« C’est un paradoxe », note Laurent Joly, historien et auteur du livre La rafle du Vel d’Hiv. Au micro de Jean-Pierre Elkabbach dimanche, le chercheur au CNRS a évoqué les grandes lignes de son livre et notamment cette révélation : pour les nazis et le régime de Vichy, la rafle du Vel d’Hiv de juillet 1942 a été un « échec », alors qu’il s’agit « de la plus grosse opération qui a eu lieu contre les juifs en Europe de l’Ouest : 13.000 personnes arrêtées en moins de deux jours ». « Il n’y a pas d’équivalent en Europe de l’Ouest, et en même temps, c’est un échec pour les autorités », a rapporté l’historien.
Les 16 et 17 juillet prochains, la France va commémorer les 80 ans de cet événement tragique intervenu pendant de la Seconde Guerre mondiale. Parmi les 13.000 personnes arrêtées, 4.000 étaient des enfants, ce qui a posé problème, a relaté Laurent Joly. « Vichy a insisté pour que les enfants partent tout de suite, sans que les Allemands le demandent. Le régime s’est retrouvé avec 4.000 enfants sur les bras », a-t-il expliqué.
» Il s’agissait de gonfler les chiffres «
« De l’autre, il s’agissait de gonfler les chiffres. 13.000, c’est mieux que 9.000 », a précisé le chercheur. « René Bousquet, le chef de la police, avait dit (aux Allemands) ‘Vous aurez le nombre de juifs étrangers que vous voulez’. L’idée, c’était de leur donner le maximum de personnes. On ne fait pas attention aux infirmes, aux gens qui ont des services de guerre, et surtout, les gens qui ont des enfants français auraient dû être protégés », a indiqué Laurent Joly.
« Les enfants des juifs étrangers nés en France étaient Français à titre définitif, même Vichy ne les a pas dénaturalisés », a détaillé l’historien. « On a 3.000 enfants français qui sont livrés. Jamais Vichy n’a livré autant d’enfants français que pendant la rafle du Vel d’Hiv. »
Source : Europe1
A lire, un beau livre sur cet épisode tragique :
Annette Muller, la petite fille du Vel d’Hiv.
Récit d’Annette Muller et de Manek, son père.
Contributions historiques Katy Hazan, Henri Minczeles, Catherine Thion et Benoît Verny. Préface Serge Klarsfeld.
Aux Éditions CERCIL.(Centre d’Étude et de Recherche sur les Camps d’Internement dans le Loiret (Beaune la Rolande, Pithiviers et Jargeau) et la déportation juive.
A lire dans Le figaro du 16 juin, La Rafle du Vel d’Hiv de Laurent Joly: les archives de l’enfer, un commentaire de Paul-François Paoli.
Paul-François Paoli indique en conclusion de son article,
… la conclusion de Joly, qui défend bec et ongles la rhétorique du discours de Chirac de 1995, est contestable au regard même de sa propre enquête. Joly écrit qu’il ne faut pas céder à « une fixation un peu malsaine sur la responsabilité de la France. »
Qu’y a-t-il de malsain à relever les contradictions d’un président qui, après apvoir déclaré que « la France, ce jour-là accomplissait l’irreparable » lors des déportations du Vel d’hiv affirmait quelques lignes plus loin que « la France n’était plus depuis longtemps à Paris » mais à Londres et dans les sables lybiens de la bataille de Bir Hakem ? La France digne de ce nom ne pouvait être en même temps et en Angleterre et à Drancy.