce monde dans lequel nous vivons où la vie privée n’est même plus respectée et où  tout doit être étalé avant que la presse ou les réseaux sociaux ne s’en emparent, ne lui laissait guère d’alternative.

Et, là : l’impensable, dans les propos de Mathilde Panot, députée LFI du Val de Marne, qui a attaqué, frontalement, la première ministre en ces termes :

Madame Borne, il faut le dire : vous êtes une rescapée. Vous êtes la Première ministre la moins bien élue de la Ve République. Vous avez maintenu un gouvernement à trous et en sursis : trois de vos ministres ont été défaits aux législatives. Que dire du ministre accusé de plusieurs viols, maintenu en poste jusqu’à lundi, ou de celle visée pour des viols gynécologiques toujours en fonction à ce jour ? Le camouflet électoral des législatives porte votre nom. Mais vous voilà toujours là !

Dérapage sémantique

Propos polémiques pour le moins et l’on comprend l’indignation qui s’est emparée de l’hémicycle, suivie immédiatement de celle des réseaux sociaux.

Indignation dénoncée dans un tweet de Raphaël Enthoven : Après l’abject “Durafour crématoire”, Mathilde Panot dans la droite ligne de Le Pen père, parle de “rescapée” à propos de la fille d’un résistant rescapé d’Auschwitz.

Ignorance ou monstruosité délibérée ?

Indignation dans celui de Yonathan Arfi, Président du CRIF, qui a répliqué : Les mots ont un sens. Ils ont aussi une Histoire. Qualifier la fille d’un déporté de “rescapée” à la tribune de l’Assemblée Nationale, c’est faire le choix, conscient ou inconscient, de l’indécence. Aucun débat politique ne justifie cet outrage.

Réelle intentionnalité ?

Ce qui pose problème est l’absence d’excuses de Mathilde Panot dont la réponse à Enthoven laisse pour le moins circonspect : Malhonnête. J’employais le mot dans le sens sauvée de justesse par la Macronie. Aucune référence à sa terrible histoire familiale.

Quant à celle du parti LFI par la voix de François Ruffin, lui-même député à l’Assemblée Nationale, elle est fort peu convaincante :  On sort un mot du contexte… Je pense que Mathilde ignorait même l’histoire familiale qui a été annoncée à la tribune hier par Elisabeth Borne… Elle est rescapée de quoi ? Du suffrage universel, tout le monde l’a bien compris.

Peut-on se satisfaire de ces explications ? Elles sont bien pauvres et peu pertinentes, Personne n’ignorant à l’Assemblée Nationale le parcours de vie de la Première ministre qui venait juste d’y faire allusion.

Elément d’une réflexion et miroir des mots. Ceux qui font mal, blessent

Chronique d’un racisme ordinaire comme cet homme qui me dit un jour, voyant mon magen : Vous êtes juive ? Puis, laissant un silence parce que j’étais éberluée :  Retourne dans ton pays.

Et, j’étais tombée des nues car mon pays c’est là où je suis, et dont je porte le prénom.

Il ne faut donc jamais baisser la garde et continuer sans cesse à être dans cette vigilance éclairée dans une France qui semble s’enfoncer un peu plus chaque jour dans des ténèbres passées d’une pensée malveillante.

L’heure est plus que jamais au combat

Demain sera ce que nous allons en faire. Et, si nous désirons un horizon bleu azur, il faut nous en donner les moyens.

Allons-nous conjuguer notre présent dans un racisme ordinaire ?

Je ne nous le souhaite réellement pas, une société qui discrimine est une société où les repères floutés ne présagent rien de très bon, comme le disait Nelson Mandela : Je déteste la discrimination raciale le plus intensément et dans toutes ses manifestations. J’ai tout combattu durant ma vie ; je la combats maintenant, et je le ferai jusqu’à la fin de mes jours.

© Felicia-France Doumayrenc

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Felicia-France Doumayrenc est autrice, critique littéraire, éditrice et peintre.

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